Bernard SANDRAS, âgé de 63 ans et contrôleur général de son état, a été promu général – disons de …cavalerie, son arme d’origine – par les vertus de l’arrêt du Conseil d’Etat du 10 janvier 2007 qui a estimé « qu’eu égard tant à la place qui leur est confiée dans la hiérarchie militaire qu’à la nature et à l’étendue des prérogatives dont ils disposent, les contrôleurs généraux des armées doivent être regardés comme des officiers généraux pour l’application des dispositions précitées du décret du 7 mai 2001 » – décret relatif à la commission de recours des militaires -.
Sous sa présidence, les droits des requérants ont régressé. Le taux d’agrément des recours est resté extrêmement faible.
C’est dire que l’ADEFDROMIL salue, sans regrets, son départ à sa demande selon l’arrêté du 14 février 2008 du ministre de la défense.
Entré tardivement à Saint Cyr à 23 ans en 1967, Bernard SANDRAS est chargé, en deuxième année, de l’encadrement de la promotion des jeunes. Chez les cyrards, cette fonction porte le nom de « gradaille ». Elle consiste entre autres taches nobles à veiller à la bonne tenue des chambrées et à contrôler le rangement des effets du paquetage militaire qui, à l’époque, doivent être rangés selon des piles rigoureusement pliées mesurant 21 cm. Toute erreur est impitoyablement sanctionnée par l’expulsion manu militari des dits effets hors des placards, par des entraînements nocturnes à la marche et des présentations en tenue diverses et variées au bon vouloir de la gradaille officiant. L’activité forge le caractère de celui qui la subit, et sans doute plus encore de celui qui la fait subir. Selon certains qui l’ont connu dans cette fonction, sa rigueur tatillonne y a fait merveille et l’a ainsi préparé à la présidence de la commission qu’il a exercée pendant un peu moins de 3 ans.
A la sortie de Saint Cyr, ce fils de gardien de la paix aurait pu choisir la gendarmerie. Mais il préfère la basane, c’est-à-dire la cavalerie, car il monte.
Rapidement cependant et en bon cavalier, il comprend que son âge constitue un handicap insurmontable pour atteindre les sommets de la hiérarchie.
Après être retourné à Saint Cyr comme chef de section de 1976 à 78, il intègre le contrôle général en 1984 pour devenir contrôleur général en 1992.
Après avoir été, pendant plusieurs années, adjoint au directeur de la fonction militaire –selon le « Who’s Who »-, en charge notamment des statuts, il coordonne les actions d’audit du contrôle général dans la gendarmerie, avant d’accéder quelques années plus tard à la présidence de la commission de recours en juillet 2005.
Or, la présidence de cette commission doit être assurée par un officier général en application du décret du 7 mai 2001. La question se pose donc de savoir si un contrôleur général des armées est un officier général.
Car, les membres de ce corps relevant directement du ministre, ont toujours voulu se placer à part de la hiérarchie générale. Ainsi, le code de justice militaire précise dans son article 26 : « Pour le jugement des Maréchaux et Amiraux de France, des officiers généraux ou assimilés et des membres du contrôle général des armées, il est établi en temps de guerre, un haut tribunal des forces armées ayant son siège à Paris…». Ce qui signifie en clair que les membres du Contrôle Général ne sont pas des assimilés « généraux » CQFD !
Toutefois, le statut de 1972 pouvait laisser un doute, car il fallait se reporter aux décrets régissant le corps pour comprendre cette situation particulière.
Mais, à l’occasion du ravalement de façade du statut en 2005, le corps du contrôle général, qui a désormais pris le pouvoir au ministère, obtient que ce particularisme soit inscrit dans la loi : « le corps du contrôle général des armées a une hiérarchie propre qui ne comporte aucune assimilation avec les grades des autres corps d’officiers »(art.19).
L’ADEFDROMIL avec ses modestes QI et ses certificats d’étude de la communale se rendant compte de l’illégalité de la présence d’un contrôleur général à la tête de cette commission annonce alors en 2006 que le ministère va vers des déboires juridiques importants en matière de recours en raison de l’incompétence d’un contrôleur général à présider la commission (Lire Trafalgar juridique annoncé au Ministère de la Défense). Quelques temps plus tard, l’ADEFDROMIL apprend que le CGA SANDRAS a commis en mars 2006 une note désespérée de 6 pages pour démontrer, « contra legem » et contre la pratique élémentaire de tout bon raisonnement juridique, qu’un contrôleur général est un officier général (Lire Trafalgar juridique annoncé au ministère de la Défense, la suite…). Il tente ainsi de sauver de l’annulation de multiples recours sur lesquels la commission qu’il préside, a donné son avis.
Mission réussie à la hussarde avec l’engagement de tous les moyens et les réseaux du ministère, mis en oeuvre pour convaincre les juges du Palais Royal de lui donner raison, quitte à torturer la loi et le règlement.
C’est ainsi qu’intervient l’arrêt du 10 janvier 2007 qui sauve de nombreuses décisions du ministre (Lire La soldate MAM sauvée par deux sous sections réunies) et dont l’argumentation a été reprise dans plusieurs arrêts de la Haute Assemblée.
Toutefois, à l’examen de cette décision, l’ADEFDROMIL constate que les juges du Palais Royal présidés pour la circonstance par M. STIRN, lui-même, président de la section du contentieux ont visé le statut de 1972 et non celui de 2005.
Au regard de la nouvelle loi parfaitement explicite sur le positionnement des contrôleurs généraux dans la hiérarchie militaire – ce ne sont pas des officiers généraux -, le Conseil d’Etat reproduira t-il indéfiniment la même interprétation accommodante des textes que celle livrée par son arrêt du 10 janvier 2007 ?
L’ADEFDROMIL, têtue comme à son habitude, souhaite le savoir.
C’est pourquoi, elle va déférer à la censure du Conseil d’Etat l’arrêté du ministre de la Défense en date du 14 février 2008, nommant le contrôleur général GROLLEMUND à la présidence de la commission en remplacement du général de cavalerie SANDRAS, qui redevient ipso facto Contrôleur Général.
Ces gesticulations pitoyables nous confirment dans l’idée de demander l’instauration d’un véritable organe de médiation au sein des armées : le médiateur militaire qui serait présidé par un membre du Conseil d’Etat ou de la Cour de Cassation.
Les armées ne pourraient plus alors laver leur linge sale en famille et au détriment des militaires qui y servent.