Internet leur fait peur (Par Jacky Mestries)

On va bientôt se demander en allumant son ordinateur s’il ne va pas falloir fournir un certificat médical, une attestation de bonnes mœurs, une photographie compatible avec les systèmes de reconnaissance ou si une analyse ADN servira  de mot de passe de connexion. Pour faire plus populaire : Iront-ils jusqu’au toucher rectal pour que je puisse surfer sur la toile.
Après la dérision, un petit regard sur le décret  du 25 février 2011 relatif à la conservation et à la communication des données permettant d’identifier toute personne ayant contribué à la création d’un contenu mis en ligne.

http://www.legifrance.gouv.fr

La parution de ce décret en ce beau mois des giboulées ne peut être détaché de l’actualité. Je l’ai dit ailleurs, les évènements en Afrique du nord n’allaient pas rester sans réponse de la part des dirigeants qui sentent qu’ils ne maîtrisent plus l’information qui servait à nous imposer une opinion; ils ne maîtrisent plus les informations les concernant qu’ils parvenaient à étouffer.

La presse saute dans ce bain de liberté d’opinion et se trouve bien obligée maintenant de traiter de ce qu’ils ne pouvaient plus : internet oblige peuvent-ils dire !

Wikileaks ne saurait rester sans réponse. Il est probable que les historiens expliqueront que les dénonciations publiques du régime Tunisien sur ce site sont une des causes de la révolution que ce pays vient de connaître.

Internet fait peur à la classe dirigeante quand les populistes ( la « populace » disaient les marquis au début de la révolution Française ) s’en emparent pour expliquer ce qui se passe. Chacun avec sa petite info déposée soigneusement construit l’espace de parole que l’on ne veut pas entendre. Chacun avec ses mots, avec son ressenti vient expliquer : « moi,  j’ai vu ça  »

Et d’autres font la liaison entre ces infos, en font des synthèses pour donner une vue plus globale.

Vous devez comprendre que cela ne peut plus durer et que la classe dirigeante entend contrôler parfaitement et globalement l’information à notre disposition pour nous faire comprendre par la force que les caméras de surveillance sont nécessaires à notre sécurité, que les forces de projections quasi militaires sont la solution à l’insécurité et que le petit flic bien sympa, un peu bedonnant, mais tellement gentil qu’on lui raconte tout, n’est qu’une relique.

Vous devez comprendre qu’il n’y a que nos gouvernants qui ont droit à une vision globale de ce qui se passe dans le pays, que le contrôle total du renseignement par le ministère de l’Intérieur ( celui au protocole Elyséen fait « himself » ) est une nécessité et qu’une seule police est la solution démocratique dont tout le monde rêve.

Après la LOPPSI 2, je pensais le problème traité. Je pensais que les mesures ciblées étaient suffisantes, je croyais que les services spéciaux avaient enfin les moyens d’implanter les logiciels de surveillance dans les systèmes qui méritaient de l’être.

Même si mon ordi a baissé en vitesse dans ses connections, je l’attribue à mon FAI en me disant qu’il y a des gens qui ont du temps à perdre et je continue mon petit chemin.

C’est vrai que la presse a glissé sur les nouveaux moyens mis à disposition des ‘services’ pour lutter contre le terrorisme, mais c’est vrai également que quelqu’un qui a été enquêteur toute sa vie n’a rien trouvé à redire à  ce qui lui a semblé légitime.

En raison de son importance sur la vie privée de chacun, on se demande pourquoi le contenu du décret du 25 février dernier ne se trouvait pas dans la loi votée quasiment en même temps. Ils vont nous expliquer qu’il s’agit d’un problème de procédure, de respect du jardin du voisin en mettant en avant la séparation des pouvoirs législatif et exécutif. C’est faux. Ils ne pouvaient faire voter une telle mesure, voilà la vérité.

En fait, ce décret est présenté comme le complément au II de l’article 6 de la loi du 21 juin 2004.

Tiens donc. Immédiatement je vous reporte sur un autre texte paru au JO sur l’avis de la commission informatique et liberté qui n’était pas du tout d’accord avec la première tentative de « ficeler » définitivement les balades sur Internet.

http://www.legifrance.gouv.fr/

« « « L’Autorité, au regard de la liste des données prévue par l’article 1er, ne peut que s’interroger sur la finalité de certaines d’entre elles. En effet, certaines données n’ont que peu de rapport ou même aucun avec l’identification de la personne ayant créé un contenu. Il en est ainsi notamment des données suivantes :
― les caractéristiques de la ligne de l’abonné ;
― la nature de l’opération ;
― mot de passe ou données permettant de le vérifier ou de le modifier ;
― ou encore certaines données relatives au paiement. » » »

pour ne citer que ce passage.

Que contient au juste le décret qui pourrait nous amener à la réflexion ?

C’est simple. Tout ce que vous faites sur internet doit être mémorisé par vos fournisseurs d’accès sur une période d’un an.

On se pose la question sur la surveillance de la correspondance par internet. Je vous rassure cela fait longtemps qu’on est fliqué comme pas possible par les systèmes de surveillance à base de mots clé qu’ils ont mis en place.

Vous ouvrez un site, un compte sur facebook, un blog et voilà les fournisseurs d’accès obligés de tenir un cahier sur tout ce que vous faites sur ce site, mot de passe et pseudo y compris. Tout ce que quelqu’un  y écrit suit ce chemin bien sur. J’ai une pensée pour mes amis modérateurs du  forum Gendarmes et Citoyens, au passage. Ils comprendront.

Bon, il ne fait aucun doute qu’il y a longtemps que les services, que les informaticiens chevronnés ont mis au point des logiciels qui s’occupent de tout ça, mais dans unétat de droit il convenait de le blanchir pour pouvoir inclure les informations recueillies dans de belles procédures.

Ce n’est peut-être pas plus mal, tout bien pesé. On passe de la note blanche chère à tout agent du renseignement à la procédure pénale.

Non, non, erreur : les infos ne sont pas pour la justice, mais pour le ministre de l’Intérieur.

Les articles 5 et suivants de ce décret sont un tout petit peu limites.

Je ne fais qu’une remarque, les services de police ou de gendarmerie peuvent consulter les données recueillies par le F.A.I. ( fournisseur d’accès internet ) sans autre contrôle que celui de leur chef hiérarchique.

Exit  le contrôle légitime que l’on serait en droit d’attendre, d’autorités vraiment indépendantes.

Je vois immédiatement que n’importe quel avocat va s’emparer de la faiblesse de ce décret qui viole sans vergogne quelques droits fondamentaux à une vie privée.

Mais j’imagine aussi, un F.A.I. aller chercher un peu de publicité à bon compte en refusant de s’exécuter et allant se défendre jusqu’au conseil constitutionnel.

Pourquoi un juge n’intervient-il pas au stade de la consultation des données recueillies ?

Et bien sur, article 7, toutes les demandes sont enregistrées au ministère de l’intérieur qui constitue un fichier !!!!!!!!

Tel qu’il est envisagé ce fichier sera insuffisant et  « pour protéger » le citoyen, le justiciable, il sera nécessaire de le compléter dans un premier temps avec les identités des personnes surveillées et les données recueillies. On fera cela avec la petite circulaire qui va bien.

Voilà la réaction des élites, des gouvernants, des directeurs de pensée, à Wikileaks et aux rassemblement de personnes provoquées par facebook en Afrique du Nord et ailleurs.

Ils n’ont pas l’intention de se laisser faire.

Kadhafi nous explique bien qu’il s’affronte à des terroristes !!

Dans ces lois sur la lutte contre le terrorisme, tout tient dans la définition de ce mot «  TERRORISTE ».

Nous savons cela en France, ceux que nous appelons «  résistants », les Jean Moulin et autres héros aujourd’hui,  étaient des « terroristes ».

S’il était besoin d’autres arguments, voilà, Monsieur URVOAS, pourquoi la Gendarmerie doit regagner au plus tôt sa terre natale, ce terrain de quasi neutralité que constitue le ministère de la défense et rétablir sa chaîne hiérarchique. Elle doit prendre un peu de recul et de hauteur. Cela devient urgent.

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