Le chef veille aux intérêts de ses subordonnés : Affaire Bernard D.

Au moment où les parlementaires étudient la réforme du statut général des militaires et avancent le fait que « le chef doit veiller aux intérêts de ses subordonnés » pour interdire aux militaires le droit de se syndiquer ou de former un groupement professionnel, il nous est paru intéressant de révéler au grand public l’incroyable fin de carrière d’un soldat de la base après 5 ans d’engagement au service de son Pays.

En service au moment des faits au 1er Régiment de chasseurs parachutistes (1er RCP) à Pamiers, le parachutiste de 1ère classe Bernard D. dépose le 29 septembre 2004 une demande de rengagement de 6 mois au titre de la reconversion, son contrat d’engagement de 5 ans s’achevant le 2 novembre 2004.

Le 30 septembre 2004, son commandant d’unité émet un avis favorable.

Le 7 octobre 2004, le directeur des ressources humaines émet un avis défavorable et porte sur la demande la mention suivante : « sa manière de servir ne justifie pas son rengagement, le CDU doit, s’il le veut, défendre ce dossier, sinon NON ! ».

Le 29 octobre 2004, soit la veille du long week-end de la Toussaint, le chef de corps porte un avis défavorable sur la demande de l’intéressé qui découvre qu’il est mis à la porte de l’armée immédiatement, sans en avoir été averti et surtout sans aucune reconversion.

Selon le parachutiste de 1ère classe D., le chef de corps a motivé son rejet en invoquant :

une mauvaise notation établie par son ancien commandant d’unité, la présence d’un bulletin de punition dans son dossier.

La procédure est particulièrement expéditive !

Pourtant, rien n’autorise l’autorité militaire à s’affranchir de la procédure réglementaire fixée par l’instruction n°2000/DEF/PMAT/EG/B relative aux engagements au titre de l’armée de terre du 29 décembre 1999 modifiée et qui dispose en son article 52 :

« (…) le chef de corps qui souhaite ne pas renouveler un contrat d’engagement doit adresser un préavis de non-renouvellement notifié à l’intéressé six mois au moins avant l’échéance de son contrat au moyen de l’imprimé n°311-2/9.

Cette procédure concerne, non seulement les engagés qui ont déposé une demande de renouvellement, mais également ceux d’entre eux qui n’ont pas déposé de demande ou qui ont souhaité ne pas renouveler leur contrat.

lorsque les intéressés n’ont pas fait l’objet d’un préavis de non-renouvellement dans les délais mentionnés au premier alinéa du présent article, le chef de corps doit accorder d’office une autorisation de renouvellement d’engagement de six mois non renouvelable dans la limite des vingt-deux ans de services. Cette autorisation précise qu’elle tient lieu également de préavis de non-renouvellement de contrat.

Les décisions de non-renouvellement de contrat d’engagement sont notifiées par l’autorité compétente (chef de corps) aux intéressés au moyen de l’imprimé n° 311-2/10 dans les six mois précédant l’échéance du contrat. En outre, ces décisions font l’objet d’un message adressé à la DPMAT (bureaux de gestion) comportant, notamment, la date de radiation des cadres de l’engagé. »

Le parachutiste de 1ère classe Bernard D. n’a pas bénéficié des garanties précitées.

Et il n’y a aucune raison objective pour que sa parole soit mise en doute puisque ce n’est que le 16 novembre 2004 qu’une attestation de perte involontaire d’emploi lui a été délivrée prouvant bien la précipitation avec laquelle il a été mis à la porte.

Comme vous pouvez le constater, le chef a bien veillé aux intérêts de son subordonné !

Le Président de l’ADEFDROMIL a adressé le 16 novembre 2004 une lettre à Madame Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense, lui demandant de bien vouloir réintégrer dans ses droits le parachutiste de 1ère classe Bernard D.

Il n’a pas osé demander les sanctions prises…

Cette affaire est tout simplement affligeante !

Renaud Marie de Brassac

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