Question n° 72759 de M. Alain Vidalies (Socialiste, radical, citoyen et divers gauche – Landes)
Texte de la question
M. Alain Vidalies appelle l’attention de M. le ministre du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme de l’État sur la portée de la décision de la Cour de justice européenne (CJCE, 10 septembre 2009, aff. C-277-88), qui considère désormais qu’un salarié peut maintenir intégralement ses droits à des repos rétribués sans que ses problèmes de santé les diminuent.
Cet arrêt vient conforter le revirement de jurisprudence amorcé par la Cour de cassation qui, dans un arrêt récent (Cass. soc., 24 février 2009, aff. C-350-06 et C-520-06), reconnaît déjà la possibilité pour les salariés empêchés de prendre leurs congés payés du fait d’un arrêt maladie de les reporter après la reprise du travail, même si la période de prises des congés est expirée.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si la décision précitée, d’ores et déjà applicable aux salariés du secteur privé, peut également concerner les agents du service public et, dans la négative, quelles sont les évolutions législatives ou réglementaires qu’il entend susciter pour aller dans le sens d’un traitement équitable de l’ensemble des salariés.
Texte de la réponse
Le ministre du Travail, de la Solidarité et de la Fonction publique a pris connaissance avec intérêt de la question relative au droit au congé annuel payé. Dans sa décision du 10 septembre 2009, affaire C-277-88 Francisco Vicente Pereda contre Madrid Movilidad SA, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) juge que l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88 « doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à des dispositions nationales ou à des conventions collectives prévoyant qu’un travailleur qui est en congé de maladie durant la période de congé annuel fixée dans le calendrier des congés de l’entreprise où il est employé n’a pas le droit, après son rétablissement, de bénéficier de son congé annuel à une autre période que celle initialement fixée, le cas échéant en dehors de la période de référence correspondante ».
Le juge communautaire rappelle dans sa décision que la finalité du droit au congé annuel payé est de permettre au travailleur de se reposer et de disposer d’une période de détente et de loisirs. Il souligne que cette finalité diffère en cela de celle du droit au congé de maladie qui est accordé au travailleur afin qu’il puisse se rétablir d’une maladie. Il en résulte qu’un travailleur qui est en congé de maladie « durant une période de congé annuel fixée au préalable a le droit, à sa demande et afin qu’il puisse bénéficier effectivement de son congé annuel, de prendre celui-ci à une autre époque que celle coïncidant avec la période de congé maladie.
La fixation de cette nouvelle période de congé annuel, correspondant à la durée du chevauchement entre la période de congé annuel initialement fixée et le congé de maladie, est soumise aux règles et aux procédures de droit national applicables pour la fixation des congés des travailleurs, tenant compte des différents intérêts en présence, notamment des raisons impérieuses liées aux intérêts de l’entreprise ». « Dans l’hypothèse où de tels intérêts s’opposent à l’acceptation de la demande du travailleur concernant la nouvelle période de congé annuel, l’employeur est obligé d’accorder au travailleur une autre période de congé annuel proposée par ce dernier qui est compatible avec lesdits intérêts, sans exclure a priori que ladite période se situe en dehors de la période référence pour le congé annuel en question. »
L’impact de cette jurisprudence dans les trois fonctions publiques nécessite une analyse approfondie. Les services du ministère examinent les éventuelles conséquences juridiques à tirer de cet arrêt.
Source : JO de l’AN du 06/07/2010, page 7689