L’armée au tribunal ? (Par Romain Rosso)

Le père d’un soldat tué dans l’embuscade d’Uzbin, en Afghanistan, saisit la justice. Pour Joël Le Pahun, des « fautes » ont entaché la préparation de l’opération.

Le père d’un soldat tué dans l’embuscade d’Uzbin, en Afghanistan, saisit la justice. Pour Joël Le Pahun, des « fautes » ont entaché la préparation de l’opération.

Qu’on arrête de nous seriner qu’un soldat peut mourir ! » Joël Le Pahun ne peut plus l’entendre. Son fils, Julien, est mort au combat, à l’âge de 19 ans, le 18 août 2008, tué par des taliban dans la vallée d’Uzbin, en Afghanistan. Neuf autres Français sont tombés dans cette embuscade. Aujourd’hui, ce père de 48 ans se bat pour que l’armée reconnaisse des « fautes » dans la préparation de l’opération. Avec six autres familles, il doit de nouveau saisir la justice, pour mise en danger de la vie d’autrui.

Uzbin, vallée maudite. Quand Julien, grenadier voltigeur au 8e régiment parachutiste d’infanterie de marine, s’écroule sous les balles, Joël est anéanti. Il quitte son travail et s’investit quelques mois dans une association d’aide aux soldats. On le croise dans les hôpitaux, au chevet des militaires blessés. « J’y aurais consacré ma vie », confie-t-il. Depuis six mois, il a repris une activité professionnelle.

Comme avec toutes les familles endeuillées, l’armée garde le lien. Hervé Morin, le ministre de la Défense, lui donne un numéro de téléphone sur lequel il peut le joindre à tout moment. Le Pahun participe aux deux voyages en Afghanistan que l’état-major organise pour les proches. Il est invité aux cérémonies du régiment, à Castres. « On me caressait dans le sens du poil, tranche-t-il aujourd’hui. Un jour, j’ai retrouvé ma lucidité. Je me suis demandé pourquoi on était si gentil avec moi. Peut-être parce que certains se sentaient responsables ? »

Depuis, cet homme bouleversé est persuadé qu’on lui cache des choses. « Nous avons répondu à toutes ses questions. Le ministre lui a parlé à plusieurs reprises », répond-on dans l’entourage d’Hervé Morin. Joël Le Pahun s’obstine et met en doute la version de l’embuscade que livre l’armée française. Selon la procédure, un « retex » (retour d’expérience) a été rédigé. Mais le document est classifié. « C’est parce que mon client n’a pas pu l’obtenir qu’il a déposé plainte. Nous demanderons qu’il soit versé au dossier », souligne son avocat, Me Gilbert Collard. Joël Le Pahun insiste : « Je n’en veux pas à l’armée. J’exige la vérité et que les responsables soient sanctionnés. » Il dénonce une accumulation d’erreurs et ré-clame la tête de trois officiers. En vain : le ministère de la Défense conteste toute idée de faute, concédant que « l’appréciation sur le terrain n’a pas été bonne ». D’après l’état-major, aucune règle n’a été enfreinte. L’incertitude est le propre de la guerre.

Le 3 février, le procureur près le tribunal aux armées de Paris (TAP) classe sans suite les premières plaintes, déposées en novembre 2009. « La mort d’un militaire provoquée par l’adversaire ne pourra jamais s’analyser en une prise de risque délibérée contraire à une obligation légale […] ou comme la conséquence directe et immédiate d’une faute de négligence », argumente-t-il. De nouvelles…

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Source: L’Express.fr

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