Maintien en conditions opérationnelles. Rapport de la Cour des comptes. Propositions

Texte de la question

Dans une question écrite n° 68595 du 11 novembre 2014, M. Philippe Meunier appelle l’attention de M. le ministre de la défense sur la dégradation capacitaire de notre outil de défense. C’est en effet ce que révèle un rapport de la Cour des comptes sur le maintien en condition opérationnelle des matériels. Près de la moitié des armes en service dans les trois armées sont indisponibles, surtout dans les domaines aérien et naval. Le plus inquiétant est que cette tendance concerne autant les matériels récents qu’anciens. Les chiffres sont sans appel : 38 % seulement de disponibilité pour les armes de la marine, 41 % pour l’armée de l’air, 41 % pour l’armée de terre : « Le taux de disponibilité des avions de transport C130 n’est que de 39 % au premier semestre 2013, celui du Super Étendard n’atteint que 31 % en 2012, celui de l’hélicoptère Tigre est de seulement 22 % en 2013 ». Ce n’est guère mieux pour les bateaux : 46 % de disponibilité pour le porte-avions, 49 % pour les bâtiments amphibies, 60 % pour les sous-marins nucléaires d’attaque et les frégates. Aussi, il lui demande ce qu’il pense de la situation.

Texte de la réponse

Comme le précise la Cour des comptes dans son rapport sur le maintien en condition opérationnelle (MCO) des matériels militaires, l’évolution du contexte stratégique et la contrainte financière ont conduit les armées à évoluer vers une politique visant à assurer une disponibilité suffisante des matériels au bon endroit et au bon moment.

Ainsi, dans le domaine terrestre, l’objectif est de garantir en permanence un taux de disponibilité technique opérationnelle (DTO)[1] des matériels supérieur à 90 % en opérations extérieures (OPEX), et d’adapter le taux de disponibilité en métropole aux besoins de la préparation opérationnelle.

Dans le domaine naval, la programmation des arrêts techniques des bâtiments est établie de manière à pouvoir assurer en permanence la mission de dissuasion nucléaire et de disposer de suffisamment d’unités pour faire face aux missions récurrentes.

Dans le domaine aéronautique, la priorité est également donnée à la disponibilité en OPEX et à la permanence de la mission de dissuasion. Si un taux de DTO proche de 50 à 60 % est confirmé pour un certain nombre d’équipements, la situation est cependant contrastée géographiquement et entre les milieux d’emploi.

S’agissant des matériels du milieu aéronautique, leur disponibilité est affectée par plusieurs paramètres :

– le poids croissant des dépenses d’entretien programmé du matériel du fait du vieillissement des parcs, de l’arrivée de matériels de nouvelle génération présentant des coûts d’entretien plus élevés, et de la hausse du coût des facteurs de production plus rapide que l’inflation, dans une période de forte contrainte financière ;

– l’engagement important et dans la durée des matériels en OPEX, dans des conditions d’emploi particulièrement difficiles, engendrant une surconsommation de leur potentiel technique qui dégrade d’autant la disponibilité des matériels, avec, pour certains, une saturation des centres de maintenance liés notamment aux effets des mesures de déflation des effectifs ;

– la conduite des chantiers industriels de modification d’aéronefs, pour leur mise en conformité avec les normes de l’organisation de l’aviation civile internationale. Le transport tactique est confronté à l’activité importante en OPEX des flottes d’aéronefs C130 et C160. A cette contrainte s’ajoute la phase de retrait progressif du service du C160 et le rythme des livraisons des A400M qui, réactualisé par la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019, se fera de manière plus lente que celle prévue dans la précédente programmation.

Concernant la DTO des aéronefs de la marine nationale, celle-ci tend à l’amélioration compte tenu des effets attendus des plans d’actions mis en oeuvre afin d’améliorer la situation et d’assurer la pérennité, notamment, des hélicoptères Lynx, Caïman et Alouette III et des avions de patrouille maritime ATL2.

Enfin, la disponibilité des hélicoptères de l’armée de terre demeure insuffisante, malgré les efforts de MCO réalisés en faveur des hélicoptères de manoeuvre et d’attaque, particulièrement sollicités en OPEX. Des plans d’action spécifiques sont également mis en oeuvre pour chacune des flottes.

S’agissant des matériels du milieu naval, il est observé une augmentation des indisponibilités des bâtiments les plus anciens de la flotte de surface pour cause d’avarie et un décalage dans le temps des livraisons des programmes neufs (bâtiments multi-missions, de soutien et d’assistance hauturier, de surveillance et d’intervention maritimes, flotte logistique). La disponibilité technique du porte-avions Charles de Gaulle est, pour sa part, conforme à son plan de maintenance.Les mesures prises dans le cadre de la LPM 2014-2019 et des travaux d’actualisation de la programmation devraient augmenter la disponibilité des bâtiments par une optimisation de la fréquence des arrêts techniques.

En l’état, les efforts sont portés sur la réduction du taux d’indisponibilité pour avarie.

Concernant les sous-marins nucléaires d’attaque (SNA), leur disponibilité technique a suivi une tendance à la hausse entre 2000 (43 %) et 2012 (60 %), mais essuyé sur les cinq dernières années de fortes variations du taux d’indisponibilité accidentelle qui a oscillé entre 6 et 12 %. Ces indisponibilités, liées en partie à l’âge moyen de la flotte, trouvent principalement leur origine dans des difficultés techniques.

Dans le cadre du renouvellement à venir du marché de MCO des SNA, le service de soutien de flotte a engagé un dialogue plus étroit et approfondi avec la maîtrise d’oeuvre DCNS afin d’améliorer la performance de l’entretien des SNA, en tenant compte des exigences techniques et réglementaires ainsi que des ressources allouées.

Enfin, et de manière plus générale, la gestion du MCO du matériel militaire a bénéficié en 2014 d’une profonde réorganisation de son architecture de gouvernance puisque la responsabilité d’un milieu (terrestre, aérien ou naval) est désormais déléguée au chef d’état-major d’armée concerné, ce qui favorisera un meilleur pilotage de la performance du MCO.

Source: JOAN du 03/03/2015 page : 1505

[1] Le taux de disponibilité technique opérationnelle correspond au ratio des matériels disponibles techniquement par rapport à l’ensemble des matériels nécessaires à la mise en oeuvre de l’hypothèse la plus exigeante du contrat opérationnel. Ainsi, conformément au Livre blanc sur la défense et la sécurité intérieure de 2013, les armées doivent notamment être capables d’engager dans une opération majeure jusqu’à 45 avions de chasse de l’armée de l’air et de l’aéronavale.

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