Faut-il être attentif vis-à-vis de l’administration militaire ?

Suite à des démarches infructueuses auprès du centre territorial d’administration et de comptabilité (CTAC), de la commission des recours des militaires (CRM), puis du Conseil d’Etat, un officier supérieur souhaite vous faire part des difficultés administratives rencontrées lorsqu’il était encore en service il y a peu de temps, afin que cela puisse inciter certains cadres, comme il l’a été, à se montrer très attentifs vis-à-vis d’une administration militaire à laquelle nous accordons souvent toute notre confiance, et qui s’avère pourtant peu compréhensive.

Ces démarches entreprises courant 2005 concernaient la prime de qualification du diplôme d’état-major (DEM) qui ne lui avait jamais été versée depuis le 1er janvier 1996, date de l’obtention officielle de son DEM.

                                                                                   La rédaction de l’Adefdromil

Depuis le 1er janvier 1996, je suis titulaire du diplôme d’état-major. Celui-ci ouvre droit à une prime de qualification dont j’ai eu la faiblesse de croire qu’elle me serait versée automatiquement par le centre territorial d’administration et de comptabilité de Lille.

En mission en République centrafricaine de 1995 à 1997 puis muté au 17e régiment du génie parachutiste à mon retour en métropole, j’avoue ne pas avoir  prêté attention à ma fiche de solde.

Ce n’est qu’en mai 2005, qu’un camarade de promotion, « jetant un œil » sur celle-ci pour me calculer mes droits à la retraite, me fait part de son étonnement de ne pas voir apparaître le versement de la prime du DEM.

Après m’être informé auprès du trésorier du 1er  régiment de train parachutiste, corps support de l’état-major de la 11e   brigade parachutiste, au sein duquel je servais comme sous-chef d’état-major, cette carence de paiement m’est confirmée et les démarches de régularisation auprès du CTAC de Bordeaux sont immédiatement entreprises.

Une régularisation partielle est opérée et se traduit par  un versement de 5 777,27 euros sur mon compte bancaire lors du paiement de ma solde du mois de juillet 2005. Cette régularisation ne prend toutefois en considération que les quatre dernières années calendaires, à savoir la période du 1er  janvier 2001 à juillet 2005… Les mois soldés au taux « outremer » ne sont pas pris en considération comme le précise la réglementation en vigueur… Réglementation sans doute discutable par ailleurs car on peut s’interroger sur le fait que la prime du DEM soit uniquement versée en métropole alors que la qualification sanctionnée par le DEM est un minimum exigé pour tenir les fonctions que j’ai été appelées à tenir hors de métropole…

Je précise aussi que début 2004, j’ai dû être rapatrié sanitaire au le Val de Grâce pour y subir une intervention chirurgicale qui m’a éloigné du 13 janvier au 28 février 2004 de la république démocratique du Congo où je servais. Ces quelques semaines m’ont été soldées au taux métropole comme le prévoyait la réglementation si bien qu’elles auraient dû être également prises en considération dans ce rappel, ce qui ne fut pas le cas immédiatement…

J’ai donc adressé une requête au commandant du CTAC de Bordeaux tendant à récupérer le reliquat de ce que le CTAC aurait dû me verser depuis le 1er  janvier 1996.

Le commandant de cet organisme reconnaît, après étude de ses services, que je dois bénéficier d’une régularisation pour cette période passée au Val-de-Grâce et me signifie qu’elle interviendra sur le bulletin de solde du mois de septembre 2005 ; il me signifie également qu’aucune régularisation ne peut être effectuée au titre de la période allant du 1er  janvier 1996 au 1er janvier 2001, conformément à la loi 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics. Il me précise qu’un recours auprès de la commission des recours des militaires demeure possible.

Certes, nul n’est censé ignorer la loi, et chacun doit se tenir au courant des textes qui parfois sont bien antérieurs aux affaires en cours… Cependant ma situation de célibataire, à l’époque, me destinait tout naturellement à être plus préoccupé par les affaires opérationnelles que par les affaires de la solde.

Cela peut expliquer le fait que je n’ai jamais cherché à vérifier et à comparer ma fiche de solde avec celles de mes pairs, faisant toute confiance, à tort, à l’administration militaire.

Je tiens à signaler qu’entre 1996 et 2005, j’ai été muté à plusieurs reprises et aucun des responsables administratifs des services chargés de mon dossier – et donc de la vérification de mes fiches de solde –  ne m’ont fait part d’une quelconque erreur ; est-ce bien admissible ?

Pourtant, c’est cette même administration qui n’a pas manqué de me signaler, alors que j’étais affecté au 17e RGP à Montauban, un trop perçu (calculé sur le taux applicable au Gabon paraît-il) au titre de mon séjour en République centrafricaine. La régularisation est intervenue sans tarder et de façon quelque peu cavalière puisqu’on me demanda à l’époque de rembourser en deux mois la totalité de l’important trop perçu du seul fait de ma situation de célibataire …Ce qui fut fait.

Certes la loi 68-1250 du 31 décembre 1968 précise qu’aucune régularisation ne peut être effectuée pour les années antérieures au 1er  janvier 2001, mais compte tenu de la succession d’erreurs commises par le CTAC, il me semblait légitime de pouvoir espérer une régularisation totale, autrement dit à compter du 1er  janvier 1996 … D’autant que rien, à ma connaissance, ne définit que cette loi permet à l’Etat de s’affranchir de ses devoirs avant 2001.

Pouvait-on appliquer à mon détriment une prescription pour des faits ou des mesures pour lesquels je n’avais pas été informé ?

Je précise également qu’entre le 1er  janvier 1996 et le 3 août 2005, date de ma réclamation, j’ai passé près de cinq années hors de métropole. Ma réclamation ne portait donc que sur les quatre années passées au 17e RGP (1997-2001)…J’estime que l’administration militaire aurait pu faire un geste, d’autant que sur les quatre années pour lesquelles elle a accepté d’effectuer le remboursement, trois ont été passées au Congo, et donc non concernées a priori par les mesures de remboursement…

Est-elle si avare et se soucie-t-elle si peu de ses cadres ?

Mes démarches auprès de la commission des recours des militaires sont demeurées vaines celle-ci se retranchant derrière la prescription quadriennale.

J’ai alors fait intervenir un avocat toulousain sur les conseils de l’officier juriste du 1er RTP, l’Association générale de prévoyance militaire (AGPM) n’ayant pas souhaité affronter l’administration militaire dans l’esprit de ma protection juridique. Mon affaire a donc été portée devant le Conseil d’Etat lors de la séance du 7 mai 2008, lequel m’a débouté également au motif de la prescription quadriennale.

Voilà en quelques lignes le déroulement chronologique de cette affaire qui m’a coûté, outre les frais d’avocat, les quelques milliers d’euros qui ne représentaient finalement qu’un dû et qui auraient vraisemblablement pu m’être attribués avec un peu de bonne volonté de la part du CTAC qui n’a sans doute pas souhaité reconnaître ses fautes…

Ma situation familiale ayant évolué en août 2004, mois au cours duquel je me suis marié, une régularisation de ces primes aurait été plutôt la bienvenue dans cette nouvelle vie…

Puisse ce cas apporter à certains cadres, plus soucieux de s’inquiéter de leur métier que de leur fiche de solde, l’éclairage nécessaire à davantage de prudence vis-à-vis d’une administration qui malheureusement ne les soutient pas !

                                                                                                                            Maurice NICOLAS

 Lire également :

 – Extrait des conclusions presentees par l’avocat devant le Conseil d’Etat

Arrêt du Conseil d’Etat n° 291968 du 4 juin 2008 

Loi 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics.

Décret n° 97-900 du 1er octobre 1997 fixant les modalités de calcul de la rémunération des militaires affectés à l’étranger.

Cette publication a un commentaire

  1. Domisoldo Diez

    Il faut bien avoir présent à l’esprit qu’à ce jour, fin 2009, toutes les indemnités (sauf la nouvelle bonification indiciaire, NBI) sont rentrées en manuel dans les très obsolètes calculateurs de la solde.

    D’où, sur ce cas concret, un certain nombre de questions, dans l’ordre :
    – au sein de l’unité d’appartenance, le BRH de cet officier a-t-il donné l’info au trésorier (attribution du diplôme d’état-major, DEM à compter du xxx publiée au BO) ?
    – le trésorier a-t-il saisi le centre payeur de la solde ?
    – le centre payeur a-t-il appliqué l’ouverture de la prime de qualification ?
    – cet officier titulaire du DEM n’a-t-il réellement pas vu, sur une durée assez longue, une différence en sa défaveur de 16% sur sa solde, soit entre 400 et 500 euros bruts en moins par mois ?

    Et malheureusement pour lui deux applications de la réglementation, niveau lois et décrets :
    – pendant la durée d’une affectation à l’étranger, le droit à la prime de qualification est fermé ;
    – le centre payeur militaire est dans l’obligation de ne pas régulariser en amont de la déchéance quadriennale (quatre ans plus l’année en cours) ; il existe bien quelques possibilités de dérogations sous le contrôle du comptable public (TPG, Bercy), mais pas dans ce cas (plafonds financiers).

    En conclusion :
    – savoir lire soi même : autrefois, les bulletins de solde étaient vérifiés par le trésorier de l’unité ; depuis un fort mouvement d’humeur du corps des sous-officiers/officiers mariniers, ils parviennent désormais cachetés aux intéressés ;
    – espérer, jusqu’à un certain point, en l’informatisation totale de la chaîne RH-Solde, actuellement en cours (Agorha, Concerto, Harmonie, Rhapsodie, etc.), d’où l’importance de renseigner très soigneusement les questionnaires qui circulent actuellement dans les armées et services, butoir au 5 décembre 2009.
    Domisoldo Diez.

Les commentaires sont fermés.

À lire également