Présidence française de l’Union Européenne. Perspectives.

M. Marc Dolez demande à M. le ministre de la défense de lui indiquer concrètement ce qu’il attend, dans son domaine de compétence, de la présidence française de l’Union Européenne commencée le 1er juillet 2008.

Réponse du Ministre de la défense

Le ministre de la défense a réuni à deux reprises, à Deauville, les 1er et 2 octobre 2008, puis à Bruxelles, le 10 novembre 2008, l’ensemble de ses homologues européens pendant la présidence française de l’Union européenne (UE). En plus des accords entre les vingt-sept États membres de l’UE sur plusieurs initiatives, six déclarations ont été signées sur des projets concrets et opérationnels pour renforcer les capacités militaires. Pour améliorer la projection des forces en opérations, les accords entre États membres portent sur les points suivants : la modernisation des hélicoptères et de l’entraînement de leurs équipages. L’Agence européenne de défense (AED), à qui la présidence française de l’UE voulait donner un vrai programme, prépare notamment un programme d’entraînement tactique qui commencera en 2009. La France s’est clairement engagée en alimentant un fonds (Trust Fund) à hauteur de 5 millions d’euros et en proposant des stages d’entraînement, au vol en montagne sous jumelle de vision nocturne par exemple ou en mettant à disposition ses simulateurs ; l’AED préparera aussi un projet pour le futur hélicoptère de transport. La France et l’Allemagne y participeront ; la mise en place d’une flotte européenne de transport aérien. Un accord a été signé par douze États membres : la France, la Belgique, la Roumanie, l’Allemagne, la République tchèque, la Grèce, l’Espagne, l’Italie, le Luxembourg, la Slovaquie, le Portugal et les Pays-Bas. La Pologne, la Finlande, la Suède et la Hongrie rejoindront rapidement l’initiative ; la création d’une unité multinationale d’A400M avec nos partenaires allemand, belge et luxembourgeois afin d’augmenter significativement les capacités de transport aérien en Europe ; une coopération aéronavale européenne pour donner à l’Europe, dans le domaine stratégique de la projection de puissance, les moyens de rassembler des bâtiments d’escorte et de soutien européen autour d’un porte-avions. Un accord a été signé par la France, la Belgique, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie, l’Espagne, les Pays-Bas, le Portugal et la Grèce ; une capacité de projection d’une base aérienne, pour accélérer le déploiement rapide des forces sur les théâtres d’opérations. Un premier exercice européen réel s’est tenu en France en décembre 2008. Pour renforcer l’information et le renseignement spatial européen, les accords entre États membres portent sur les points suivants : le lancement du programme MUSIS de satellite d’observation militaire tout temps, qui remplacera les satellites actuellement utilisés (Hélios, SAR-Lupe, Cosmo SkyMed). La France a signé le lancement de ce programme majeur avec l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne et la Grèce. L’Italie rejoindra ce programme d’ici 2009 et d’autres États membres pourraient décider très prochainement d’y participer, comme la Pologne qui a annoncé officiellement son intention d’en faire partie à brève échéance ; la mise à disposition d’imagerie des satellites Cosmo SkyMed, SAR-Lupe et Hélios 2 au profit du centre satellitaire de l’UE. La France a signé ces arrangements avec l’Espagne, l’Allemagne, l’Italie, la Grèce et la Belgique. Pour accroître la protection des forces et leur efficacité en opérations, les accords entre États membres portent sur les points suivants : le lancement à l’AED d’un nouveau programme de déminage maritime pour remplacer à l’horizon de 2015 nos capacités obsolètes. Ce projet est d’ores et déjà soutenu par l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas et la Finlande ; la conduite avec nos partenaires allemand, espagnol, portugais, finlandais et polonais du projet de futur drone de surveillance (FUAS) ; la préparation de la mise en réseau des systèmes de surveillance maritime existants afin de disposer d’une situation partagée à l’échelle européenne. Dans le cadre de l’AED, quatorze États membres ont déjà harmonisé leur besoin en la matière. Une première expérimentation de ce réseau sera menée d’abord entre quelques États membres. Pour développer une culture européenne de défense et l’interopérabilité des forces européennes, un accord a été formalisé sur un système d’échanges de jeunes officiers (Erasmus militaire) entre les grandes écoles militaires européennes. Cette initiative permettra aux jeunes officiers européens d’effectuer une partie de leur formation dans un autre État membre. Grâce à ces échanges et à cette mobilité accrus, c’est une véritable conscience commune européenne de la défense qui émergera ; une meilleure coordination des moyens militaires pour les opérations d’évacuation des ressortissants. Il s’agit par exemple de l’identification d’un État pilote par zone de crise, d’une coordination des centres de crise nationaux, de la coordination des moyens de transport pour procéder aux évacuations ou d’une information volontaire entre Européens sur les plans nationaux d’évacuation. Il ne s’agit pas de créer de nouvelles structures mais de se montrer pragmatiques dans ce domaine où l’urgence est imposée. Outre ces projets capacitaires très concrets, le ministre de la défense avait également choisi de faire du renforcement durable des capacités militaires européennes et de la restructuration de l’industrie de défense européenne une priorité de la présidence française de l’UE. Les résultats obtenus en la matière sont les suivants : la France a fait en sorte de donner à l’AED, outre un carnet de commande, les moyens financiers et d’action dont elle a besoin : en faisant de l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement (OCCAr) le bras exécutif de l’AED, afin de garantir la continuité du développement des projets capacitaires de la phase de conception à celle de production ; l’AED aura plus de moyens pour travailler. Son budget pour l’année 2009 s’élève à 30 millions d’euros, soit une augmentation de 2,5 millions d’euros par rapport à 2008, malgré un contexte international défavorable ; en soutenant son plan de développement des capacités, qui lui permettra de jouer un rôle déterminant dans le développement des capacités européennes critiques. À cet égard, la France a récemment signé le lancement d’un programme sur les technologies du futur entre dix États membres. Il ne peut y avoir d’Europe de la défense sans une base industrielle et technologique de défense européenne, solide et compétitive. C’est aux entreprises qu’en revient l’initiative, mais c’est aux États de faciliter la constitution de grands groupes européens de taille mondiale, qui puissent s’appuyer sur un réseau de PME réactives et innovantes. Pour cela, le ministre de la défense a convaincu ses homologues de s’engager sur trois mesures concrètes : un effort accru en matière de recherche et technologie (R&T) de défense, coordonné avec la Commission, afin de préparer au niveau européen les réponses technologiques aux besoins opérationnels à moyen et long termes. Le ministre de la défense rappelle à cet égard que les États européens dépensent six fois moins que les États-Unis ; la mise en place d’un véritable espace européen d’échange d’équipement de défense, au travers du paquet défense (adoption fin décembre des directives communautaires sur les marchés publics de défense et les transferts intracommunautaires) ; le renforcement des chaînes d’approvisionnement notamment par des actions en faveur des PME (meilleur accès à la commande publique par exemple). Plusieurs initiatives ont aussi été prises dans le domaine des opérations. Sur une proposition de l’Espagne et de la France, les États membres ont pris la décision de lancer l’opération navale européenne Atalante pour lutter contre la piraterie au large de la Somalie, dans le cadre des résolutions 1814, 1816 et 1838 de l’Organisation des Nations unies (ONU). Atalante a trois grandes missions : la protection des convois du Programme alimentaire mondial, la protection du trafic maritime et la surveillance des zones les plus dangereuses. Le Royaume-Uni a pris le commandement de cette première op
ération navale de l’UE, lancée en trois mois. L’Allemagne, les Pays-Bas, l’Espagne, le Royaume-Uni, la Grèce et la France fourniront des navires de guerre. Des contributions d’autres États membres sont attendues. Le quartier général d’opération se trouvera au Royaume-Uni (Northwood). Le quartier général de force, dont le commandement sera tournant, sera embarqué sur un navire. Tout le monde reconnaît que les tâches militaires fixées à l’opération Althea en Bosnie sont remplies. C’est pour cela qu’a commencé la planification d’une nouvelle mission qui puisse succéder à l’actuelle opération ALthea. Cette mission pourrait être une mission de conseil et d’entraînement au profit des autorités bosniaques. Sur ces bases, une décision devrait être prise dès mars 2009. La France est consciente des enjeux politiques et de la nécessité de maintenir une présence visible de l’UE. L’opération Eufor au Tchad et en République centrafricaine a agi au profit des populations civiles affectées par la crise du Darfour, notamment pour le retour récemment observé de plusieurs milliers de déplacés. Elle a permis aussi de sécuriser l’action des organisations humanitaires. Cette mission européenne doit être relevée en mars 2009 par une mission de l’ONU. Pour ne pas entamer son succès, il est essentiel d’éviter tout vide sécuritaire dans la région du Tchad et de la République centrafricaine. 

Source : Assemblée Nationale

Question N°28821 de M. Dolez Marc (Gauche démocrate et républicaine – Nord) publiée au JO le :  29/07/2008 page : 6465  Réponse publiée au JO le :  27/01/2009  page :  736 

 

 

 

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