Oise Hebdo : Conflit social dans l’armée

OISE HEBDO du 12 décembre 2001 :

Conflit social. Fondateur de l’association de défense des droits des militaires, le capitaine Michel Bavoil a piublié en novembre dernier un ouvrage intitulé « Pour que l’armée respecte enfin la loi ». Aujourd’hui il annonce que le mouvement de contestation des gendarmes va gagner toute l’armée.

Selon Michel Bavoil, la contestation des gendarmes va s’étendre à toute l’armée

Après avoir manifesté leur mécontentement publiquement, après avoir rencontré le ministre de la défense Alain Richard, les gendarmes ont vu une partie de leurs revendications satisfaites : ils ont notamment obtenu une prime de mille francs, du matériel supplémentaire et la création de 6000 postes supplémentaires.

Mais le gouvernement n’en a peut être pas fini avec la contestation des militaires car celle-ci pourrait bien gagner tous les corps d’armée. C’est en tout cas ce qu’affirme le capitaine Michel Bavoil. Retraité des Troupes de Marine, auteur d’un ouvrage intitulé « Pour que l’armée respecte enfin la loi », Michel Bavoil a fondé l’association de défense des droits des militaires. Et, à ce titre, il reçoit de nombreux messages qui traduisent le désarroi ou la colère du personnel.

Michel Bavoil estime tout d’abord qu’il est choquant de voir des gendarmes obligés de descendre dans la rue pour obtenir satisfaction. Mais il constate également que le gouvernement a cédé rapidement, et « de façon spectaculaire », sans doute pour éviter une propagation du mouvement.

Cependant la manoeuvre va échouer car « le malaise est général », annonce le capitaine. Déjà des militaires d’active commencent à exprimer leur « ras-le-bol » dans les médias, tout en conservant l’anonymat. Selon Michel Bavoil beaucoup croyaient bénéficier des mêmes avantages que les gendarmes car pour eux, « l’armée est une et indivisible ». En fait, ils n’auront rien. Certains menacent de lancer une grève du zèle, ou « de se faire porter pâle », prévient Michel Bavoil.

Etat de délabrement

Celui-ci donne de nombreux exemples. Il dit que les militaires français en mission à l’étranger se sentent également concernés. L’un d’eux, basé en Bosnie, écrit que la situation est plus que « pitoyable » et il dénonce « un état de délabrement tant matériel qu’humain ».Les médecins militaires, eux, montrent leur mécontentement en démissionnant de leur poste. Michel Bavoil cite encore un adjudant qui écrit « Sous le couvercle àa bout très fort ». Les officiers eux-mêmes évoquent le problème : « Les troupes françaises n’ont vraiment pas le moral », note un lieutenant.

Michel Bavoil précise que les militaires réclament avant tout plus de considération, « ils souhaitent que les officiers soient des officiers et pas des carriéristes ». Ils veulent aussi des effectifs supplémentaires. Car les engagés effectuent désormais des tâches dévolues autrefois aux appelés : ils doivent parfois balayer la cour.

Et ce n’est pas fini : « Si jamais on leur demande de remplacer les convoyeurs de fonds (qui menacent de faire grève, Ndlr), ils vont exploser », annonce le capitaine Bavoil.

Les militaires protestent contre une diminution de 23% du montant des soldes versées lors des missions extérieures.

Michel Bavoil évoque encore le matériel « vétuste », le manque de pièces détachées, les programmes non respectés. D’ailleurs il soupçonne le gouvernement de vouloir financer les mesures prises en faveur des gendarmes avec l’argent destiné au renouvellement du matériel.

Michel Bavoil le dit : « Maintenant, plus rien ne sera comme avant ». Il constate « l’échec total des instances de concertation » et préconise la mise en place d’un groupement professionnel, « apolitique, indépendant ». Certains politiques auraient adopté cette idée.

Si rien n’est fait, peut-être verra-t-on les militaires descendre à leur tour dans la rue pour revendiquer. Et ce serait une première.

Xavier TOGNI

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