Procédure de signalement d’alertes au ministère de la défense 2024

Arrêté du 23 mai 2024 relatif à la procédure interne de recueil et de traitement des signalements des alertes au ministère de la défense

Le ministre des armées,
Vu le code de la défense, notamment ses articles L. 4122-4 et L. 4122-10 ;
Vu le code général de la fonction publique, notamment ses articles L. 135-1 à L. 135-5 ;
Vu la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 modifiée relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, notamment ses articles 6 à 16 ;
Vu le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 relatif aux procédures de recueil et de traitement des signalements et à la désignation des autorités externes compétentes prévues par la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte, notamment son chapitre 1er ;
Vu l’arrêté du 23 mai 2024 portant désignation des référents alerte du ministère de la défense ;
Vu l’avis du comité social d’administration ministériel du ministère des armées en date du 5 octobre 2023,
Arrête :

  • Article 1

    Le présent arrêté a pour objet de définir la procédure interne de recueil et de traitement des signalements d’alerte émis au ministère de la défense dans le cadre du décret du 3 octobre 2022 susvisé.
    La procédure interne de recueil et de traitement des signalements des alertes est ouverte :
    1° Au personnel civil et militaire en fonction au ministère ;
    2° Aux collaborateurs extérieurs et occasionnels du ministère ;
    3° Aux cocontractants et sous-traitants du ministère ou, lorsqu’il s’agit de personnes morales, aux membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance de ces cocontractants et sous-traitants ainsi que les membres de leur personnel ;
    4° Aux personnes dont la relation de travail avec le ministère s’est terminée, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de cette relation ;
    5° Aux personnes qui se sont portées candidates à un emploi au sein du ministère, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de cette candidature.

    • Article 2

      Toute personne mentionnée à l’article 1er est considérée comme auteur d’un signalement dès lors que, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, elle signale des informations portant sur :

      – un crime ou un délit ;
      – une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France ou d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement ;
      – une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation de la loi, du règlement ou du droit de l’Union européenne ;
      – une menace ou un préjudice pour l’intérêt général.

      Lorsque les informations n’ont pas été obtenues dans le cadre des activités professionnelles mentionnées au I de l’article 8 de la loi du 9 décembre 2016 susvisée, le lanceur d’alerte doit en avoir eu personnellement connaissance.
      Ne peuvent donner lieu à une alerte les faits, informations et documents, quel que soit leur forme ou leur support, couverts par le secret de la défense nationale, le secret médical, le secret des délibérations judiciaires, le secret de l’enquête ou de l’instruction judiciaires ou le secret professionnel de l’avocat.

    • Article 3

      Le signalement d’une alerte est adressé au référent alerte compétent :
      1° Pour le personnel militaire mentionné à l’article 1er : auprès du référent alerte désigné par l’arrêté du 23 mai 2024 susvisé.
      Ce référent est également compétent à l’égard :

      – des candidats au recrutement dans un emploi militaire, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de cette candidature ;
      – des réservistes opérationnels, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de leur période d’activité ;
      – des anciens militaires radiés des cadres ou rayés des contrôles, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de leur période d’activité ;
      – des officiers généraux en deuxième section, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de leur période d’activité en première section, à l’occasion de vacations ou en qualité d’agents sous contrat au ministère ;

      2° Pour le personnel civil mentionné à l’article 1er : auprès des référents alerte désignés par l’arrêté du 23 mai 2024 susvisé.
      Ces référents sont également compétents à l’égard :

      – des candidats à un emploi civil, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de cette candidature ;
      – des fonctionnaires et des ouvriers d’Etat ayant fait valoir leur droit à la retraite ainsi que des agents contractuels dont le contrat a pris fin, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de leur période d’activité ;
      – des réservistes de la réserve citoyenne ;

      3° Pour les référents alerte désignés par l’arrêté du 23 mai 2024 susvisé, le référent alerte est le référent ministériel déontologue et alerte ;
      4° Pour les personnes mentionnées au 3° de l’article 1er, le référent alerte est le référent ministériel déontologue et alerte, qui oriente vers le référent alerte compétent pour traitement.

    • Article 4

      Le signalement doit comporter une description détaillée des faits, actes, menaces ou préjudices dénoncés permettant d’apprécier qu’ils relèvent des cas prévus à l’article 2 : date, heure, lieu, nature et circonstances dans lesquelles l’auteur a eu connaissance de l’évènement ou des faits, dommages éventuels, auteur des faits, victimes, témoins. L’auteur doit, dans la mesure du possible, communiquer tous les éléments en sa possession de nature à étayer son signalement.
      Sauf s’il souhaite rester anonyme, l’auteur du signalement indique par écrit les éléments permettant un échange avec le référent alerte, notamment ses coordonnées postales non professionnelles afin que le référent alerte soit en mesure de prendre en charge son alerte et d’assurer son suivi.

    • Article 5

      Le signalement est adressé par écrit sous double enveloppe :

      – sur la première enveloppe – dite enveloppe extérieure – figure le nom et l’adresse du référent alerte, avec la mention « personnel et confidentiel » ;
      – sur la deuxième enveloppe – dite enveloppe intérieure – figure lors du premier échange la mention « signalement d’une alerte » et sa date de transmission.

      Pour les autres échanges, figure seulement le numéro du dossier.
      Le signalement peut également être adressé par voie électronique. Dans ce cas, il doit, dans un délai de sept jours, être confirmé par un écrit selon les modalités fixées aux alinéas précédents.

      • Article 6

        Le référent alerte compétent accuse réception de l’alerte par tout moyen écrit dans un délai de sept jours ouvrés à compter de cette réception par écrit et informe l’auteur du signalement des garanties de confidentialité mentionnées à l’article 10 dont il bénéficie et des protections mentionnées à l’article 11 dont il peut bénéficier.
        Les signalements reçus par des personnes ou services non compétents sont transmis sans délai au référent alerte compétent mentionné à l’article 3, qui accuse réception de l’alerte dans les conditions précitées.

      • Article 7

        Le référent alerte compétent procède à l’examen de la recevabilité de l’alerte. A cet effet, il vérifie au regard des précisions apportées par l’auteur dans le cadre de l’alerte et des pièces produites à son appui :

        – que les informations en cause sont susceptibles de relever des cas cités à l’article 2 du présent arrêté ;
        – que l’auteur a eu connaissance des informations en cause soit personnellement, soit dans le cadre de ses activités professionnelles.

        Il peut solliciter de sa part des éléments complémentaires.
        Tous les moyens doivent être mis à la disposition du référent alerte compétent pour permettre cette vérification. A sa demande, les services du ministère lui apportent leur concours.
        L’examen de l’alerte est effectué en lien avec le référent alerte dont relève l’organisme dans lequel se sont produits l’évènement ou les faits objet de l’alerte.
        Lorsque l’évènement ou les faits, objet de l’alerte, ont eu lieu dans le cadre de l’emploi opérationnel des forces relevant du chef d’état-major des armées, tant sur le territoire national qu’à l’extérieur de celui-ci, l’examen de l’alerte est effectué en lien avec les référents alerte mentionnés à l’article 1er de l’arrêté du 23 mai 2024 susvisé et le référent alerte pour les militaires de la gendarmerie nationale.
        Le référent alerte communique par tout moyen écrit à l’auteur du signalement, dès que possible, des informations sur les mesures envisagées ou prises pour évaluer l’exactitude des allégations et, le cas échéant, remédier à l’objet du signalement ainsi que sur les motifs de ces dernières.

      • Article 8

        L’irrecevabilité du signalement avec ses motifs est portée par tout moyen écrit à la connaissance de son auteur. Elle conduit à la clôture du dossier de l’alerte. Dans le délai de deux mois à compter de cette clôture, tout élément du dossier de signalement permettant d’identifier l’auteur ou les personnes visées est archivé de manière sécurisée.
        Si un signalement est déclaré recevable, mais, après vérifications, ne nécessite pas la mise en œuvre de mesures, l’auteur du signalement et, le cas échéant, l’agent mis en cause si les informations avaient été portées à sa connaissance, sont informés par tout moyen écrit qu’aucune suite n’y sera donnée et de la clôture de l’alerte. Tout élément du dossier de signalement permettant d’identifier l’auteur ou les personnes visées est archivé de manière sécurisée dans le délai de deux mois à compter de la clôture.
        Si le signalement déclaré recevable nécessite la mise en œuvre de mesures, le référent alerte saisit l’autorité compétente afin qu’elle prenne les mesures ou engage les procédures nécessaires permettant de remédier à l’objet du signalement. Il informe par tout moyen écrit, dans un délai maximal de trois mois à compter de l’accusé de réception du signalement, l’auteur du signalement des suites qui seront données à son alerte. En cas de difficultés, le référent alerte peut solliciter l’aide du référent ministériel déontologue et alerte.

      • Article 9

        Les signalements anonymes font l’objet des vérifications mentionnées à l’article 7, excepté celles relatives à l’auteur du signalement.
        Le signalement ne peut être traité que si les faits sont établis et si l’auteur du signalement a fourni des éléments suffisamment détaillés.
        Le référent alerte compétent décide des suites à donner à l’issue de ces vérifications.

        • Article 10

          Le respect de l’intégrité et de la confidentialité des informations contenues dans un signalement s’impose à toutes les personnes chargées du recueil et du traitement des signalements.
          Ces informations portent notamment sur l’identité de l’auteur du signalement, des personnes visées par celui-ci et de tout tiers qui y est mentionné.
          Les informations détenues par les personnes mentionnées au premier alinéa sont limitées à ce qui est strictement nécessaire aux seuls besoins de vérification ou de traitement du signalement.
          Il ne peut être divulgué d’éléments de nature à identifier l’auteur du signalement, sauf à l’autorité judiciaire, qu’avec le consentement écrit de celui-ci.
          Les éléments de nature à identifier la personne mise en cause par un signalement ne peuvent être divulgués, sauf à l’autorité judiciaire, qu’une fois établi le caractère fondé de l’alerte.
          Les informations recueillies ne peuvent être communiquées à des tiers que si cela est nécessaire pour traiter le signalement et dans le respect des dispositions du I de l’article 9 de la loi du 9 décembre 2016 susvisée.

        • Article 11

          Les personnes mentionnées à l’article 1er bénéficient, si elles ont respecté la procédure interne de signalement objet du présent arrêté, des protections mentionnées :

          – au III de l’article L. 4122-4 du code de la défense, s’agissant du personnel militaire d’active et des réservistes opérationnels ;
          – à l’article L. 135-4 du code général de la fonction publique, s’agissant des fonctionnaires, des ouvriers d’Etat et des agents contractuels.

          Les autres personnes mentionnées à l’article 1er bénéficient des protections prévues au chapitre 2 de la loi du 9 décembre 2016 susvisée.
          Il en est de même des personnes mentionnées à l’article 6-1 de la même loi.

        • Article 12

          L’auteur d’un signalement qui relate ou témoigne de faits ou d’actes de mauvaise foi, avec l’intention de nuire ou avec la connaissance au moins partielle de l’inexactitude des faits rendus publics ou diffusés, s’expose aux sanctions prévues au premier alinéa de l’article 226-10 du code pénal.
          En cas de signalement abusif ou constitutif d’une infraction pénale, l’auteur du signalement ne peut pas prétendre à la protection mentionnée à l’article 11 du présent arrêté. Il engage sa responsabilité civile. S’il s’agit d’un militaire, d’un fonctionnaire, d’un ouvrier d’Etat ou d’un agent contractuel, l’auteur du signalement encourt en outre une sanction disciplinaire.
          L’auteur d’un signalement qui ne respecte pas les dispositions de l’article 7-1 de la loi du 9 décembre 2016 susvisée ne bénéficie pas de la protection précitée et s’expose à des sanctions pénales et disciplinaires.

          • Article 13

            Le référent ministériel déontologue et alerte s’assure que la procédure interne de recueil et de traitement des signalements d’alerte est diffusée par tout moyen, en particulier sur le site intranet du ministère, accompagnée des noms et coordonnées des référents alerte.
            Il veille à la cohérence du traitement des signalements et oriente en tant que de besoin les signalements vers le référent compétent.
            Chaque année, il recueille les observations des référents alerte afin de pouvoir formuler toute proposition d’amélioration du dispositif de signalement d’alerte.

          • Article 14

            Toute personne mentionnée à l’article 1er peut adresser un signalement externe, soit après avoir adressé un signalement interne, soit directement auprès notamment du contrôle général des armées et du collège des inspecteurs généraux des armées, dans le respect des conditions fixées par le chapitre II du décret du 3 octobre 2022 susvisé.
            Elle ne peut procéder à une divulgation publique que dans le respect des dispositions du III de l’article 8 de la loi du 9 décembre 2016 susvisée.

          • Article 15

            Toute personne mentionnée à l’article 1er a le droit de consulter un référent alerte, chargé de lui apporter tout conseil utile en matière de signalement.
            Les référents alerte peuvent saisir le référent ministériel déontologue et alerte de toute question concernant l’application du présent arrêté.

            • Article 17

              Les dispositions du présent arrêté sont applicables aux signalements émis à compter de sa date d’entrée en vigueur.
              Les signalements qui ont été émis avant cette même date sont recueillis et traités sur le fondement de l’arrêté mentionné à l’article 16 dans sa version en vigueur avant l’entrée en vigueur du présent arrêté.

            • Article 18

              Le présent arrêté sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait le 23 mai 2024.

Sébastien Lecornu

Source : JORF n°0124 du 30 mai 2024
Texte n° 26

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