Décret 2024-278: Sécurité et approvisionnements des forces armées – 28/03/2024

Décret n° 2024-278 du 28 mars 2024 relatif à la sécurité des approvisionnements des forces armées et des formations rattachées

Publics concernés : entreprises titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 2332-1 du code de la défense ; entreprises ayant conclu avec les services du ministère de la défense un marché de défense ou de sécurité mentionné à l’article L. 1113-1 du code de la commande publique, entreprises françaises titulaires d’un contrat passé avec une organisation internationale ou avec un Etat tiers et leurs sous-contractants.
Objet : fixer les conditions de mise en œuvre des mesures relatives à la sécurité des approvisionnements des forces armées et des formations rattachées instituées au chapitre IX du titre III du livre III de la première partie du code de la défense.
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le 1er avril 2024.
Notice : le décret a pour objet de fixer les conditions de mise en œuvre des mesures relatives à la sécurité des approvisionnements des forces armées et des formations rattachées instituées par l’article 49 de la loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense. A cette fin, il détermine les conditions dans lesquelles l’autorité administrative peut ordonner, d’une part, la constitution d’un stock minimal de matières, de composants, de pièces de rechange ou de produits semi-finis stratégiques par des entreprises titulaires d’une autorisation de fabrication et de commerce de matériels de guerre, d’armes, de munitions et de leurs éléments des catégories A et B et, d’autre part, la réalisation de certaines prestations ou obligations par priorité sur tout autre engagement contractuel par des entreprises ayant conclu avec elle un marché de défense et de sécurité, par celles ayant passé un contrat avec une organisation internationale ou avec un Etat tiers ou par leurs sous-contractants de tous niveaux.
Références : le décret est pris pour l’application de l’article 49 de la loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense. Les dispositions du code de la défense qu’il modifie peuvent être consultées, dans leur rédaction issue de cette modification, sur le site Légifrance ( https://www.legifrance.gouv.fr).

Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des armées,
Vu le code de la défense ;
Vu le code des relations entre le public et l’administration, notamment son article L. 231-4 ;
Vu le code de la sécurité intérieure, notamment son article R. 313-38 ;
Vu la loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense, notamment son article 49 ;
Le Conseil d’Etat (section de l’administration) entendu,
Décrète :

  • Article 1

    Le titre III du livre III de la première partie du code de la défense est complété par un chapitre IX ainsi rédigé :

    « Chapitre IX
    « Dispositions relatives à la sécurité des approvisionnements des forces armées et des formations rattachées

    « Section 1
    « Constitution de stocks minimaux de matières, de composants, de pièces de rechange ou de produits semi-finis stratégiques

    « Art. R. 1339-1. – L’autorité administrative mentionnée au I de l’article L. 1339-1 est le ministre de la défense.

    « Art. R. 1339-2. – Les conditions générales d’approvisionnement et de conservation mentionnées au 3° du I de l’article L. 1339-1 sont appréciées en fonction :
    « 1° Lorsque le stock mentionné au I du même article porte sur une matière, un composant ou un produit semi-fini :
    « a) Du volume des commandes en cours ou prévisibles auprès de l’entreprise concernée ;
    « b) Des sources d’approvisionnement effectivement disponibles ;
    « c) Le cas échéant, de la durée nécessaire à l’identification de telles sources ainsi qu’à la mise en œuvre opérationnelle d’un nouveau circuit d’approvisionnement ;
    « 2° Lorsque ce stock porte sur une pièce de rechange :
    « a) Du délai de production de cette pièce par l’entreprise concernée ;
    « b) Des sources d’approvisionnement effectivement disponibles ;
    « c) Des tensions constatées sur le marché des matériels susceptibles d’intégrer le même type de pièces.

    « Art. R. 1339-3. – Préalablement à la signature de l’arrêté prévu au I de l’article L. 1339-1, le ministre de la défense informe l’entreprise concernée du volume du stock envisagé, en indiquant le délai, qui ne peut être inférieur à deux semaines, imparti à celle-ci pour faire valoir ses éventuelles observations.
    « Cette information est communiquée à l’entreprise concernée par tout moyen permettant de conférer date certaine à sa réception.

    « Art. R. 1339-4. – Au plus tard un an après la notification de l’arrêté prévu au I de l’article L. 1339-1, puis chaque année dans les mêmes conditions, le ministre de la défense procède au réexamen de cet arrêté. Il en informe l’entreprise concernée et l’invite à lui présenter ses observations sur les conditions d’application de l’arrêté ainsi que, le cas échéant, les modifications qu’elle sollicite.

    « Art. R. 1339-5. – Tout changement dans les conditions d’exécution des conventions de mutualisation prévues au septième alinéa du I de l’article L. 1339-1 est porté sans délai à la connaissance du ministre de la défense.

    « Art. R. 1339-6. – Les demandes tendant à l’abrogation ou à la modification de l’arrêté prévu au premier alinéa du I de l’article L. 1339-1 ainsi que celles tendant à l’approbation des conventions de mutualisation et à l’autorisation de dérogation à l’obligation de réapprovisionnement continu mentionnées aux septième et huitième alinéas du même I sont adressées au ministre de la défense, qui en délivre récépissé. Elles précisent toutes les informations de nature à permettre d’en apprécier le bien-fondé.
    « Le ministre de la défense peut solliciter des entreprises concernées la communication de tout élément complémentaire qu’il juge nécessaire à l’instruction de ces demandes.
    « En application des dispositions du 4° de l’article L. 231-4 du code des relations entre le public et l’administration, le silence gardé sur ces demandes pendant deux mois vaut décision de rejet.

    « Art. R. 1339-7. – La mise en demeure mentionnée au II de l’article L. 1339-1 est adressée à l’entreprise concernée par le ministre de la défense. Elle précise, en fonction de la nature des mesures requises, le délai dans lequel celle-ci est tenue de s’y conformer.
    « L’amende mentionnée au II de l’article L. 1339-1 est prononcée par le ministre de la défense.
    « En cas de récidive constatée dans un délai de trois ans à compter du prononcé d’une amende en application des dispositions du II de l’article L. 1339-1 :
    « 1° Le ministre de la défense peut, lorsque l’entreprise est titulaire de l’autorisation mentionnée à l’article R. 2332-5 du présent code, retirer celle-ci selon les modalités définies aux septième et dernier alinéas de l’article R. 2332-15 du même code ;
    « 2° Le ministre de l’intérieur peut, lorsque l’entreprise est titulaire de l’autorisation mentionnée à l’article R. 313-28 du code de la sécurité intérieure, retirer celle-ci selon les modalités définies aux sixième à dernier alinéas du I de l’article R. 313-38 du même code. Au préalable, le ministre de la défense communique le dossier au ministre de l’intérieur.

    « Section 2
    « Priorisation de prestations ou d’obligations sur tout autre engagement contractuel

    « Art. R. 1339-8. – L’autorité administrative mentionnée à l’article L. 1339-2 est le ministre de la défense.
    « Pour l’application du I du même article, il peut ordonner à l’entreprise concernée :
    « 1° La réalisation des prestations faisant l’objet d’un marché de défense ou de sécurité par priorité sur tout engagement contractuel autre que ceux, en cours, liés à l’exportation ou au transfert du même matériel ;
    « 2° La réalisation des prestations faisant l’objet d’un contrat passé avec une organisation internationale ou avec un Etat tiers par priorité sur tout marché de défense ou de sécurité autre que ceux, en cours, ayant pour objet la même prestation.
    « Pour la mise en œuvre du dernier alinéa du même I, l’entreprise titulaire du marché ou du contrat en cause communique au ministre, à sa demande, la liste des sous-contractants concernés. Dans les mêmes conditions, ceux-ci communiquent au ministre la liste de leurs propres sous-contractants.

    « Art. R. 1339-9. – Préalablement à la signature de l’arrêté prévu au I de l’article L. 1339-2, le ministre de la défense informe l’entreprise concernée des prestations ou des obligations dont il envisage d’ordonner l’exécution prioritaire, en indiquant le délai, qui ne peut être inférieur à deux semaines, imparti à cette entreprise pour faire valoir ses éventuelles observations.
    « Cette information est communiquée à l’entreprise concernée par tout moyen permettant de conférer date certaine à sa réception.
    « Le cas échéant, l’entreprise informe le ministre de ses autres engagements contractuels portant sur l’exportation ou le transfert des matériels équivalents relevant du 2° ou du 3° de l’article L. 2331-2 ou des marchés de défense et de sécurité dont elle est bénéficiaire portant sur des prestations équivalentes.

    « Art. R. 1339-10. – Les demandes présentées par l’entreprise concernée tendant à l’abrogation ou à la modification de l’arrêté prévu au I de l’article L. 1339-2 sont adressées au ministre de la défense, qui en délivre récépissé. Elles précisent toutes les informations de nature à permettre d’apprécier leur bien-fondé.
    « Le ministre de la défense peut solliciter des entreprises concernées la communication de tout élément complémentaire qu’il juge nécessaire à l’instruction de ces demandes.
    « En application des dispositions du 4° de l’article L. 231-4 du code des relations entre le public et l’administration, le silence gardé sur ces demandes pendant deux mois vaut décision de rejet.

    « Art. R. 1339-11. – La demande d’indemnisation au titre du II de l’article L. 1339-2 est adressée au ministre de la défense, le cas échéant, par l’entreprise concernée, qui en évalue le montant.
    « Le ministre de la défense en accuse réception après avoir, le cas échéant, invité l’entreprise à lui communiquer tous documents ou tous éléments d’information complémentaires de nature à établir l’évaluation des préjudices subis.
    « Il notifie ses propositions de règlement à l’entreprise, en indiquant le délai, de quinze jours au moins et de trois mois au plus, qui lui est imparti pour les accepter ou les refuser.
    « En cas d’acceptation totale formulée dans le délai prescrit, le ministre de la défense mandate les indemnités correspondantes.
    « A défaut de réponse dans ce délai, ces indemnités sont réputées acceptées et sont mandatées.
    « En cas de refus partiel ou total formulé dans ce délai, le ministre de la défense procède à une nouvelle évaluation du montant des indemnités contestées, dans les conditions prévues au deuxième alinéa. Au regard des éléments apportés par l’entreprise, il en arrête définitivement le montant, qu’il notifie dans les conditions prévues au présent article.

    « Art. R. 1339-12. – En l’absence d’exécution prioritaire des prestations ou des obligations en cause ou, le cas échéant, de communication de la liste des sous-contractants concernés, la mise en demeure mentionnée au III de l’article L. 1339-2 précise le délai dans lequel l’entreprise concernée est tenue de s’y conformer, en fonction de la nature des mesures requises. »

  • Article 2

    Après le 5° de l’article R. 2332-15 du même code, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
    « 6° En cas de récidive constatée dans un délai de trois ans à compter du prononcé d’une amende infligée au titulaire en application des dispositions du II de l’article L. 1339-1. »

  • Article 5

    Les dispositions du présent décret et celles du I de l’article 49 de la loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense entrent en vigueur le 1er avril 2024.
    Le présent article est applicable dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

  • Article 6

    Le ministre de l’intérieur et des outre-mer et le ministre des armées sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait le 28 mars 2024.

Gabriel Attal
Par le Premier ministre :

Le ministre des armées,
Sébastien Lecornu

Le ministre de l’intérieur et des outre-mer,
Gérald Darmanin

Source : JORF n°0075 du 29 mars 2024
Texte n° 39

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