Pensions de réversion des ayants-droit de fonctionnaires

Question écrite n° 05410 de M. Éric Bocquet (Nord – CRCE) publiée dans le JO Sénat du 07/06/2018 – page 2770

M. Éric Bocquet attire l’attention de M. le ministre de l’action et des comptes publics sur la situation liée à la modification de l’article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite par la n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

Cet article L. 43 dispose qu’« à la date du décès du fonctionnaire, les conjoints survivants ou divorcés ayant droit à pension se partagent la part de la pension de réversion correspondant au rapport entre le nombre de conjoints survivants ou divorcés et le nombre total de lits représentés. Cette part est répartie entre les conjoints au prorata de la durée respective de chaque mariage. Un lit est représenté soit par le conjoint survivant ou divorcé, soit par les orphelins de fonctionnaires dont l’autre parent n’a pas ou plus droit à pension ».

Cela permet, il est vrai, une juste équité entre les ayants-droit.

Toutefois, dans cet article, il n’est pas précisé, contrairement à ce qui prévalait auparavant, que « si un lit cesse d’être représenté, sa part accroît celle du ou des autres lits ».

Ainsi, aujourd’hui, quand un ayant-droit ne peut plus prétendre à une part de la pension comme c’est le cas par exemple lorsqu’un enfant a plus de vingt et un ans, cette part est transférée au trésor public, et n’abonde donc plus la part des autres ayants-droit.

C’est là une véritable injustice, notamment pour les veuves, qui pour certaines d’entre elles vivent dans la plus grande précarité.

Elles doivent pouvoir se voir accroître leur part de la pension de réversion à juste équité des autres ayants-droit dès lors qu’un lit cesse d’être représenté.

C’est pourquoi il lui demande quelle mesure compte prendre le Gouvernement pour mettre fin à cette difficulté et réintégrer dans le cadre de la loi le fait que, pour le versement de la pension de réversion, dès lors qu’un lit cesse d’être représenté, sa part accroît celle des autres.

Réponse du Ministère de l’action et des comptes publics publiée dans le JO Sénat du 23/08/2018 – page 4272

Dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 162 de la loi n°  2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, l’article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR) disposait : « Lorsqu’il existe une pluralité d’ayants cause de lits différents, la pension définie à l’article L. 38 est divisée en parts égales entre les lits représentés par le conjoint survivant ou divorcé ayant droit à pension ou par un ou plusieurs orphelins âgés de moins de vingt et un ans. Les enfants naturels sont assimilés à des orphelins légitimes ; ceux nés de la même mère représentent un seul lit. S’il existe des enfants nés du conjoint survivant ou divorcé ayant droit à pension, chacun d’eux a droit à la pension de 10 p. 100 dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 40. En cas de pluralité d’orphelins âgés de moins de vingt et un ans d’un même lit non représenté par le conjoint survivant ou divorcé ayant droit à pension, il leur est fait application du deuxième alinéa de l’article L. 40. / Si un lit cesse d’être représenté, sa part accroît celle du ou des autres lits ». Aux termes de ces dispositions, lorsqu’il existait plusieurs ayants cause, la pension de réversion définie à l’article L. 38 du CPCMR était répartie selon le nombre de lits, c’est-à-dire les mariages, ou unions de fait, desquelles sont issus des enfants. La pension de réversion était alors divisée en parts égales entre les lits, nonobstant la composition de chaque lit. Lorsque plusieurs lits étaient représentés par des conjoints survivants ou divorcés, la part leur revenant était répartie au prorata de la durée respective de chaque mariage ; lorsqu’un lit était représenté par un orphelin, la part attribuée à ce lit était divisée par le nombre d’enfants ayant cause. Si un lit n’était plus représenté, sa part revenait aux autres lits. Ces dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel à l’issue d’une décision n°  2010-108 QPC, motif tiré de ce que « dans le cas où deux lits, au moins, sont représentés par un ou plusieurs orphelins, la division à parts égales entre les lits, quel que soit le nombre d’enfants qui en sont issus, conduit à ce que la part de la pension due à chaque enfant soit fixée en fonction du nombre d’enfants issus de chaque lit ; que la différence de traitement qui en résulte entre les enfants de lits différents n’est pas justifiée, au regard de l’objet de la loi, qui vise à compenser, en cas de décès d’un fonctionnaire, la perte de revenus subie par chacun de ses ayants cause ». En d’autres termes, si un lit était représenté par le conjoint survivant, un autre par un orphelin issu d’un premier mariage, et un troisième par trois orphelins issus d’une autre union, ces derniers disposaient individuellement d’une moindre part de la pension, puisqu’ils devaient se répartir entre eux une part de la pension identique à celle qui bénéficiait respectivement aux deux autres lits. L’article 162 de la loi du 28 décembre 2011 précitée a donc remplacé l’article L. 43 du CPCMR par les dispositions suivantes : « La pension définie à l’article L. 38 est répartie comme suit : / a) A la date du décès du fonctionnaire, les conjoints survivants ou divorcés, ayant droit à pension, se partagent la part de la pension de réversion correspondant au rapport entre le nombre de conjoints survivants, ou divorcés, et le nombre total de lits représentés. Cette part est répartie entre les conjoints, au prorata de la durée respective de chaque mariage. / Un lit est représenté soit par le conjoint survivant ou divorcé, soit par les orphelins de fonctionnaires dont l’autre parent n’a pas ou plus droit à pension ; / b) La différence entre la fraction de la pension prévue à l’article L. 38, et les pensions versées aux conjoints survivants, ou divorcés, du fonctionnaire, en application du a, est répartie également entre les orphelins ayant droit à la pension prévue à l’article L. 40 qui représentent un lit ». Ces dispositions, entrées en vigueur le 1er janvier 2012,  ont modifié les modalités de calcul de la part de pension de réversion attribuée aux orphelins représentant un lit. La répartition, en fonction du nombre de lits, continue à s’appliquer entre les conjoints survivants ou divorcés. En revanche, dorénavant, la différence entre la fraction de pension prévue à l’article L. 38 (50 %), et les pensions de réversion versées aux conjoints survivants, ou divorcés, revient aux orphelins représentant un lit, de manière égalitaire. Dans l’exemple précédent, le premier lit bénéficierait donc d’un tiers de la pension de réversion, et les deux tiers restant seraient répartis à égalité entre les quatre orphelins. Si l’un des orphelins vient à perdre son droit à pension, le droit des autres orphelins en est donc augmenté, sans que cela remette en cause la part revenant au conjoint survivant, ou divorcé.  À l’instar d’autres régimes (comme l’Institution de retraite compémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques, Ircantec, par exemple), la répartition de la pension de réversion entre les différents lits est dorénavant cristallisée à la date du décès du fonctionnaire dont la pension est reversée. À cet égard, à l’occasion de l’examen d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 43 du CPCMR actuellement en vigueur (décision n°  2013 348 QPC), le Conseil constitutionnel a validé ce dernier article en rappelant qu’« aucun principe, ni aucune règle de valeur constitutionnelle n’impose », le cas échéant, que la pension soit à nouveau répartie entre les ayants cause restants, lorsqu’un lit cesse d’être représenté. À ce stade, une modification des règles relatives aux pensions de réversion ne saurait, désormais, être traitée de manière indépendante de la réflexion menée dans le cadre de la réforme des retraites, annoncée par le président de la République et conduite par M. Jean-Paul Delevoye, Haut Commissaire chargé de cette question.

Source: JO Sénat du 23/08/2018 – page 4272

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