Interventions: Respect de l’article 35 de la Constitution.

Question écrite N° 79301 de M. Jean-Jacques Candelier (Gauche démocrate et républicaine – Nord ) publiée au JO du 12/05/2015 page : 3522
Texte de la question
M. Jean-Jacques Candelier interroge M. le ministre de la défense sur le respect de la Constitution. En juillet 2014, il était annoncé la fin de l’opération Serval au Mali, remplacée par l’opération Barkhane depuis le 1er août 2014, qui remplace aussi Epervier (Tchad). Aucun débat n’a eu lieu dans l’hémicycle dans les jours suivants, aucune demande de prolongation n’a été présentée devant le Parlement par le Gouvernement, contrairement à ce que stipule l’article 35 de la Constitution (vote au bout de 4 mois). Il lui demande s’il trouve que l’opération Barkhane se déroule conformément à la Constitution.
Texte de la réponse
Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, l’article 35 de la Constitution prévoit que, lorsque la durée d’une intervention des forces armées à l’étranger excède quatre mois, le Gouvernement soumet sa prolongation à l’autorisation du Parlement afin de renforcer l’information et le contrôle de la représentation nationale sur les opérations militaires auxquelles participe la France.
Si la notion d’intervention des forces armées à l’étranger ne fait l’objet d’aucune définition juridique, son champ d’application a toutefois été précisé lors des travaux parlementaires relatifs au projet de loi constitutionnelle.
Les débats ont notamment permis d’en délimiter les contours, et donc d’établir ce qui ne relève pas de la procédure d’information et d’autorisation, permettant ainsi de respecter la volonté des constituants, sans pour autant dénaturer l’esprit de cette procédure par une utilisation disproportionnée.
Ne sont donc pas considérés comme des interventions des forces armées à l’étranger, les échanges de militaires, les exercices effectués régulièrement à l’étranger, les opérations confidentielles des services de renseignement ou menées par les forces spéciales dans des cas particuliers, le prépositionnement des troupes en application d’accords de défense, les opérations humanitaires n’ayant pas de but opérationnel, les opérations spéciales nécessitant une grande discrétion, à la fois quant à leurs objectifs et leur mode d’action, ou encore les déplacements des aéronefs français dans les espaces internationaux, ceux des bâtiments de la marine nationale en patrouille de haute mer, ainsi que les escales de ces bâtiments dans les ports étrangers.
Au regard de ces éléments de définition et de la nature de l’opération Barkhane, deux séries de raisons ont principalement permis de conclure que l’article 35 ne s’applique pas.
En premier lieu, l’opération Barkhane est une nouvelle articulation de diverses opérations qui, soit ont déjà fait l’objet d’une autorisation parlementaire, comme l’opération Epervier au Tchad, autorisée le 28 janvier 2009, et l’opération Serval au Mali, autorisée par le Parlement le 22 avril 2013, soit entrent dans le champ, aujourd’hui consacré, des exceptions à l’application de l’article 35, telles celles qui ont été précédemment énumérées.
En second lieu, ni les volumes engagés pris globalement, ni les finalités, à savoir assurer la sécurité au Sahel et combattre les groupes terroristes armés, n’ont évolué suffisamment pour justifier que l’opération Barkhane soit juridiquement qualifiée de nouvelle intervention des forces armées relevant des dispositions de l’article 35 de la Constitution.
Le dispositif militaire français présent dans la bande sahélo-saharienne ne fait plus seulement face à une situation de crise marquée par une offensive de groupes armés destinée à prendre des positions territoriales.
Il devient un dispositif de soutien aux armées africaines, appuyé sur des accords de coopération opérationnelle et de coopération technique, dont l’objectif est de surveiller, de dissuader l’action de groupes terroristes combattants circulant dans la bande sahélo-saharienne et d’éviter qu’ils reconstituent leurs capacités d’action et accroissent le niveau de menaces sur ces pays et sur l’Europe.
Ainsi, l’opération Barkhane n’étant juridiquement que l’aménagement d’opérations déjà autorisées ou exemptées d’autorisation, la mise en oeuvre de la procédure prévue à l’article 35 de la Constitution ne paraît pas juridiquement nécessaire.
Elle n’exclut bien évidemment pas, pour autant, une information régulière des commissions parlementaires compétentes, tant sur les accords qui en sont la base, que sur leurs évolutions.
A cet effet, le ministre de la défense vient régulièrement faire état de l’évolution de ce dispositif et de ces accords devant la représentation nationale.
Source: JOAN du  09/06/2015 page : 4319

À lire également