Dysfonctionnement, disponibilité des matériels, dérives, … diagnostic ?

L’ADEFDROMIL remercie très chaleureusement l’association « Contribuables Associés » qui l’a autorisée à reproduire ci-dessous deux articles concernant les armées, parus dans le n°15 de la revue « Tous Contribuables » de janvier-février 2003. l’Association « Contribuables
Associés » peut être contactée sur son site www.contribuables.net ou au 42, rue des jeûneurs 75077 Paris Cedex 02.

Les suites d’une affaire…

Touché-coulé : scandales à la DC !

A l’époque, personne ne voulait l’écouter, ni dans les milieux politiques, ni dans la presse. En février 2002, « Tous Contribuables » a donc donné la parole à François Guégan, ancien directeur des achats de la Direction des Constructions Navales (DCN), qui témoignait des dysfonctionnements de cette administration. Depuis, la justice a fait son chemin.

François Guégan a déposé une plainte au Procureur de la République de Paris, en mars 2001, pour trois affaires représentant, pour l’Etat, un préjudice total qu’il évaluait à 230 millions d’euros. Mais rien ne semblait vouloir bouger : ni la presse, ni les ministres ne voulaient s’y intéresser.

Mais, trois jours après la parution de notre article, le Procureur de la République l’informait que les dossiers suivaient leur cours. La situation s’est finalement débloquée en octobre 2002.

La première affaire évoquée par l’ancien directeur des achats concernant la passation de marchés « d’études informatiques » bidons, et portait sur un préjudice de 20 millions d’euros. Les deux principaux protagonistes ont d’ailleurs été, depuis, incarcérés. La deuxième affaire concernait l’abandon d’un important contentieux avec une entreprise norvégienne d’armement, Konsberg.

Après la diffusion de notre article et les remous qu’il souleva dans les cabinets ministériels, le ministre de la Défense demanda des éclaircissements au Contrôleur Général des Armées (CGA). Celui-ci a tenté de stigmatiser le peu d’empressement montré par la DCN à l’informer sur le contenu des négociations avec Konsberg, mais le ministre n’a pas l’intention d’en rester là.

Le troisième dossier avait trait à des marchés publics relatifs à la réalisation de Nouveaux Transports de Chalands de Débarquement (NTCD), négociés sans mise en concurrence réelle avec deux  industriels. François Guégan estimait le préjudice pour la DCN à 110 millions d’euros.

Le Contrôleur Général des Armées a depuis émis, en avril 2001, un rapport « Confidentiel Défense » concluant que ce marché était bien illégal et évalué  le surcoût à 55 millions d’euros.

En conséquence, depuis la saisine du Procureur, la DCN fait jouer la concurrence. Résultat : 9 millions d’euros d’économies réalisées sur le système de communication des NTCD, et 40% de moins sur la confection des éléments de coque, par rapport aux propositions des industriels auxquels avaient été accordés – sans mise en concurrence – les marchés initiaux !

A partir de ces trois affaires, les enquêtes se sont multipliées et les dossiers s’accumulent, entraînant de nombreuses mises en examen parmi les responsables de la DCN – y compris celle de son directeur.

Au total, le coût des gabegies devrait s’élever pour l’Etat à 1,2 milliard d’euros .Un grand ménage s’impose à la DCN. Il devrait être effectué au sein de cette administration dans les mois qui viennent.

L’armée française en difficulté…

L’armée française est-elle toujours en mesure de nous défendre ? Dans un rapport publié à l’automne, le député Gilbert Meyer s’émeut de la faible disponibilité des matériels. Quand gabegie et mauvaise gestion mettent en péril notre Défense nationale.

La Défense nationale figure au premier rang des missions régaliennes de l’Etat. A lire le rapport consacré à « l’entretien des matériels des armées », présenté en octobre 2002 par le député UMP du Haut-Rhin, Gilbert Meyer, on tombe pourtant de haut.

Il en ressort que « la disponibilité des matériels est insuffisante au sein des trois armées. Le taux de 60% constitue pour chacune d’entre elles le niveau autour duquel se situe la disponibilité globale de leurs armements » » 40% des matériels seraient donc indisponibles !.

En clair, les armées se trouvent « sur le fil d’une rupture capacitaire : si les équipements peuvent être mobilisés en cas de crise et être pleinement opérationnels, c’est d’une part au détriment de la disponibilité des autres matériels et d’autre part pour des opérations d’une durée relativement réduite et d’une ampleur limitée ». Ainsi, « au plus fort de la crise afghane, nous avions des moyens d’intervention très limités ».

Dans l’armée de terre, par exemple, la disponibilité technique opérationnelle (DTO) du parc de lance-roquettes multiples ne dépassait pas 39% au début 2002 ! Dans l’armée de l’Air, celle des mirages 2000 varie, selon leur type, entre 55% et 65%. Du côté de la Marine, la DTO des sous-marins nucléaires d’attaque n’excède pas 38,8% !

« Insuffisance des crédits », diagnostique Gilbert Meyer. Pour mémoire, le budget de l’armée s’est élevé à 247,393 milliards de francs en 2002 (37,655 milliard d’euros), contre 243,344 milliards de francs en 1997.

Cependant, ajoute-t-il, « la seule amélioration des montants budgétaires alloués au maintien en condition opérationnelle des équipements ne peut suffire »

La création de structures intégrées de l’entretien des matériels aériens (SIMMAD) et de la flotte (SSF) a par exemple permis, en réformant la gestion des rechanges, la passation des commandes et le suivi des réparations,, « de stabiliser, voire de redresser, le niveau de disponibilité des appareils de l’armée de l’air et de l’aéronavale en améliorant très sensiblement le cycle des rechanges ».

Autrement dit, une partie au moins des fonds nécessaires  peut être trouvée en chassant le gaspi. Ainsi s’est-on aperçu, lors du transfert à la Marine des stocks de rechanges destinés aux bateaux, précédemment gérés par la DCN, qu’il manquerait pour au moins 300 millions d’euros de matériel.

Une enquête est ouverte pour démasquer les malhonnêtes. Rien n’est, en revanche, décidé pour débusquer les incompétents. Le problème n’est donc qu’en partie réglé.

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