La requête d’un officier de gendarmerie relative à sa liberté d’expression déclarée irrecevable

Communiqué du Greffier

Décision

Matelly c. France (no 30330/04)

LA REQUETE D’UN OFFICIER DE GENDARMERIE RELATIVE A SA LIBERTE D’EXPRESSION DECLAREE IRRECEVABLE

(La décision n’existe qu’en français.)

Principaux faits

Le requérant, M. Jean-Hugues Matelly, est un ressortissant français, né en 1965 et résidant à Amiens. Il est officier de gendarmerie au commandement des écoles de gendarmerie nationale.

Également chercheur associé au Centre d’Études et de Recherches sur la Police de Toulouse, il publia en janvier 2003 dans « Les Cahiers de la Sécurité Intérieure » un article concernant de nouvelles méthodes de management dans la gendarmerie, les résistances qu’elles étaient susceptibles de générer et le risque associé de « recours systématique à la manipulation des statistiques de service ».

Suite notamment à une interview donnée au journal Libération dans un article intitulé « Un capitaine de gendarmerie dénonce le flou des chiffres de la délinquance : « La Tentation du bidonnage » », M. Matelly reçut le 4 février 2003 de l’état-major du commandement des écoles de la gendarmerie l’ordre verbal de ne plus communiquer avec la presse et se vit infliger le 18 mars 2003 un blâme du ministre de la défense pour violation d’un « règlement militaire » et pour « manquement à l’obligation de réserve dans l’expression écrite ou orale ».

Les deux demandes (de référé-liberté et de référé-suspension de l’exécution de la décision du 4 février 2003) faites par M. Matelly auprès du Conseil d’État furent rejetées ainsi que son recours pour excès de pouvoir.

En revanche, le 10 novembre 2004, le Conseil d’État annula la sanction disciplinaire du 18 mars 2003 au motif notamment que la procédure suivie avait été irrégulière (l’intéressé n’ayant pu exercer son droit de s’expliquer par écrit).

Griefs, procédure et composition de la Cour

Invoquant en particulier l’article 10 (liberté d’expression), combiné avec l’article 13 (droit à un recours effectif), le requérant se plaignait d’une restriction disproportionnée à sa liberté d’expression et de ne pas avoir disposé d’un recours pour contester les mesures à son encontre.

Il a saisi la Cour européenne des droits de l’homme le 10 août 2004.

La décision a été rendue par une par une chambre composée de :

Peer Lorenzen, président,

Renate Jaeger,

Jean-Paul Costa,

Karel Jungwiert,

Rait Maruste,

Mark Villiger,

Isabelle Berro-Lefèvre, juges

et de Claudia Westerdiek, greffière de section.

Décision de la Cour

L’ordre verbal reçu par M. Matelly constituait une ingérence dans son droit à la liberté d’expression puisque le non-respect de cet ordre impliquait une sanction disciplinaire. Il n’est pas contesté par le requérant que cette ingérence avait une base légale et la Cour estime que son but légitime était de défendre l’ordre dans les forces armées.

Considérant néanmoins que les propos du requérant dans les médias étaient susceptibles de porter atteinte à la confiance du public dans l’action de la gendarmerie, que (surtout)  l’interdiction  faite à M. Matelly de communiquer avec les médias avait un objet limité et que la sanction infligée (le blâme du 18 mars 2003), d’une gravité modérée, fut annulée, la Cour estime que l’ingérence des autorités françaises dans le droit à la liberté d’expression de M. Matelly n’était pas disproportionnée. Ce grief est donc manifestement mal fondé et doit être rejeté. Il s’ensuit que le grief tiré de l’article 13 ne trouve pas à s’appliquer et doit également être rejeté.

***

Rédigé par le greffe, ce résumé ne lie pas la Cour.

Source: Site internet CEDH (http://www.echr.coe.int)

Lire la décision de la CEDH Matelly c. France requête n°30330/04 du 15 septembre 2009

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