Négligences gravement fautives : cinq gradés face à la justice à Marseille.

Le 8 novembre 2001, les quartiers-maîtres  Franck Froehlinger et Sébastien Pisani interviennent sur le système de stockage et d’évacuation des eaux usées, non vidangé préalablement du porte avions Charles de Gaulle. La défaillance d’un clapet anti-retour libère brutalement une quantité importante de sulfure d’hydrogène(H2S), gaz dont la toxicité est potentiellement létale.

L’un d’entre eux, Sébastien Pisani, perd connaissance, victime de l’émanation accidentelle du gaz toxique. L’autre, Franck Froehlinger, s’évanouit à son tour en voulant porter secours à son camarade inanimé.

Rapidement évacués sur l’HIA Sainte-Anne à TOULON après avoir reçu les premiers soins du service médical du bord, Franck Froehlinger est légèrement atteint et bénéficie d’un arrêt-maladie de 18 jours ; plus sérieusement atteint, Sébastien Pisani, sombre dans un coma profond. Selon les experts médicaux, son « état végétatif est probablement définitif ».

Suite à cette affaire, quatre officiers et un sous-officier sont poursuivis devant la chambre spécialisée militaire du Tribunal correctionnel de Marseille pour « blessures involontaires ». Des peines allant de douze à quinze mois de prison avec sursis sont requises pour « des négligences gravement fautives » selon le substitut du procureur de la République.

Dans ce dossier le juge d’instruction souligne « une absence à tous les niveaux d’une réelle prise au sérieux de la sécurité d’interventions jugées comme aussi ingrates et peu nobles que banales et sans danger ».

Pour l’un des avocats de la défense, « la DCN a reconnu que l’installation était montée à l’envers. Quant au H2S, même le médecin de bord n’en était pas informé. Cet accident dépasse la question des personnes. Il révèle un dysfonctionnement complet des services de l’Etat. »

Notons toutefois que depuis 1992, les risques mortels du sulfure d’hydrogène sont connus de la marine marchande (décès de deux enfants sur le ferry Celtic Pride) et que  l’Etat-major de la force d’action navale a diffusé le 10 août 2001 un message mettant en garde toute la flotte contre le danger du H2S, après un accident survenu sur la frégate Georges-Leygues…

Malgré cela, Il semblerait que toutes les conséquences de ce tragique accident n’aient pas été prises au sérieux par les autorités de la Marine Nationale puisque selon Franck  Froehlinger , en décembre 2004, alors qu’il est réaffecté sur un pétrolier ravitailleur, on lui demande d’intervenir sur une caisse à eaux usées, identique à celle de son accident. Il constate qu’il n’y a pas de protection respiratoire, pas de périmètre de sécurité, pas de plan de prévention…

Finalement, dans cette affaire où chacun cherche à fuir ou minimiser ses responsabilités, il y a de fortes chances pour que le Tribunal tienne compte de la pertinence de l’intervention  du père de Sébastien Pisani  qui a déclaré à l’audience :

« Comment croire que sur ce fleuron de la Marine française personne ne tienne compte d’un message d’alerte ?! Le bon sens et le principe de précaution auraient dû suffire ! »

Verdict attendu le 17 novembre 2008.

                                                                                              Renaud Marie de Brassac

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