LA DEPRESSION D’UN MILITAIRE FEMININ VIOLE DANS UNE CASERNE N’EST PAS IMPUTABLE AU SERVICE

Par Albert Mudas

 

Le 4 juin 2008, la Cour d’Assises d’Evry a condamné Nazario Santos, un ancien caporal-chef, à cinq ans d’emprisonnement avec sursis pour le viol de Laetitia, engagée volontaire de l’armée de terre au 121ème Régiment du Train de Montlhéry.

A priori, une telle peine peut paraître peu sévère dans la mesure où le code pénal, en son article 222-23 sanctionne le viol de « quinze ans de réclusion criminelle ». Toutefois, cette peine de cinq ans n’est pas critiquée par la victime.

Il reste que les circonstances de l’affaire comme son instruction et ses conséquences sont dramatiques et jettent l’opprobre sur tous ceux qui ont tout fait pour l’enterrer.

Laetitia, heureuse de servir sous l’uniforme est encore en permission lorsqu’elle décide de rentrer à la caserne le 14 juillet 2001 pour retrouver ses camarades.

L’un d’entre eux, le caporal-chef Nazario Santos, âgé de 31 ans, profite, lors d’une soirée arrosée dans une chambre de la caserne de Montlhéry, de l’état drogué de Laetitia pour en abuser sexuellement.

En effet, une enquête démontrera la présence de GHB, usuellement appelé « drogue du violeur », dans le sang de la victime.

Cinq jours après les faits, la victime porte plainte contre son agresseur malgré la dissuasion opérée par les gendarmes.

Laetitia est de surcroît, victime de brimades, d’insultes et de nombreuses menaces au sein de son régiment afin qu’elle retire sa plainte.

Non écoutée par sa hiérarchie, Laetitia s’est trouvée rejetée par une institution qui s’était pourtant engagée à la respecter comme en témoigne le slogan de l’armée de terre «  Lorsque vous vous engagez, nous nous engageons. « 

Lors du procès, elle a pu dire ainsi à la Cour : «  au lieu de me soutenir, l’armée m’a enfoncée et fait comprendre que je devais partir. « 

De plus, l’enquête ne faisant que tarder, le juge d’instruction d’Evry, en 2002, a dessaisi la gendarmerie pour confier l’examen du dossier au SRPJ de Versailles.

Il a fallu, en conséquence, attendre deux ans de plus, pour que l’accusé soit placé en garde à vue.

Après tant de longueur dans la procédure, il n’est pas surprenant que la victime ait souffert de dépression.

Mais, cet état dépressif, qui résulte pourtant du viol et des conditions de déroulement de l’enquête et de l’instruction, a été jugé non imputable, car dépourvu de tout lien avec le service. Elle s’est, en conséquence, vu refuser tout droit à pension d’invalidité.

Comment ne pas s’outrager d’un tel système ? Ainsi les armées qui prétendent avoir réussi la féminisation sont incapables de protéger physiquement et juridiquement un de ses membres. Bien au contraire, elles se lavent les mains des conséquences humaines d’une agression commise par un autre militaire dans l’enceinte même du casernement.

Simultanément, l’Adefdromil constate que de nombreux personnels féminins sont l’objet de harcèlement moral.

On ne peut que regretter une nouvelle fois que le statut général ne protège pas les militaires contre les actes de harcèlement moral et sexuel, comme cela est prévu pour le reste de la fonction publique.

Laetitia reste donc aujourd’hui déterminée à dénoncer les dérives de l’institution militaire. Dès la rentrée prochaine, elle va de nouveau ester en justice contre l’armée pour faire valoir ses droits.

                                                                                            

 

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