Avis du Conseil de l’Europe sur le droit d’association des membres du personnel professionnel des forces armées du 2 septembre 2002

Doc. 9532

2 septembre 2002

Droit d’association des membres du personnel professionnel des forces armées

Avis1

Commission des questions sociales, de la santé et de la famille

Rapporteur: M. Francisco Arnau, Espagne, Groupe socialiste

I       Conclusions de la commission

1.       Pour le rapporteur et pour la commission des questions sociales, de la santé et de la famille, les droits de l’homme ne sauraient s’arrêter aux portes des casernes. L’initiative de la commission des questions juridiques et le projet de recommandation doivent donc être salués et soutenus.

2.       Le droit d’association a la particularité qu’il ressortit à la fois des deux familles de droits, celle des droits civils et politiques et celle des droits économiques et sociaux. Reconnaître ce droit est l’expression et le symbole de l’indivisibilité des droits de l’homme, cheval de bataille du Conseil de l’Europe.

3.       La recommandation se limite au seul droit d’association car dans nos Etats membres la reconnaissance aux forces armées de l’ensemble des droits de l’homme fondamentaux reste encore l’exception; ce qui devient de plus en plus difficilement acceptable en raison notamment – comme le souligne justement le rapport de Mme van Ardenne – de la professionnalisation des personnels des forces armées qui deviennent des travailleurs employés comme les autres et de la nécessité d’y attirer les jeunes.

II.       Exposé des motifs

4.       Pour rester efficace une armée de métier doit recruter à un certain niveau de compétence et dans certains cas, doit renouveler régulièrement ses soldats. Dans la plupart des Etats, les campagnes actuelles de recrutement ciblées sur les jeunes mettent d’ailleurs l’accent sur l’aspect «métier» de l’armée, endroit approprié, d’après les slogans retenus pour séduire les jeunes, pour soit acquérir des connaissances soit pour se perfectionner dans des métiers «pointus» et d’avenir.

Les restrictions et les droits

5.       Il serait vain de pointer du doigt toutes les lacunes subsistant dans la reconnaissance des droits de l’homme aux forces armées. Mme van Ardenne donne un bon aperçu des différences énormes entre nos Etats membres (cf. paragraphes 19 et suivants du rapport). Les pratiques suivies également gagneraient à être mises en cause; à titre d’exemple on peut citer que dans certains corps d’armées subsiste encore l’obligation d’obtenir l’autorisation des instances hiérarchiques pour pouvoir se marier !

6.       Reconnaître le droit d’association et le droit d’appartenir à un parti politique est un premier pas primordial en ce qu’il détermine tous les autres pas en avant. Il est certain que la reconnaissance des autres droits tant civils et politiques qu’économiques et sociaux ne manquera pas en effet de suivre à des intervalles plus ou longs.

7.       L’adoption de la recommandation élaborée par la commission des questions juridiques devrait d’ailleurs être l’occasion pour tous nos Etats membres de passer en revue la réglementation – souvent désuète – applicable aux membres des forces armées et de la dépoussiérer.

Terrorisme et droits de l’homme

8.       On pourrait évidemment s’interroger sur la question de savoir si, en ces temps d’après le 11 septembre 2001 et de lutte contre le terrorisme, le moment est politiquement opportun pour reconnaître un tel droit qui implique le droit de grève. Ne risque-t-on pas de contribuer à accroître le sentiment d’insécurité des populations civiles qui sont désormais les cibles et les victimes désignées des conflits déclarés ou des actions terroristes.

9.       Toutefois il est vrai aussi que cette reconnaissance va dans le sens préconisé par toutes les instances du Conseil de l’Europe et par l’Assemblée parlementaire dans sa déclaration de Saint-Pétersbourg qui refusent que la lutte contre le terrorisme soit le prétexte et l’occasion de porter atteinte à l’application des droits de l’homme en Europe.

10.       De toute façon, comme tous les droits, le droit d’association et le droit de grève s’ils sont reconnus aux forces armées, demandent pour être appliqués, à être réglementés; ceci est expressément prévu par l’article 31 de la Charte sociale européenne. Le droit d’association ou le droit de grève peuvent toujours être restreints ou suspendus en cas d’atteinte à l’ordre public ou la sécurité nationale.

11.       Il convient aussi de rappeler ce qui est trop souvent méconnu ou négligé, à savoir que le droit de grève est, tant pour les forces armées que pour le secteur civil, un moyen ultime auquel on ne doit recourir qu’en cas d’échec des procédures préalables de négociation, de médiation ou d’arbitrage, d’où l’importance de mettre sur pied de tels mécanismes, comme celui de l’Ombudsman par exemple ainsi que le préconise le rapport.

                                          *

                                     *       *

Commission chargée du rapport: commission des questions juridiques et des droits de l’homme (Doc. 9518)

Commission saisie pour avis: commission des questions sociales, de la santé et de la famille

Renvoi en commission: Doc. 9080 et renvoi n° 2607 du 22 mai 2001

Avis approuvé par la commission le 2 septembre 2002

Secrétariat de la commission: M. Newman, Mme Meunier et Mme Karanjac

 

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