Editorial : nouvelles mesures indemnitaires ou saupoudrage ?

Le 28 février 2002, le ministre de la défense a annoncé à Istres, une série de mesures inscrites dans un plan pluriannuel (2002-2008) et destinées à calmer en période électorale, une grogne légitime au sein des armées. L’urgence de la situation l’a emporté sur la réflexion et la concertation. Pourtant, la somme de 433 millions d’euros annoncée au titre de la revalorisation de la condition militaire pour la période 2002-2003 est importante mais sans aucune incidence sur les soldes de base, donc sur les retraites. Une nouvelle fois et dans une atmosphère de désinformation générale des françaises et des français, le gouvernement, s’est livré à un véritable saupoudrage de pourcentages appliqués à des primes ou des indemnités dérisoires. 4% sur l’indemnité de charges militaires représentent pour certains une misérable augmentation de 8,22 euros (53,91 fr.) par mois. 1% d’augmentation sur la prime afférente au diplôme de qualification supérieure correspond pour d’autres à 18,40 euros (120,70 fr.) par mois !

Même les indemnités opérationnelles ne sont pas équitables ! Les unités parachutistes constamment sur le terrain sont, sans raison, écartées du bénéfice de l’indemnité de service en campagne pourtant revalorisée de 10%.

Si quelques militaires sont satisfaits de cette revalorisation, nombreux sont ceux qui ont manifesté leur colère auprès de l’association. La déception est grande, elle confine à l’amertume. Pourquoi ?

Aucune annonce de mesures sur :
– La mise en place rapide de moyens pour accomplir les missions opérationnelles et d’entraînement ;
– les effectifs ;
– la réforme du statut général des militaires;
– les instances de concertation ;
– l’intégration de certaines primes dans le calcul des retraites ;
– l’obligation de transparence de l’administration militaire ;
– la précarité des carrières ;
– la stricte parité des rémunérations avec la fonction publique (remise à plat du décret de 1948 sur la grille indiciaire modifié des centaines de fois au point que plus personne ne s’y retrouve ! il en est de même pour la NBI et le maquis des primes et indemnités) ;
– les retards de paiement aux personnels des frais de déplacement ;
– les moyens de retenir les personnels qualifiés (médecins, infirmiers, informaticiens etc.)

Aucune annonce de mesures afin que les militaires jouissent de règles de gestion comparables à celles qui existent pour les autres corps de la fonction publique générale.

Le malaise au sein des armées reste entier. Il ne procède pas d’un mouvement corporatiste vénal en quête de quelques misérables revalorisations sonnantes et trébuchantes ayant pour but un traitement égalitaire avec les gendarmes. Ce n’est donc pas en injectant de manière désordonnée, précipitée et confuse de l’argent ici ou là que les esprits s’apaiseront.

De quoi souffrent donc avant tout les militaires d’aujourd’hui ?

– d’un manque de considération des autorités politiques de ce pays,
– d’un manque de considération d’une fraction carriériste de leur propre hiérarchie, distante et parfois méprisante, tant à l’égard des personnes que des problèmes soumis,
– du retard apporté pour la mise en place et le maintien opérationnels des équipements nécessaires à l’exécution de leurs missions,
– d’un total manque de transparence dans la gestion de leur carrière et des décisions administratives prises à leur encontre ;

Enfin, ils souhaitent avoir un minimum de vie en famille et une meilleure prise en compte de leurs problèmes familiaux avant le prononcé d’une mutation. L’armée n’a pas pour vocation de devenir une machine à fabriquer des divorces !

Nul doute que l’anesthésie locale, administrée à la « grande muette » par un gouvernement finissant, risque de provoquer un réveil agité si les problèmes de fond ne sont pas traités dans des délais raisonnables.

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