Le Général LAGARDE, un « grand CEMAT » … une époque !

Le Général LAGARDE vient de « s’en aller » avec beaucoup de discrétion (trois lignes dans « Le Point » du 26 Juillet …). Il avait quitté ses responsabilités à la tête de l’Armée de Terre en mars 1981. Ceux qui ont servi sous ses ordres sont aujourd’hui des « anciens » , ont parfois accédé à de hautes fonctions ou plus souvent encore … sont retraités ! Le temps passe si vite que les souvenirs s’estompent.

Nous garderons en mémoire :

Les « directives » bien sûr … au nombre de 10, chacun devait les avoir sur lui ou en évidence dans le bureau et les connaître par coeur. C’était le temps des « plans d’action » et une nouvelle pédagogie (le PMG …) sévissait avec plus ou moins de bonheur. Le « personnage » … un peu distant et froid au premier abord, beaucoup de clarté dans l’expression et de précision dans le « verbe » Un « style » et avant tout bien sûr, une autorité ferme, indiscutée … sans équivoque ! Une « volonté » … d’aller au fond des choses, de ne rien négliger et d’assumer toute l’étendue de ses responsabilités. Une « façon » d’aborder le subordonné : « mon capitaine » … « mon adjudant », de mettre en confiance sans se prévaloir « d’une hauteur ». Là aussi, il se voulait exemplaire. …et « Terre Informations » bien entendu, qui n’était pas encore « un Magazine » mais avait une toute autre densité !

Il y avait eu un « avant Lagarde » : avec la fin des aventures coloniales et l’essor économique, une Armée qui progressait, se modernisait et s’équipait… mais où les problèmes humains étaient laissés au second plan, la condition du personnel allait en se dégradant et le mépris pour la communauté militaire s’affichait dans le monde politique jusqu’au plus haut sommet de l’Etat.

Il y aura par la suite un « après Lagarde » avec un statut nouveau, un « social » mieux traité, une ouverture au « dialogue »… mais un budget en perdition, des équipements vieillissants, jusqu’aux « dividendes » … que l’on connaît !

On ne boude vraiment pas son plaisir en relisant « l’exercice du Commandement dans l’Armée de Terre », ce document qu’il avait laissé en juillet 1980 quelques mois avant de partir et qui était préfacé (excusez du peu … !) par Jean GUITTON de l’Académie française.

Pour le CEMAT, le Commandement était « un art qui fait appel au coeur autant qu’à l’esprit et qui conjugue par conséquent aussi bien la pensée que l’action ». Il voulait, avant de partir, souligner une « évolution » qu’il mettait au compte de deux facteurs : les « caractéristiques de la société contemporaine » et le « style du combat moderne ». Il précisait que pour lui l’exercice de l’Autorité s’échelonnait selon trois étapes : « prévoir, ordonner … et contrôler ». Il affirmait enfin sa conviction que la Communication (… et l’information !) devait « être à la base de ces échanges » et surtout que les rapports du Chef avec ses subordonnés étaient indissociables de cette « chaleur humaine » sans laquelle il ne pouvait y avoir « adhésion active » et par conséquent discipline librement consentie. Dans les chapitres suivants, il expliquait à chacun (du Général au Commandant d’Unité élémentaire ! …) ce qu’il attendait de lui. Le Capitaine était invité à « donner un style à sa Compagnie »…

On relit tout ceci aujourd’hui avec intérêt … D’autres depuis se sont risqués au même exercice et ont voulu élever le débat en donnant « du sens à l’action » et en approfondissant le chapitre de l’ « éthique ». Il est effectivement important de parvenir à « maîtriser la force » … encore faut-il avoir les moyens de l’exercer !

Le Général LAGARDE aura manifestement laissé « une trace » très forte à ceux qui ont eu le privilège d’être « sous les drapeaux » à cette époque. Il serait justifié que « les Professionnels » d’aujourd’hui s’en souviennent. L’Armée « de conscription » quant à elle est heureuse et fière d’avoir connu et servi entre 75 et 80 … les « années LAGARDE » …

Mustapha Bidochon.

Note de l’Adefdromil

Le Général LAGARDE fût non seulement un réformateur tenace et intelligent mais aussi un fabuleux chef de guerre à la tête du 21° de marine en Indochine.

On prête cette anecdote au colonel MAZET, camarade de promotion à Cyr, à l’ESG et au casse pipe du général LAGARDE, en Indo il commandait le 22° de marine voisin. Son professeur à l’ESG lui demanda un jour de définir VAN BREMERSCHE (futur CEMA) et LAGARDE. Il le fit ainsi : « Le second fait parfaitement les petits fagots…le premier les utilise superbement ».

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