LA BANQUEROUTE DE LA CONCERTATION ET DE LA REPRESENTATION DES MILITAIRES

A la lecture des médias et de quelques forums tels que « Gendarmes Et Citoyens », il apparaît que la haute hiérarchie militaire mise en place par le pouvoir politique ne craint qu’une chose : l’émergence d’un système de représentation des militaires conforme aux recommandations européennes.

En effet, un groupement professionnel des armées (possiblement affilié à EUROMIL), composé d’associations représentatives dans lesquelles coopéreraient des militaires élus et soutenus par des spécialistes au fait des textes et des statuts, semble constituer une inquiétude du côté du MinDef. Naturellement, ce concept recommandé par le conseil de l’Europe ayant fait ses preuves dans les pays voisins, il fait aussi son chemin dans les esprits des militaires français toujours dépourvus de la liberté d’expression et du droit d’association. Il en résulte que les belles paroles de nos ministres adressées à des militaires désignés sont mises à mal et qu’elles ne disposent plus de la moindre parcelle de crédibilité. La hiérarchie chargée de veiller aux intérêts des subordonnés y sera sans doute de sa poche dans les mois qui viennent : vivement la nouvelle grille indiciaire !

La haute hiérarchie étant toujours proche du pouvoir politique (on le voit bien dans les meetings pré électoraux fréquentés par des généraux sans doute animés par un devoir de réserve à géométrie variable), cette hiérarchie n’est malheureusement qu’éphémère : deux à quatre ans tout au plus. Elle ne sert donc qu’à régler les affaires courantes, conformément aux décisions prises en amont par quelques énarques dont la connaissance des armées et la compétence militaire ne sont pas les toutes premières vertus. Comment dans de telles conditions peut-on réellement veiller aux intérêts de ses subordonnés ? D’ailleurs, le plus souvent frappé d’une couleur politique bien affirmée, le chef militaire de haut niveau, nommé en conseil des ministres, n’a en réalité pas plus de pouvoir qu’un aide de camp sous l’Empire. Son avenir est davantage lié à sa soumission qu’à son appréhension des problèmes. Ainsi, son charisme, son pouvoir de conception et de commandement constituent des pénalités rédhibitoires pour accéder aux toutes dernières marches du temple de la pensée unique et les exemples pitoyables n’ont pas manqué au cours de ces dernières années.

Face à une telle situation que le général de GAULLE aurait réglé promptement en nommant aux postes clé des officiers compétents et totalement désintéressés, on a plus guère de « grands chefs » qui travaillent pour leur base, l’intérêt général de la France et de ses institutions. Dans un silence coupable les armées en ont fait les frais sous quelques gouvernements et aujourd’hui encore, la gendarmerie enfonce le clou chaque jour un peu plus.

Les décisions à prendre étant classées par ordre de priorité au plus haut niveau de l’Etat, les décisions politiques sont inspirées des éditoriaux médiatiques (le second pouvoir), de l’opinion publique (le pouvoir de la rue) du budget (le pouvoir des deniers). Dans ces conditions, il est totalement illusoire de croire en la concertation illustrée par quelques « soupapes » de décompression et de diversion installées un peu partout. Des rapports sur le moral, des audits, des commissions, des enquêtes, des réunions diverses et variées dont les CR sont classés verticalement en fin de séance.

Comme sur les planches de la comédie française, ne ressort du tableau que le scénario écrit par l’auteur. Ensuite, le rideau tombe et le public rentre chez lui. Les acteurs aussi jusqu’à la parodie suivante : le ministre y travaille avec ses conseillers en communication et spectacles.

L’actuel statut des militaires – fameux système de représentation imposé – demeurent à ce jour et au pays des droits de l’Homme sans fondement démocratique. Ce texte ne cesse de s’affranchir des règles sur lesquelles repose la République française, état fondateur d’une Europe plus juste, prospère et en paix. Les militaires français restent donc des citoyens de seconde zone – alors que partout dans le monde, ils sont chargés de défendre les valeurs de leur pays.

DECLARATION DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN.
Art. 11. –

La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.

PREAMBULE DELA CONSTITUTION DE 1946 (inclus dans le bloc de constitutionnalité)
Art. 6 –

Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son choix.

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME.
Article 10 – Liberté d’expression
1. Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations.
2. L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire.

Article 11 – Liberté de réunion et d’association
1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.
2. L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l’administration de l’Etat.

RECOMMANDATION 1742 (2006)1
http://assembly.coe.int/Mainf.asp?link=/Documents/AdoptedText/ta06/FREC1742.htm

Droits de l’homme des membres des forces armées
9.1. d’autoriser les membres des forces armées à s’organiser dans des associations professionnelles représentatives ou des syndicats ayant le droit de négocier sur des questions concernant les salaires et les conditions de travail, et de mettre en place des organismes consultatifs à tous les niveaux réunissant ces associations ou syndicats, représentant toutes les catégories de personnel.

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En résumé, l’actuel système de représentation et de concertation des personnels placés sous statut militaire reste un outil de manipulation et d’occultation des réalités : force est de constater qu’en 2007, le Cimetière Symbolique de la Fonction Militaire (CSFM) arrive en fin de vie. Dans l’allée des incantations, les stèles allant des numéros 1989 à 2007 semblent constituer son épilogue. A ce jour, il paraît inévitable que le chef des armées aura à régler cette question occultée depuis plus 20 ans et le plus tôt sera le mieux car l’institution militaire au premier rang de laquelle on trouve la gendarmerie, ne résistera pas à de nouvelles hypocrisies.

Conscients des réalités économiques du pays, les militaires ne réclament pas qu’un effort budgétaire supplémentaire leur soit consenti. Ils demandent simplement un statut plus juste se rapprochant des lois et des recommandations européennes.

Expurger un texte de ses abus et injustices n’est pas faire « entrer le loup dans la bergerie » Au contraire, c’est l’inviter à sortir pour renouer le dialogue sur des bases plus justes permettant ainsi de retrouver le calme dans le respect mutuel.

« Le dialogue et la concertation ne s’imposent pas : ils s’instaurent par la confiance, l’équilibre et le respect mutuel ». Compte tenu de ce qui s’annonce, celles et ceux qui servent la France sous l’uniforme vont en avoir grandement besoin.

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