Ordre illégal – Enfin une solution concrète (par jacky mestries)

 

Dans un dernier article, alors que j’évoquais l’héroïsme d’un soldat Lybien,  j’abordais implicitement le droit de résistance du militaire à un ordre manifestement illégal.(https://sites.google.com/site/lagrognegend/1/remaniementministeriel )Un lecteur de La Grogne, m’a fait remarquer qu’en tant qu’enseignant dans une école de Gendarmerie, il traitait ce problème avec le plus grand soin. Il existe bien, dans notre pays la réglementation nécessaire qui permet à un militaire de s’opposer à un ordre manifestement illégal. Il me précise, cependant, qu’il manque à cet enseignement des mises en situation.Il me demande d’approfondir cette question que j’avais évoquée publiquement car je ne pouvais pas rester sur l’impression que le soldat était seul face à sa conscience. Il n’en était rien.Je me suis donc replongé dans mes bouquins pour modifier l’impression donnée et faire un point aussi précis que possible des armes à la disposition du militaire pour faire son devoir sans risquer d’obéir à un ordre illégal.Le meilleur travail,  le plus complet que j’ai trouvé a été celui de Jean-Hugues Matelly en 2000 dans un article publié dans la revue  n° 8 «  Les Champs de Mars », cahier d’ études du Centre d’ Etudes en Science Sociales de la Défense.

Ayant obtenu l’autorisation de son auteur,  je  mets en copie  l’intégralité de son article. ( Pièce jointe )  https://sites.google.com/site/lagrognegend/je-refuse

Les références au statut des militaires ont changé. Celui de 2005 n’existait pas. Il est probable que ce chercheur compléterait aujourd’hui son travail avec d’autres exemples, d’autres références, mais dans son ensemble la situation n’a pas changé, n’a pas évolué, et ce n’est pas la commission des recours des militaires qui a amélioré quoi que ce soit.

Notons tout de même qu’à l’époque, en 2000,  un militaire pouvait s’exprimer,  pouvait observer une situation de façon critique et pouvait émettre une proposition concrète sans risquer la moindre sanction disciplinaire.

Nous mesurons mieux avec cet exemple précis, le recul de la condition militaire au cours de la décennie que nous venons de vivre.

Je pense nécessaire de déterrer la proposition Matelly, et je souhaite que d’autres associations viennent la soutenir, l’Adefdromil en particulier me semble bien placée pour cela.

Reprendre la démonstration de Matelly serait assez présomptueux de ma part, aussi je ne vais faire qu’en évoquer les grands traits pour vous laisser avec ce texte particulièrement complet.

L’auteur introduit son sujet par «  Je refuse », attitude possible d’un militaire qui vient de recevoir un ordre manifestement illégal. Puis il développe avec la précision d’un chirurgien tout ce qu’implique ce refus.

La première partie abordée est la place du subordonné vis à vis du supérieur qui lui donne un ordre manifestement illégal.

Hélas, les références à l’ancien statut ne changent rien et le toilettage de  2005 n’y a rien changé.

Matelly arrive à la conclusion partielle que le subordonné a les moyens théoriques de s’opposer à un ordre. Les choses ne sont pas si simples cependant.

 Le subordonné peut se défendre contre des sanctions directes, mais la hiérarchie possède des armes indirectes pour obtenir l’obéissance.

L’auteur en fait l’énumération dans son chapitre «  La permanence de sanctions informelles ou indirectes ».

Les militaires connaissent ces « retours de bâton ». Mutations non satisfaites, petites phrases assassines dans les notations littérales, mises au placard ou taches ingrates pleuvent sur celui qui s’est opposé à un ordre.

Un militaire a-t-il des recours contre ces sanctions indirectes ? C’est le volet suivant de la démonstration. « Des contre-pouvoirs incertains »

Matelly se lance ensuite dans la recherche de solutions pour donner au subordonné les véritables garanties dont il a besoin pour s’opposer à un ordre illégal.

Du numéro vert, proposé par une association de retraité, à l’obligation de l’ordre écrit, les solutions proposées sont insuffisantes.

Il faut agir avant l’exécution de l’ordre conclut ce chercheur. Il est nécessaire de faire intervenir un acteur extérieur. Il pense à la justice, mais le Procureur ne peut agir sans infraction pénale à réprimer.

Il faut que l’ordre illégal soit en lui-même  une infraction à la loi pénale.

L’auteur de l’article propose une rédaction pour une nouvelle incrimination :

« Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou en vertu de l’autorité dont elle est investie, d’ordonner l’accomplissement d’un acte manifestement illégal, cet ordre n’étant pas suivi d’effet en raison de circonstances indépendantes de sa volonté, est puni de… ‘

Mais tout cela, notre militaire Lybien l’ignorait et pourtant il a dit non.

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