«Cette détention relève de la schizophrénie judiciaire»

Jacques Trémolet de Villers : «Cette détention relève de la schizophrénie judiciaire»
20 Minutes | édition du 27.04.06

Interview de Jacques Trémolet de Villers, avocat de l’adjudant-chef Guy Raugel.

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Avec la libération du brigadier-chef Schnier, votre client est désormais le seul détenu pour le meurtre de Firmin Mahé…

C’est invraisemblable. Il y a dans ce dossier cinq mises en examen, et un seul détenu. Les deux motivations invoquées par la justice pour rejeter la demande de mise en liberté de l’adjudant-chef Raugel sont aussi nulles l’une que l’autre : empêcher les concertations, et trouble à l’ordre public national et même international. Le trouble à l’ordre public, juridiquement personne ne sait ce que c’est.

Des concertations sont toujours possibles, non ?

Non, c’est impossible. Ou alors on admet que Raugel, adjudant-chef, puisse exercer des pressions sur un colonel et un général. Ce qui est très inquiétant, c’est que cette précondamnation de mon client se dessine comme une solution très pratique pour tout le monde, depuis madame Alliot-Marie jusqu’au général Poncet et au colonel Burgaud.

Votre client pourrait faire pression sur des soldats pour obtenir des témoignages favorables…

Quelles sortes de témoignages ? Tout le monde a déjà témoigné. Un brigadier-chef a témoigné en disant que Raugel était odieux et jouait les chefs, mais il a dit qu’il ne pouvait pas imaginer qu’il ait agi sans ordre. Cette affaire n’est pourtant pas compliquée. Ou personne n’est en prison, ou on y met Burgaud et Poncet. C’est tout.

Pensez-vous que des pressions, politiques par exemple, aient conduit à ce maintien en détention ?

Je ne pense pas. Tout cela relève de la schizophrénie judiciaire, à laquelle on est hélas habitués. On vous dit : « Maître, c’est très simple, votre client a reconnu avoir tué Firmin Mahé. C’est la seule chose dont on est sûr. On ne va pas se casser la tête à chercher plus loin. » »

Recueilli par W. A. et S. C.

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