La mort du gendarme en Guadeloupe n’a guère ému, mais Chirac a écrit à la veuve

(France soir Samedi 25 février 2006)

Eclipsée par la mort barbare d’Ilan Halimi, l’agonie du gendarme Raphaël Clin sous les huées racistes d’une île de Guadeloupe, suscite depuis hier une indignation à la mesure du silence qui l’a entourée pendant dix jours.
Informé par la presse, Philippe de Villiers a été le premier à dénoncer « l’incroyable mutisme des médias et des politiques face à cet acte de racisme anti-blanc ». « Le silence des pouvoirs publics, comme des associations « anti-racistes » est une insulte à la mémoire de cet homme », a ajouté le président du MPF qui s’interroge : « Où sont les donneurs de leçons, les défenseurs des droits de l’homme ? Y aurait il deux poids deux mesures ».
Deux poids, deux mesures. C’est bien ce que se disent les gendarmes abandonnés à leur sort tandis que la classe politique toute entière se bousculait autour du cercueil de la victime du Gang des barbares. « Sur l’affaire Ilan, tout le monde y va. On met la kipa, on fait tout ce qu’il faut… constate cet OPJ dépité. Et pour un gendarme qui meurt, rien. »
Deux poids, deux mesures : c’est aussi l’avis du capitaine Michel Bavoil, président de l’Adefdromil, sans qui le quasi-lynchage de Marigot aurait été prestement escamoté. « Je suis indigné de ce qu’aucun membre du gouvernement, pas même le sous-secrétaire d’Etat aux Dom Tom, n’ait été envoyé sur place, martèle le président de l’association de défense des droits des militaires, indigné de ce que le président de la République n’ait pas envoyé le moindre communiqué. »

Un mot de la main du Président

En réalité, Jacques Chirac a réagi discrètement, adressant dès le 13 février une lettre et un petit mot de sa main adressé à la veuve. L’Elysée indique en outre que « jeudi soir, il a demandé à ce qu’on le mette en condition d’appeler Stéphanie Clin. »
Dans le sillage de Villiers, d’autres voix se sont élevées hier : celle, attendue, de Marine Le Pen, qui constate que « cette barbarie n’a entraîné aucune manifestation, ni aucune déclaration du gouvernement se scandalisant de cette ignominie » et exige « que cet acte raciste monstrueux soit traité avec au moins autant de célérité et de compassion que tous les autres. » Celle aussi de l’UMP Guy Tessier, président de la commission de la Défense à l’Assemblée Nationale pour qui les circonstances de la mort du gendarme Clin n’ont « rien à envier à la mort tragique et tout aussi inhumaine d’Ilan Halimi. »
Il s’en est tout de même trouvé un pour soutenir le contraire : Albert Flemming, le maire UMP de la partie française de Saint Martin, mutique au lendemain des faits, et qui maintenant s’apprête à porter plainte contre les media qui ont osé parler de racisme dans sa commune. « On est des gens fiers, et je n’accepterai pas qu’on soit traînés dans la boue. » Son adjoint Jean-Luc Hamlet n’est pas mal non plus qui explique sans rire que les « propos indignes » tenus autour de la dépouille du gendarme Clin ne doivent rien au racisme.
Cette dialectique, les « donneurs de leçons » chers à Villiers l’apprécieront sans doute à sa juste valeur. Si prompt lui aussi à porter plainte contre les média, le pourfendeur de caricatures et président du MRAP, Mouloud Aounit, s’est bien gardé de répondre à nos sollicitations. Et pas davantage à celles de l’Adefdromil.

Philippe Bouvier

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