Le haut comité d’évaluation de la condition militaire

Le nouveau statut général des militaires, promulgué le 24 mars 2005, dispose en son article 1 : « Il est institué un Haut Comité d’évaluation de la condition militaire, chargé d’établir un rapport annuel adressé au Président de la République et transmis au Parlement. La composition du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire et ses attributions sont fixées par décret ».

Le « décret du 17 novembre 2005 relatif au Haut Comité d’évaluation de la condition militaire » précisait les attributions, la composition, et, de façon plus générale, les conditions de travail et de fonctionnement.

Le 26 janvier 2006, soit dix mois après la parution du nouveau statut et plus de deux mois après le décret du 17 novembre, paraissait un décret « portant nomination au Haut Comité d’évaluation de la condition militaire ».

Comme toujours, l’Adefdromil, soucieuse de la défense des intérêts des militaires attire l’attention de ses adhérents mais aussi de tous ceux qui, nombreux, visitent régulièrement le site, sur les deux points suivants :

1 – La composition du Haut Comité.

Dans une information parue sur le site le mardi 27 septembre 2005, par le biais d’une question parlementaire, des sous-officiers souhaitaient « que des personnels expérimentés soient désignés pour siéger à ce Haut Comité », la ministre de la défense, en réponse fit savoir qu’il y aurait un officier général en deuxième section choisi sur proposition du ministère de la défense ».

Le décret du 26 janvier nomme un Président, cinq membres et deux suppléants : l’un pour remplacer le Président, l’autre pour remplacer l’officier général en deuxième section.

Le décret du 17 décembre fixe à sept membres la composition du HCECM.

Sauf erreur, à ce jour, la Dicod n’ayant rien fait savoir sur la composition de ce HCECM, l’Adefdromil va s’efforcer de vous informer sur ce haut comité dont vous soupçonnez toute l’importance.
Le décret du 26 janvier ne porte que « nomination des membres », mais quelles sont ces personnalités qualifiées ? Il est toujours intéressant d’en savoir plus.

Le président en titre est Mr Michel Franc, président de section honoraire au Conseil d’Etat, c’est-à-dire quelqu’un qui n’est plus en activité, sans doute par limite d’âge – Ronsard ne disait-il pas : « le vrai trésor de l’homme est la verte jeunesse »; selon Internet, le président, entre autres activités, serait président de la section française de l’institut international d’expression et inspiration française, et enseignerait aussi à l’ENA.

Le premier des cinq membres est Mr Jean Louis-Chaussende, président du comité stratégique de KPMG. L’Adefdromil n’a pu nettement casser le sigle (il s’agirait d’une société d’audit et de conseil en management), mais il est précisé sur internet que KPMG est « une coopérative de droit suisse qui coordonne un réseau de cabinets membres indépendants ». Selon d’autres sources – à vérifier – il aurait été membre du cabinet du Ministère de la défense, il y a une dizaine d’années.

Madame Elisabeth Hubert, « dirigeante d’une société de conseil », aurait été secrétaire général adjoint du RPR ; elle serait médecin et se serait investie dans le syndicalisme médical.
Selon le site Wikipedia, elle aurait été ministre de la santé publique et de l’assurance maladie dans le premier gouvernement d’Alain Juppé du 17 mai au 7 novembre 1995.

Mr Marcel Pochard, conseiller d’Etat, est président du conseil d’administration de la Réunion des Musées – (l’armée ne tend-elle pas à devenir un musée ?) ; il aurait exercé les fonctions de directeur général de la fonction publique et aurait plusieurs cordes à son violon.

Mme Rose Marie Van Lerberghe est directrice générale de l’assistance publique hôpitaux de Paris ; elle serait très occupée par ses relations avec les syndicats de l’APH ; elle trouvera peut-être un autre malade à la Défense, mais elle n’aura sûrement pas à se préoccuper des syndicats de personnels militaires.

L’amiral (2ème section) Alain Béreau, membre du conseil d’analyse de la société, fut membre de la commission chargée de révision du statut des militaires présidée par M Denoix de Saint Marc. Il en était vice-président et inspecteur général des armées.

Les suppléants sont au nombre de deux :

Mr Michel Pinault, conseiller d’Etat, suppléant de M. Franc, a été nommé membre de la cour de discipline budgétaire et financière au mois d’octobre 2005. Le général d’armée (2ème section) Louis Zeller, suppléant de l’amiral (2ème section) Alain Béreau, est ancien inspecteur général des armées, il a été directeur des personnels militaires de l’armée de terre.

Parmi les personnalités auditionnées par la commission de révision du statut général des militaires, on trouve : Mr Marcel Pochard, ancien directeur général de l’administration et de la fonction publique et le général de corps d’armée Louis Zeller, directeur du personnel militaire de l’armée de terre.

Après cette énumération, une question doit être posée : l’article 3 du décret du 17 novembre 2005 fixait à sept membres la composition du dit HCECM (1 président, 4 personnalités civiles qualifiées, 1 officier général en 2ème section et « le directeur général de l’institut national de la statistique ou son représentant ». Dans le décret du 26 janvier 2006, le directeur de l’INSEE n’est pas cité. Est-il membre de droit du fait de ce premier décret sans qu’il soit besoin de le rappeler dans le décret du 26 janvier?

2 – Les attributions du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire.

Madame le ministre de la défense, dans la réponse publiée sur le site de l’Adefdromil, précisait que le HCECM « pourra demander aux administrations et aux établissements publics de l’Etat tout élément d’information lui permettant nécessaire à l’exercice de ses missions. La composition et les prérogatives du HCECM traduisent donc la volonté du Gouvernement d’affirmer l’importance et l’indépendance de cet organisme ».

L’article 1er du statut général précise que ce HCECM est « chargé d’établir un rapport annuel adressé au Président de la République et transmis au Parlement ».

L’article 1er du décret du 17 novembre 2005 précise ainsi les attributions :
« Le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire a pour mission d’éclairer le Président de la République et le parlement sur la situation et l’évolution de la condition militaire. Il prend en compte tous les aspects favorables ou défavorables, juridiques, économiques, sociaux, culturels et opérationnels susceptibles d’avoir une influence, notamment sur le recrutement, la fidélisation, les conditions de vie des militaires et de leurs familles et les conditions de réinsertion dans la société civile. »

L’article 2 ajoute que « dans son rapport annuel, le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire formule des avis et peut émettre des recommandations ».

Selon l’article 5 :
« A la demande du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire, les administrations de l’Etat et les établissements publics de l’Etat lui communiquent les éléments d’information et les études dont ils disposent et qui lui apparaissent nécessaires à l’exercice de ses missions », disposition annoncée par le ministre de la défense en réponse à la question posée en août 2005..

L’article 6 assure l’indépendance, le secrétaire général, un membre du contrôle général des armées, ne participe pas aux débats.

Il est normal qu’un organisme de ce genre, composé en très grande partie de personnalités,étrangères au monde des armées ait, pour reprendre une expression redevenue à la mode, une « feuille de route » c’est-à-dire un ordre du jour ou un sujet de mission bien délimité.
C’est du reste la raison pour laquelle, le président de l’Adefdromil, dès le 23 novembre 2005 a écrit, comme vous pouvez le lire sur le site, à Mr le Président de la République, chef des armées en application de l’article 15 de la Constitution, pour lui demander que l’une des premières missions de cet organisme soit d’examiner « la situation des droits à rémunération des militaires au regard de ce qui se passe dans la fonction publique ».
Cette demande, fondée, est d’autant plus justifiée que, ainsi que vous le savez, les personnels militaires n’ont pas le droit d’association pour assurer la défense de leurs intérêts professionnels, n’ont pas le droit de se syndiquer et sont donc de ce fait – aujourd’hui comme hier – tributaires des syndicats de la Fonction publique. Or vous le savez on ne parle plus de la Fonction Publique mais des fonctions publiques, il est donc indispensable de faire le point et peut-être toute la lumière sur le « classement hiérarchique des grades et emplois des personnels civils et militaires de l’Etat relevant du régime général des retraites » établi par le décret n°48-1108 du 10 juillet 1948. Les anciennes attributions du président sont de nature à en faire l’homme le plus apte à débrouiller cet étonnant écheveau.

La rédaction de l’Adefdromil

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