Général PONCET : avis d’internautes

Les forums sur l’internet ont de particulier leur indépendance par rapport à la pensée officielle. C’est dire qu’ils peuvent s’en démarquer cruellement.

L’affaire de Poncet couvrant par conviction l’exécution d’un Ivoirien sanguinaire n’échappe pas à cette nouvelle composante de l’information, mettant à mal le formatage habituel, quand ce n’est pas leur complaisance réciproque, des pensées médiatique et politique.

Il ne faudra donc pas s’étonner de l’infime proportion d’internautes adhérant à la présentation ministérielle selon laquelle tout le monde il doit être beau, tout le monde il doit être joli.

L’éthique militaire – ce pôle d’excellence à ne pas discuter – ne peut tolérer aucun manquement. Certes, que ne l’a-t-on entendu ces temps derniers.

De là à se féliciter, comme pour étayer un édifice fragile, que les sanctions prises dans l’affaire Poncet au mépris de la perception des hommes de terrain, firent l’unanimité chez les Généraux, cela relève tout simplement du bidonnage. Ou du miracle, quand il s’agit de faire parler les muets.

La majorité des internautes ont du reste flairé qu’il y avait là un forcing suspect.

Tout en se ralliant naturellement au camp des défenseurs de cette éthique, l’Adefdromil leur doit d’apporter un éclairage complémentaire à ce tableau idyllique.

A commencer par le syndrome de la paillotte.

Cet état du non-dit enseigné dans les Ecoles, qui veut qu’un Général comme un Préfet, Bonnet ou autre, aient été formés pour obéir aux mêmes immanences sans que l’ordre n’ait à être donné. C’est du reste selon leur faculté à se couler sans erreur dans la pensée du chef qu’ils sont promus.

Ces gens-là savent très bien ce qu’il faut réussir pour ne pas déplaire au-dessus. Ils savent aussi que cela implique expressément de ne pas faire de vagues. Sinon c’est le lâchage, puis le lynchage assurés. Quelquefois même, ils auront à déjouer le piège leur étant tendu à cette occasion. Affaire réussie, rien n’est encore enterré. Le vent peut tourner. Une archive est comme une mine dormante : elle explose en cas d’imprudence.

Il se trouve qu’en la circonstance l’analogie avec la paillote « Chez Francis » ne se limite pas à l’ordre virtuel. L’opération, dans un cas comme dans l’autre, s’est faite dans la plus pure tradition des Pieds Nickelés. Sur la plage les Gendarmes laissent leur trace de manière inquiétante.

Dans le VBL, un sac en plastique pour étouffer le blessé laisse une trace inquiétante quant à la légitime défense.

De nombreux internautes ne semblant pas particulièrement versés dans la chose militaire doutent cependant qu’un Général et un Colonel aient pu s’aventurer en pareil manichéisme sans de sérieuses garanties. Notamment celle de leur autonomie sur le terrain, qui ne doit pas leur être rappelée de Paris pour un oui, ou pour un non.

Devant leur amateurisme sur ce coup, ils leur rappellent les vertus de la corvée de bois (confondant malencontreusement une guerre « menée par une Majorette et son souteneur en fin de carrière », avec l’interposition dont il s’agit en Côte d’Ivoire). Quand l’affaire n’est pas de leur niveau ajoutent-ils, le parapluie bulgare ou la boîte de cigares des services spéciaux sont là pour ça.

Côté internautes hostiles à la version soft, c’est-à-dire la majorité d’entre eux, la charge est rude.

A qui profite le crime, exposent-ils.

A ceux qui auraient avantage à témoigner de leurs bonnes moeurs auprès de Gbagbo. A charge pour celui-ci de renvoyer l’ascenseur dans l’instruction de la tuerie de l’Hôtel d’Ivoire de novembre 2004, sur un ordre obtenu par Poncet et cette fois bien venu de Paris… qui saura s’en souvenir.
A ceux qui utilisent le Secret Défense, pour plaire à Ismaël Omar Guellel dans l’assassinat du Juge Borrel à Djibouti, mais qui ne l’utilisent pas à Abidjan dans l’assassinat de Firmin Mahé, pour ne pas déplaire à l’ami Laurent. Ou qui, toujours pour plaire à Abidjan, cette fois l’utilisent pour ne pas avoir à donner les raisons de la libération des mercenaires pilotes ayant tué 9 soldats à Bouaké. Soldats ni assassins, ni violeurs, ni multirécidivistes, mais Français, il est vrai. C’est en dénonçant l’usage dévoyé de ce Secret Défense que la Présidente du tribunal aux affaires militaires rend son tablier.

A ceux qui poussent des cris de vierge effarouchée pour l’élimination approuvée par son village d’un assassin violeur multirécidiviste, ou à ceux qui en écharpe Hermès n’empêchent pas le Clémenceau d’aller semer la mort chez les désamianteurs indiens. A moins que ce ne soient les mêmes. Comme quoi, face à un accident du travail, l’indignation peut être à géométrie variable.

A ceux qui, dans la grande tradition militaire, mettent en prison le lampiste ne pouvant, dans le feu de l’action, discuter de l’absurdité ou de l’illégalité d’un ordre, mais qui prennent grand soin de maintenir en liberté le(s) donneur(s) d’ordre. Or chacun sait que dans une société aussi hiérarchisée que l’institution militaire, le donneur d’ordre est davantage responsable que celui qui l’exécute.

Comme dans tout bon polar, ou mauvais comme présentement, « cherchez la femme » est la réponse de ces internautes. Ils s’étonnent incidemment qu’une autorité, responsable du choix et des erreurs de ses subordonnés, puisse se hausser du col sur une affaire dont la vocation était de rester banale, mais qui fut spectaculairement gonflée pour glaner quelques points d’estime, tant à l’Elysée que dans la course à l’Elysée.

Sans tous demander sa démission, les internautes auraient souhaité davantage de réalisme dans l’étalage des vertus du militaire en opération, et de mesure dans la déclinaison de celles d’un Ministre en représentation.

A l’appui de la subjectivité des notions d’absurdité et d’illégalité d’un ordre, l’exemple suivant, trouvé dans un forum, recentrera l’affaire sur ses ressorts psychologiques.

Dans le djebel, par radio depuis son PC installé en bas d’un relief, un Capitaine donne à ses hommes l’ordre de lui « descendre » les fellagas survivants d’un l’affrontement qui vient d’avoir lieu en haut de celui-ci. La suite est connue.

Pour la course à l’Elysée, ce ne sera pas un ordre, mais une supplique que l’on adressera. Celle de Saint Firmin : « Ne roulez pas trop vite, prenez votre temps, vous m’avez compris ».

Ces avis d’internautes peuvent déplaire. Soit parce qu’ils visent juste, soit parce qu’ils sont à côté de la plaque. En voici au moins un qui fera l’unanimité. Dernière intox en date, le Mahé exécuté ne serait pas le Mahé recherché. Moyennant quoi, le Général Poncet devient chargé de mission à la Direction du Renseignement Militaire. Cela ne s’invente pas…

La France au Ruanda qui commence à raconter, cela devient tout doucement Poncet. La France dans la tuerie de l’Hôtel Ivoire, encore Poncet. La France dans l’anéantissement de « l’aviation » ivoirienne à Yamoussoukro en représailles au bombardement des soldats français à Bouaké, toujours Poncet.

Il devenait urgent de préparer l’opinion à admettre que Poncet est un menteur qui induit ses supérieurs en erreur.

En résumé, les internautes si habitués aux contorsions du Pouvoir, sont très indisposés quand ils le voient se refaire un hymen sur l’échine de notre Armée.

Ils le seraient davantage s’ils apprenaient que cette servitude est inscrite en lettres d’or sur le fronton de nos Ecoles Militaires.

Que peut-on raisonnablement attendre d’autre, de la part de Dirigeants qui préfèrent Trafalgar à Austerlitz ?

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