Quand la commission de la défense nationale reconnaît le rôle éminent joué par Michel Bavoil

Ce n’est pas d’usage courant, aussi il faut le relever de suite : dans son rapport sous n°1969, la commission de la défense, présidée par le député Guy Tessier, reconnaît le rôle fondamental joué par Michel Bavoil en ce qui concerne cette mesure qui a fait tant de ravage dans notre armée : le conditionnalat.

Adhérents et sympathisants de l’Adefdromil, pour que vous ne soupçonniez pas une manipulation, tant la réforme du statut a tendance à se transformer en mascarade, il est indispensable que vous preniez plutôt connaissance de ce qu’écrit la dite commission de la défense dans le rapport cité, pages 25 et 26, et vous pourrez apprécier à sa juste valeur et en connaisseurs l’entreprise de dépoussiérage dont Michel Bavoil fut le courageux initiateur :

« Dépoussiérer les dispositions désuètes ou inapplicables

[…] C’est dans la gestion du personnel que se révèlent les difficultés les plus grandes pour l’application des dispositions statutaires, ce qui a pu conduire les armées à recourir à des solutions palliatives à la régularité plus que douteuse, telle que le conditionnalat, pratique qui consiste à promouvoir un officier au grade supérieur en échange d’une lettre de démission non datée.
Il convient de s’interroger sur la pertinence des principes fondamentaux posés en 1972, qu’ils aient innové ou repris des dispositions anciennes : bien fondé de la notion de créneaux d’avancement, des limites d’âge et de service, de la distinction faite entre les différents corps d’officiers au sein de chacune des armées, des conditions d’accès au statut de carrière des officiers comme des sous-officiers ou des dispositions particulières relatives aux officiers sous contrat.
Les progrès certains apportés par le statut de 1972 ont eu pour conséquence d’accroître la rigidité de la gestion, des considérations sociales s’étant greffées aux intentions du législateur. Le conditionnalat constitue l’exemple le plus emblématique de ce phénomène.
Instauré pour faire progresser le plus grand nombre et éviter de placer des officiers hors créneaux, il a conduit à la création d’une situation juridique malsaine généralisée : 98% des officiers généraux sont aujourd’hui placés dans cette situation, condamnée par le Conseil d’Etat à l’occasion de l’arrêt Bavoil rendu le 8 novembre 1990
». Fin de citation.

Cette solution du conditionnalat était l’une de ces « spécificités » de l’armée ; Mr Denoix de Saint Marc, lors de son audition par la commission de la défense a souligné que « le conditionnalat était, à l’évidence, illégal » ; quel dommage que personne ne l’ait vu ou n’ait voulu le voir à temps et que la commission présidée par la dite personnalité n’ait pas voulu se pencher sur les autres anomalies de ce statut de 1972 face à l’évolution de la société et sur les pratiques des directions de personnels

Voilà donc ce que dit cette docte commission qui, malheureusement, n’a pas fait l’effort de tenter de rapprocher la fonction militaire de la fonction publique et voue ainsi la fonction militaire aux soins « palliatifs » permanents alors que, ne l’oubliez pas, les soins palliatifs sont la plupart du temps le signe d’une mort annoncée. Rappelons que le rapport de la commission présidée par M. Denoix de Saint Marc n’avait pas même cherché à comparer le statut des militaires aux autres statuts de la fonction publique et a, ainsi durablement contribué, à faire des militaires une catégorie de plus en plus bâtarde à l’intérieur de la nation. C’est ainsi que le projet de statut reconduit les dispositions périmées de l’article 10 du statut du 13 juillet 1972, refuse de poser clairement la question du classement des agents de l’Etat dans une unique grille de rémunération officialisée par le décret de juillet 1948, renforce une spécificité injustifiée et enferme les militaires dans le carcan d’une prétendue évolution historique totalement décalée par rapport à l’évolution de la société.
Les membres de l’Assemblée nationale ayant voté à une très forte majorité en octobre 1997 la suppression de facto tout autant que la suspension de jure du service national, il leur revient de placer les militaires professionnels sur un pied d’égalité – sur un socle commun, dit le rapport – avec l’ensemble des agents de l’Etat constituant la fonction publique et, si possible, de permettre à ces militaires professionnels d’être des citoyens comme les autres tout en n’exerçant pas le métier de tout le monde. C’est là le sens du combat que Michel Bavoil a eu le courage et la force de soutenir. L’Assemblée nationale a bien fait de lui rendre hommage même si ce n’était pas, compte tenu du contexte, son intention.
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