Les familles de militaires à la loupe de la sociologie

C’est un rapport fort utile qu’ont livré à la direction des ressources humaines du ministère de la Défense la sociologue Carine Le Page et le statisticien Jérôme Bensoussan. Titré Les militaires et leur famille, ce copieux document de 172 pages visite en profondeur un aspect mal connu de ce groupe social qui fait encore, par bien des aspects, figure d’énigme. Bourrée de statistiques, de tableaux et de chiffres, cette étude, qui doit être publiée la semaine prochaine, s’intéresse successivement à la situation conjugale des militaires, à leurs enfants et aux modes de garde qui leur sont réservés. Les structures familiales dans lesquelles vivent les militaires sont également étudiées, leurs conjoints sont passés à la loupe et leurs logements au microscope. Sans oublier leurs ressources, leurs diplômes et leur origine familiale. Bref, une somme !

La première leçon que l’on peut tirer de la lecture du document, c’est que les militaires sont très largement des Français comme les autres, et se différencient pour l’essentiel par leur âge (60 % ont moins de 35 ans) et leur sexe (85 % sont des hommes). Leur vie familiale est sans surprise : 75 % vivent en couple, mais ce chiffre monte à 85 % après 35 ans. Rien de surprenant non plus dans le mode de relation du couple : 70 % des jeunes militaires vivent en concubinage et à partir de 30 ans, 66 % des couples sont mariés. À partir de 45 ans, plus de 90 % des hommes militaires et 80 % des femmes sont parents. À en croire l’étude, les couples sont majoritairement stables : « Le modèle familial dominant est composé des deux conjoints et de leurs enfants (65 %), vient ensuite celui restreint au couple (26 %). Les autres formes familiales composées soit d’un seul parent et de ses enfants (3 %), soit d’un couple avec des enfants issus d’une précédente union (6 %) sont largement minoritaires. »

Les divorces en augmentation

La jeunesse des militaires est une composante imposante de leur statut familial, qui évolue avec l’âge : « Plus les militaires appartiennent à une catégorie hiérarchique élevée, plus ils sont âgés, et moins souvent ils sont célibataires. Ainsi, moins d’un quart des officiers se trouve dans cette situation, contre plus d’un tiers des sous-officiers et plus des trois quarts des militaires du rang. » On notera aussi que les familles nombreuses (quatre enfants et plus) sont en nombre plus important au service de santé des armées, où 9 % des militaires concernés sont parents de familles nombreuses, contre 5 % dans l’armée de terre, 6 % dans la marine, 3 % dans la gendarmerie et 2 % dans l’armée de l’air.

S’agissant du Pacs, les auteurs notent que « parmi les unions enregistrées pour l’année 2007, 36 % des militaires se sont pacsés et 64 % se sont mariés ; en 2008, les proportions sont proches, passant à 41 % pour le Pacs et 58 % pour le mariage. Comme pour le reste des Français, ces deux types d’union sont désormais presque aussi fréquents l’un que l’autre et dans les deux populations, on se rapproche d’un Pacs pour deux mariages. Le rapprochement des régimes fiscaux du Pacs et du mariage en 2005 est de nouveau une piste explicative. Mais une dimension sociologique manque dans cette analyse : le nombre de Pacs conclus entre personnes du même sexe. Il aurait été intéressant de connaître la similarité de ce chiffre, ou pas, avec celui concernant reste de la population. Il semble que la rumeur concernant le nombre des divorcés dans l’armée française, qui serait en augmentation notamment en raison de la multiplication des opérations extérieures, prenne quelque consistance : 4 % des militaires étaient divorcés en 2001. Et 6 % en 2009. Une augmentation presque de moitié, c’est énorme !

Origines familiales

Autre donnée intéressante : le statut professionnel des conjoints : « Plus la catégorie hiérarchique des hommes militaires est élevée, moins leurs conjointes exercent un emploi. L’écart est particulièrement net entre les conjointes d’officiers supérieurs et celles des militaires des autres catégories : la moitié d’entre elles seulement travaille, contre les deux tiers des femmes d’officiers subalternes, et plutôt les trois quarts au sein des autres catégories. La part de femmes au chômage restant relativement similaire d’une catégorie à l’autre, c’est donc la part d’inactives qui augmente de façon sensible. »

Arrêtons-nous aussi sur l’origine des militaires : pour plus de 30 % d’entre eux, un membre au moins de leur famille d’origine est lui-même militaire. Dans ce tiers de militaires, 63 % ont un père militaire, et 53 % de ceux qui sont membres d’une fratrie ont un frère ou une soeur dans le même cas : « Quelle que soit l’armée, un tiers des militaires a évolué dans un environnement militaire (un des membres de la famille est militaire). De même, que le militaire soit officier supérieur ou militaire du rang, la proportion de militaires présents dans l’environnement familial ne se distingue pas de manière significative, variant entre 31 % et 39 % d’une catégorie hiérarchique à l’autre. »

Des insatisfactions

L’étude se penche aussi sur les « insatisfactions qui…

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