Gendarmerie, pressions et … vérité

La presse se fait actuellement l’écho de la comparution du gendarme Olivier RENAUD devant la chambre militaire du tribunal correctionnel de BORDEAUX. Que lui est-il reproché ? La distribution de tracts le 28 mai 2002 dans les rues de LIBOURNE, tracts dénonçant des « pratiques » contraires aux droits de l’homme en GUYANE, réalisées par un supérieur  hiérarchique, « pratiques » confirmées par un autre sous-officier affirmant : « j’ai rarement vu un tel contexte de violence, de vexations, de jeux stupides ».

Ancien sous-officier de gendarmerie, si je condamne cette distribution, je peux comprendre la réaction d’un être humain, las de pressions, de harcèlement moral ayant pour seul but : celui d’étouffer des faits pouvant être de nature à porter atteinte au « déroulement de carrière » de la hiérarchie. Le  « pas de vagues, sinon … » est une expression que l’on rencontre souvent dans le milieu militaire.

Olivier RENAUD a eu le mérite, je dis bien le mérite, et le courage de dénoncer des faits répréhensibles commis en 1996 en Guyane par des gendarmes. C’est tout à son  honneur et personnellement je ne peux que l’en féliciter, car s’il est des militaires qui se doivent de respecter la loi, ce sont bien les gendarmes. Malheureusement sa hiérarchie ne l’a pas suivi, bien au contraire, et … les  deux enquêtes internes n’ayant pas abouti, il fut sanctionné. Triste épilogue pour un homme ayant fait preuve d’honnêteté.

Pour connaître la maison gendarmerie, je ne suis pas étonné du résultat négatif des enquêtes. Soit elles ont été conduites sur un plan interne à la Guyane et la hiérarchie en place a voulu protéger son déroulement de carrière, soit par les enquêteurs de la Direction Générale dont la véritable partialité est pour moi sujette à caution car les enquêteurs (officiers, sous-officiers) de ce service  ne sont  généralement pas des personnels en fin de carrière, donc parfois plus aisément influençables  car … il ne faut pas porter atteinte au prestige de l’Arme …

Cette affaire me rappelle celle de l’Arsenal de TOULON objet d’un « savoir-faire hiérarchique » éloquent.

Que penser également de l’attitude de cette même hiérarchie dans l’affaire des ripoux de  RIVESALTES jugée en 1998 suite à une enquête effectuée par les « limiers » de la Direction Générale. Lors de l’audience correctionnelle devant le Tribunal de PERPIGNAN, l’un des gendarmes avait expliqué à la Présidente qu’en 1994, deux ans avant la révélation de l’affaire, il avait dénoncé les dérives de l’adjudant-chef à son supérieur hiérarchique direct, le capitaine de NARBONNE. A la suite de cet entretien, la notation du gendarme avait été rectifiée à la baisse. Dans son témoignage, ce même sous-officier affirmait : « cette affaire n’aurait pas dû avoir lieu si chacun avait fait son travail … Trois hommes sont responsables, le colonel d’ORANGE, siège du commandement des pelotons autoroutiers de la région, le capitaine de NARBONNE et l’adjudant-chef ici présent qui commandait le peloton de RIVESALTES … Ces officiers couvraient l’adjudant-chef et se permettaient de venir se ravitailler au peloton. C’était une véritable base de ravitaillement ».

Ce témoignage relaté par la presse le 23 avril 1998 est d’autant plus accablant pour l’institution gendarmerie qu’apparemment, sur les 24 personnes appelées à rendre des comptes à la justice, 23 étaient des gendarmes ou anciens gendarmes de ce peloton d’autoroute. Mais faisons confiance …!

Dissimuler des faits répréhensibles, être partial dans des enquêtes internes, exercer des  pressions, … j’ai l’impression, hélas, que c’est bien la triste réalité.

Signé : Carmeno

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