Sort des sapeurs-pompiers militaires et civils et des services départementaux d’incendie et de secours

Question écrite n° 12716 de M. Stéphane Ravier (Bouches-du-Rhône – NI)

publiée dans le JO Sénat du 24/10/2019 – page 5360

M. Stéphane Ravier attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur le sort des sapeurs-pompiers militaires et civils et des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS).

Multiplication des interventions de secours à personnes, multiplication des agressions verbales et physiques, matériels et tenues obsolètes, stagnation des rémunérations, suppressions de postes, financement insuffisant des SDIS. Les discours et les médailles ne suffisent pas à soutenir les personnes qui mettent en danger leur vie ou la sacrifient pour en sauver d’autres.

Les sapeurs-pompiers civils ou militaires ne doivent pas être la variable d’ajustement des politiques d’austérité et doivent être légitimement reconnus par notre société. Si les sapeurs-pompiers militaires de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) et du bataillon des marins-pompiers de Marseille (BMPM) n’ont pas le droit de grève ou de manifestation, leur sort est également préoccupant.

Les incendies spectaculaires de l’usine Lubrizol à Rouen, d’une pépinière d’entreprises à Villeurbanne et de la cathédrale Notre-Dame de Paris rappellent le rôle essentiel et actuel de nos forces d’intervention face à de telles menaces.

Les pompiers sont en première ligne face à l’ensauvagement de la société et subissent l’insécurité croissante alors qu’ils ont pour seule mission d’aider et de sauver les personnes en danger.

Il lui demande quelles sont les mesures concrètes prévues pour la revalorisation de la prime de feu fixée à 19 % du salaire de base, alors que la prime de risque des policiers et gendarmes l’est à hauteur de 28 %. De plus, il demande à connaître les dispositions législatives prévues par le Gouvernement pour inverser la courbe des agressions au cours d’interventions.

Il lui demande également de lui fournir les éléments qui permettraient de flécher une dotation spécifique de fonctionnement conséquente aux départements pour le financement des SDIS, des personnels et des moyens.

Réponse du Ministère de l’intérieur

publiée dans le JO Sénat du 12/12/2019 – page 6150

La sécurité civile française repose sur un modèle qui a démontré sa pertinence et sa robustesse. Par son organisation et son implantation territoriale cohérente, notamment dans les zones rurales, notre modèle permet aussi bien de faire face aux accidents du quotidien, que d’affronter les crises exceptionnelles. Ce modèle, qui repose sur l’engagement des 240 000 sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, doit être conforté. Les organisations syndicales représentant les sapeurs-pompiers professionnels ont exprimé le souhait que la profession de sapeurs-pompiers soit davantage valorisée. Le Gouvernement a parfaitement conscience de l’importance de notre modèle de sécurité civile et du rôle déterminant qu’y jouent les sapeurs-pompiers, parfois au péril de leur vie. Premièrement,  concernant la pression opérationnelle, les sapeurs-pompiers sont au cœur de la société et en vivent, directement, tous les changements et bouleversements : le vieillissement de la population, le manque de médecins, la disparition des solidarités de proximité. Ils prennent donc une part croissante de la gestion des conséquences de ces phénomènes sociétaux. Dans ce contexte, le ministère de l’intérieur et le ministère des solidarités et de la santé ont engagé, il y a un an, un cycle de travail, qui s’est traduit par l’adoption de six mesures, initiées à l’automne 2018 et complétées par une nouvelle vague décidée en juillet dernier, à savoir : tendre vers la généralisation des coordonnateurs ambulanciers au sein des services d’aide médical urgente (SAMU) ; réduire l’attente des sapeurs-pompiers aux services d’urgence ; étudier la possibilité d’effectuer certaines missions à deux sapeurs-pompiers ; dynamiser la concertation entre les services d’incendie et de secours (SIS), les SAMU et les agences régionales de santé (ARS) ; se tenir mutuellement informés des évolutions de moyens en place sur le territoire, notamment en ce qui concerne l’évolution de la cartographie hospitalière ; étendre le champ des gestes techniques de secourisme autorisés aux sapeurs-pompiers. Parmi ces mesures, la généralisation des coordonnateurs ambulanciers devrait permettre dès 2020 une meilleure gestion des transports sanitaires urgents et diminuer le recours aux sapeurs-pompiers pour ce type de mission. En parallèle, des travaux de révision du référentiel SUAP-AMU du 25 juin 2008 sont engagés, en débutant par l’évaluation de la mise en œuvre des départs réflexes et des protocoles infirmiers de soins d’urgence (PISU) ainsi que la gestion des carences ambulancières. La réunion qui s’est tenue le 12 novembre 2019 au ministère de l’intérieur, en présence du cabinet de la ministre des solidarités et de la santé, des représentants des employeurs et des organisations syndicales, a permis de faire le point sur l’état d’avancement de ces derniers. Les premiers résultats sont, d’ores et déjà, perceptibles : les statistiques des dix premiers mois de l’année indiquent une légère baisse de l’activité opérationnelle SUAP, alors que ces dix dernières années avaient connu une hausse spectaculaire et continue de plus de 50 %. Deuxièmement, concernant les agressions dont les sapeurs-pompiers sont victimes, le Gouvernement apporte une réponse ferme face à ces violences visant les femmes et les hommes qui garantissent, chaque jour et sur l’ensemble du territoire, la continuité opérationnelle du service public de protection et de secours à la population. En ciblant les sapeurs-pompiers, qui font vivre au quotidien les valeurs et les principes républicains fondés sur la solidarité et l’entraide, c’est la République que l’on atteint. C’est donc à la République de répondre fermement et de défendre ceux qui exposent chaque jour leur vie pour sauver celle des autres. Dans ce cadre, le Gouvernement déploie une série de mesures. Le renforcement des protocoles opérationnels, qui permettent dans chaque département : une meilleure coordination entre policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers, pour l’intervention dans les secteurs urbains sensibles (points de regroupement, itinéraires sécurisés et règles d’engagement adaptées, avec notamment l’appui éventuel de la police ou de la gendarmerie) ; la mise en place d’un système d’évaluation régulière et partagée ; la formation des sapeurs-pompiers à la négociation et aux techniques de défense simple (évitement, esquive, dégagement) face à une personne agressive. Désormais, tous les départements disposent d’un protocole opérationnel renouvelé et renforcé. L’expérimentation du port des caméras individuelles par les sapeurs-pompiers, est entrée dans sa phase concrète. Dix SIS ainsi que la brigade de sapeurs-pompiers de Paris se sont engagés dans cette expérimentation qui a un double objectif : prévenir les agressions par le caractère dissuasif du port de caméras, et constituer des éléments de preuve. Le dépôt de plainte est systématique et facilité. Face à ces agressions, la main de l’État ne tremblera pas pour rechercher les auteurs de ces agressions, les soumettre à la Justice et les sanctionner pénalement : la réponse pénale doit être ferme et exemplaire. Troisièmement,  enfin, le caractère dangereux du métier et des missions qu’exercent les sapeurs-pompiers est notamment reconnu par le classement en catégorie active des emplois de sapeurs-pompiers professionnels et par un régime indemnitaire spécifique qui leur est alloué. Ainsi, le fait d’occuper un emploi de catégorie active ouvre droit, pour les sapeurs-pompiers professionnels, à un départ anticipé à la retraite par rapport à l’âge normal et à une bonification, pour la liquidation de leur pension, égale à un cinquième du temps passé en catégorie active. De même, les sapeurs-pompiers professionnels perçoivent une indemnité de feu de 19 % du traitement soumis à retenue pour pension, dont le montant est entièrement pris en compte dans le calcul de la pension de retraite, à la différence des éléments de régime indemnitaire des autres fonctionnaires. La demande de revalorisation de cette indemnité de feu, portée par les organisations syndicales, est une décision des collectivités employeuses, dans le cadre juridique que définit l’État. C’est pourquoi un dialogue entre les employeurs des sapeurs-pompiers et les organisations syndicales a été engagé, notamment sur ce point. Le Gouvernement prendra acte des propositions que porteront les représentants des présidents des conseils d’administration des SIS et des principaux financeurs de ces établissements publics (conseils départementaux, communes et établissements publics de coopération intercommunale – EPCI) et déclinera dans les textes réglementaires nécessaires les éléments issus des négociations en cours.

Source: JO Sénat du 12/12/2019 – page 6150

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