Les droits à pension de retraite et de réversion des combattants des anciennes colonies (Par Maître Aïda MOUMNI)

Les anciens combattants des pays ou territoires ayant appartenu aux anciennes colonies ou ceux ayant été placés sous tutelle ou protectorat, ont droit à une pension de retraite de même que les conjoints survivant peuvent prétendre à une pension de réversion sous certaines conditions.

Le droit à pension de retraite et de réversion consacré

L’article 211 de la loi de finances du 29 décembre 2010 prévoit que :

« (…) les pensions civiles et militaires de retraite et les retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l’Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants. (…) / V. – Les demandes de pensions présentées en application du présent article sont instruites dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre et par le code des pensions civiles et militaires de retraite. (…) / VIII. – Un décret fixe les modalités d’application du présent article, notamment les mesures d’information des bénéficiaires ainsi que les modalités de présentation et d’instruction des demandes mentionnées aux III, IV et V./ (…) »

Ces dispositions précisent que les retraites de ces anciens combattants sont bien prises en compte et sont régies par le code des pensions civiles et militaires français.

Cette pension de retraite peut être liquidée dès lors que le ressortissant étranger justifie d’un engagement militaire d’une durée de deux ans.

La demande de liquidation de la pension de retraite n’est pas enfermée dans un délai toutefois, le service des retraites de l’Etat peut opposer la prescription quadriennale aux arriérés de pension pour la période antérieure à 4 ans sauf en cas de faute imputable à l’administration.

le droit à pension de réversion pour les conjoints survivants

Quant au conjoint survivant (veuve ou veuf), celui-ci peur prétendre à une pension de réversion de la pension de retraite du militaire décédé.

L’article L 39 du code des pensions civiles et militaires prévoit que le conjoint survivant y a droit  :

« a) Si le fonctionnaire a obtenu ou pouvait obtenir une pension accordée dans le cas prévu à l’article L. 4 (1°), que depuis la date du mariage jusqu’à celle de la cessation de l’activité du fonctionnaire, celui-ci ait accompli deux années au moins de services valables pour la retraite, sauf si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage antérieur à ladite cessation ;

  1. b) Si le fonctionnaire a obtenu ou pouvait obtenir une pension accordée dans le cas prévu à l’article L. 4 (2°), que le mariage soit antérieur à l’événement qui a amené la mise à la retraite ou la mort du fonctionnaire.

Toutefois, au cas de mise à la retraite d’office par suite de l’abaissement des limites d’âge, il suffit que le mariage soit antérieur à la mise à la retraite et ait été contracté deux ans et au moins avant soit la limite d’âge en vigueur au moment où il a été contracté, soit le décès du fonctionnaire si ce décès survient antérieurement à ladite limite d’âge.

Nonobstant les conditions d’antériorité prévues ci-dessus, le droit à pension de réversion est reconnu :

1° Si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage ;

2° Ou si le mariage, antérieur ou postérieur à la cessation de l’activité, a duré au moins quatre années.

Ainsi, le conjoint survivant d’un ancien combattant ressortissant des anciennes colonies peut demander à bénéficier d’une pension de réversion même en l’absence de la liquidation de la pension de retraite précédemment par son conjoint avant son décès.

Il convient surtout de justifier d’un mariage contracté avant le placement en retraite du bénéficiaire de la retraite militaire.

Pour les veuves dont les époux n’ont pas demandé le bénéfice de leur retraite, elles pourrons bénéficier d’une pension de réversion après avoir justifié que leur mariage a été contracté avant le décès notamment.

la preuve du mariage peut se faire par tout moyen

Le Conseil d’Etat a rappelé dans un arrêt en date du 27 novembre 2019 s’agissant des pièces justificatives à produire pour le traitement de la demande que conformément à l’article 47 du code civil  « tout acte d’Etat civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ».

Ainsi, et de ce chef il a pu en déduire que :

Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que:

« (…) pour justifier de son mariage, Mme A… a produit une ordonnance rendue le 27 janvier 2006 par laquelle un tribunal tunisien avait ordonné la transcription sur les registres d’état-civil de son mariage avec M. A…, ainsi qu’une copie de l’acte de mariage extrait de ce registre et une copie intégrale de son acte de naissance comportant une mention marginale de ce mariage. En écartant le caractère probant de ces pièces au seul motif qu’un acte recognitif de mariage établi postérieurement au décès de l’ancien militaire ne suffisait pas à apporter la preuve de la célébration du mariage de la requérante, alors qu’aucune disposition citée au point 4 ne permettait de se fonder sur cette seule circonstance, le tribunal administratif de Poitiers a commis une erreur de droit. Mme A… est dès lors fondée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, à demander l’annulation du jugement attaqué (…) ».

En effet, il peut se produire parfois notamment en raison de l’ancienneté des faits que des pièces puissent être perdues.  A cet effet, il est admis qu’en cas de perte des registres d’état civil, la preuve puisse être rapportée soit par témoins soit par jugement en vue d’établir la réalité de ce fait.

Le Conseil d’Etat rappelle ainsi par cet arrêt que le droit à pension de réversion ne saurait être limité dès lors que le demandeur est de bonne foi et rapporte la preuve exigée par le code des pensions civiles et militaires de retraite.

Pour en savoir plus :

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000039426799&fastReqId=1023382216&fastPos=2

© MDMH – Publié le 4 décembre 2019

Maître Aïda MOUMNI

Avocat associé et fondateur
Expert en droit des militaires, Aïda MOUMNI a plus particulièrement en charge au sein de MDMH AVOCATS le contentieux financier, social, indemnitaire et de fin de service des militaires et anciens militaires (soldes, accessoires de solde, Louvois, trop-perçus, moins versés, lien au service, retraite, pension de réversion, indemnités de départ …) Elle intervient conjointement avec Elodie MAUMONTdans le cadre du contentieux médico administratif des militaires, des pensions d’invalidité et des demandes connexes (jurisprudences BRUGNOT et autres).

 

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