Suicides dans la police et la gendarmerie

Question écrite n° 08136 de M. Jean-Marie Janssens (Loir-et-Cher – UC) publiée dans le JO Sénat du 13/12/2018 – page 6348

M. Jean-Marie Janssens attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur le nombre très préoccupant de suicides dans la police et la gendarmerie. En dix ans, le nombre de suicides au sein des forces de l’ordre a atteint des niveaux qui interrogent profondément sur leurs conditions de travail et l’état de fatigue de nos forces de l’ordre. La charge de travail, l’accroissement des risques professionnels et psychosociaux, les incivilités et le contexte terroriste sont des facteurs de fragilisation très importants. Il souhaite donc connaître les réponses qu’il compte apporter pour faire face à cette situation dramatique.

Réponse du Ministère de l’intérieur publiée dans le JO Sénat du 07/02/2019 – page 698

Le sujet du suicide est une préoccupation majeure et constante du ministère de l’intérieur qui conduit de longue date une politique volontariste en la matière. La gendarmerie nationale a déploré 17 suicides en 2017 (contre 25 en 2016) et 33 suicides en 2018. Depuis 1998, la gendarmerie nationale s’est engagée dans une démarche de prévention des risques psychosociaux (RPS) et d’amélioration de la qualité de vie au travail (QVT) au profit de l’ensemble de ses personnels. Ce dispositif, visant à prévenir l’apparition de situations professionnelles fragilisantes, participe naturellement à la prévention du risque suicidaire. La commission nationale de prévention, réunie le 15 mars 2018 sous la présidence du directeur général de la gendarmerie nationale, a validé le plan de prévention du risque suicidaire qui avait pour objectifs de renforcer et compléter les actions déjà mises en place en la matière. Ce plan se décline en trois axes. L’axe 1 se dénomme « poursuivre et renforcer la politique de prévention des RPS ». Ainsi, un plan de prévention des RPS piloté par la direction générale de la gendarmerie nationale a été élaboré à partir de l’analyse des réponses au questionnaire sur la qualité de vie au travail adressé à 25 000 personnels en 2014. Ce plan national est décliné en plans locaux de prévention, élaborés par des commissions locales de prévention (CLP) créées dans chacune des 51 formations administratives. Le niveau central de la gendarmerie renforce actuellement l’accompagnement technique et méthodologique des CLP dans la mise en œuvre des plans locaux de prévention. Les études de l’environnement professionnel, centrées exclusivement sur la recherche et l’analyse de facteurs professionnels qui auraient participé de près ou de loin à la genèse et à la réalisation du passage à l’acte ont permis, de 2015 à 2017, d’analyser les facteurs de risque en vue de proposer des mesures de prévention adaptées. La gendarmerie procède actuellement à la refonte de cette méthodologie. L’axe 2 s’intitule « former l’encadrement et sensibiliser l’ensemble des personnels ». Les formations dans le domaine de la prévention des RPS sont dispensées dans les écoles et centres de formation de gendarmerie. Le niveau central travaille actuellement sur la construction de modules complémentaires et spécifiques à l’amélioration de la QVT. Elles ont pour vocation de sensibiliser les personnels aux facteurs de RPS et d’améliorer l’identification des acteurs du réseau de santé au travail présent en gendarmerie. Le module de sensibilisation à la prévention des RPS en format vidéo sera diffusé au profit de l’ensemble des personnels au cours de l’année 2019. La politique de communication volontariste mise en œuvre en 2014 se poursuit : un guide ressource relatif à la gestion de crise après un suicide dans une unité est régulièrement diffusé aux échelons de commandement. L’axe 3 se dénomme « renforcer l’accompagnement et la prise en charge psychologique des personnels ». Le plan de prévention du risque suicidaire prévoit de : renforcer l’accès au psychologue clinicien pour l’ensemble des personnels de la gendarmerie nationale. À ce titre, un schéma directeur quinquennal de renforcement du dispositif d’accompagnement psychologique (DAPSY-GN), composé actuellement de 39 psychologues cliniciens, est en cours d’élaboration ; généraliser le travail de partenariat et d’échange entre les différents acteurs (commandement, ressources humaines, DAPSY-GN, service de santé des armées et services sociaux). Ce plan a permis de développer des dispositifs d’accompagnement psychologique et de prévention des risques professionnels. La dernière action menée a été une journée de réflexion autour de la prévention de ce risque. Articulée sous la forme de quatre tables rondes thématiques (état des lieux, regards croisés, communication responsable et nouvelles perspectives), elle s’est déroulée à la direction générale de la gendarmerie nationale le 15 novembre 2018. Elle a rassemblé 240 personnes (professionnels de l’accompagnement, directeurs et commandants de formations administratives, instances représentatives du personnel civil comme militaire et associations professionnelles). Des intervenants extérieurs à l’institution ont apporté un éclairage complémentaire (ministère de la défense belge, service de santé des armées, police nationale et brigade de sapeurs-pompiers de Paris).  Le ministre de l’intérieur a fait de l’amélioration des conditions de travail des forces de l’ordre une de ses priorités. À titre d’exemple, l’acquisition de 2 800 véhicules est programmée par la gendarmerie nationale en 2019 contre 2 000 en 2016. De même, 105 M€ seront consacrés à la rénovation de 4 000 logements et à la sécurité des casernes, afin d’améliorer les conditions de vie des gendarmes et de leurs familles.

Source: JO Sénat du 07/02/2019 – page 698

Cet article a 4 commentaires

  1. Anonyme

    On ne peut que saluer l’intérêt des parlementaires et les travaux en cours par les ministères en ce domaine.
    Pour les citoyens (civils, fonctionnaires, militaires) « intéressés » par la chaîne de prise en charge des « souffrants », « victimes », citons quelques exemples de formations en ces vraies « disciplines », à savoir la Victimologie et/ou la Psychotraumatologie (centre de psychotrauma) – conscient que l’approche reste protéiforme :
    – Diplôme Universitaire (DU) de Victimologie, DU de psychotraumatologie, Master 2ème année prise en charge des victimes et des auteurs d’agression : ces trois formations à l’université de Paris Descartes ; – formations professionnelles et séminaire : à l’institut de victimologie à Paris (17ème) « institutdevictimologie.fr » ;
    – DIU (diplôme interuniversitaire) de victimologie à l’université Claude Bernard Lyon 1 ;
    – DU de victimologie à l’université de Montpellier-Nîmes ;
    – DU de prise en charge des victimes à l’université de Bordeaux etc.
    Pour exemple concernant le DU de Victimologie à l’université de Paris Descartes (source : DU victimologie site internet de l’université au paragraphe « objectifs ») :
    « La préparation de ce diplôme constitue un complément de formation utile à tous ceux qui, professionnellement, approchent les victimes. Il s’adresse aux professionnels de santé (médecins, psychologues, psychiatres, personnels infirmiers), aux juristes (avocats, magistrats), aux travailleurs sociaux, aux personnels du secteur associatif, aux policiers. Cette formation peut s’intégrer dans un cursus universitaire classique ou s’inscrire dans les actions de formation continue que proposent, à leurs personnels, les organismes de secteurs publics et privés. »
    Participation citoyenne dans ce vaste domaine. Retraité.

  2. Anonyme

    Effectivement, il n’est pas anodin de mentionner dans le « commentaire » du 1er mars à 9h50, des formations en « victimologie » et « psychotraumatologie ». Ces disciplines « récentes » constituent un réel progrès… On peut déjà s’informer à titre personnel sans être « spécialiste » par la lecture d’ouvrages spécialisés, de visites de sites internet dédiés, etc. – pour son propre bénéfice, ses proches, collègues, concitoyens, et améliorer ainsi notre vie sociale.
    Ex-militaire.

  3. Anonyme

    « Au surplus », à toutes fins utiles, l’étude en autres de la « Crise suicidaire, évaluer et intervenir » est bien au programme du DU de Victimologie ainsi qu’au DU de psychotraumatologie : à l’université Paris Descartes (cf. site internet de l’université).

    Concernant le DIU de victimologie à l’université Claude Bernard Lyon 1, il est mentionné sur le site de l’université (à la rubrique Description) : « Sont admis à s’inscrire deux catégories de candidats : « […] Ceux ne pouvant pas prétendre à l’obtention du Diplôme Interuniversitaire mais à celle d’une Attestation de Formation en victimologie (après entente préalable avec les responsables de l’enseignement) :
    – les Infirmiers diplômés d’Etat ; les Educateurs, travailleurs sociaux ne possédant ni diplôme de 2ème cycle ni le statut de cadre infirmier ; les permanents des associations d’aide aux victimes ou les postulants à de telles responsabilités. »

    Merci à l’Adefdromil – Aide aux victimes.

  4. Anonyme

    A noter que ces deux disciplines bien que distinctes sont étroitement liées : la « Psychotraumatologie » (discipline médicale…) et la « Victimologie » (accompagnement social et judiciaire…).

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