LE DROIT, DERNIER REMPART CONTRE L’AUTORITARISME OU LA PLACE ESSENTIELLE DE L’AVOCAT DANS LE CONTENTIEUX ADMINISTRATIF (Par Maître Elodie MAUMONT, Avocat associé)

Ainsi que nous l’indiquions dans notre article du 12 janvier 2018, la publication des articles sur le blog de MDMH AVOCATS suscite – et nous en sommes très satisfaits et reconnaissants – de l’intérêt, des commentaires et parfois même des vocations.

C’est ainsi que MDMH AVOCATS a reçu diverses contributions au fil des mois.

Parmi les meilleures, nous avons sélectionné un premier article de « Caron 124 » que nous avions publié le 12 janvier dernier.

« Caron 124 » est un contributeur précieux.

Nous publions aujourd’hui un second article portant titre « Le Droit, dernier rempart contre l’autoritarisme ou la place essentielle de l’avocat dans le contentieux administratif ».

Une nouvelle fois, nous le remercions chaleureusement.

MDMH AVOCATS encourage ses visiteurs et ses lecteurs à devenir également pour un jour un de nos auteurs.

N’hésitez pas à nous transmettre vos contributions à l’adresse contact@mdmh-avocats.fr ou elodiemaumont@mdmh-avocats.fr .

Bonne lecture …

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Le Droit, dernier rempart contre l’autoritarisme ou la place essentielle de l’avocat dans le contentieux administratif.

Le livre bleu sur l’exercice du commandement dans l’armée de terre dans sa version de mai 2016 édicte que « la qualité de l’exercice du commandement détermine celle des relations entretenues au sein de toute communauté humaine. La qualité des relations humaines constitue le déclencheur de la fraternité. Il ne peut y avoir de fraternité entre des hommes qui ne se respectent ni ne s’estiment, qu’aucun lien affectif ne rassemble dans l’épreuve, qui ne se sentent aucune responsabilité les uns vis-à- vis des autres ».

Le chef est défini également en ces termes: « le chef est celui qui décide et commande. Il est celui vers qui les regards se tournent dans la difficulté. Il est celui qui, devant ses hommes, peut dire « en avant ! » en étant certain d’être suivi. Il est aussi celui qui, au milieu de ses hommes, aide chacun à se dépasser et fédère les énergies. Ce degré d’exigence justifie à lui seul que le chef militaire soit habité par les principes du commandement qui constituent le cœur de sa vocation : l’exigence, la compétence, l’esprit de décision, l’humanité, la justice et la confiance. »

Ces 6 principes du commandement doivent inspirer le chef militaire en toutes circonstances. Ils sont étudiés dans les Ecoles militaires afin de donner aux jeunes officiers la « hauteur de vue du chef » qui conditionne la réussite de l’action collective. Ils sont déclinés sous diverses formes dans les unités afin de préserver l’éthique et la déontologie propres à l’Institution qu’ils servent quotidiennement.

Cependant, il arrive parfois que certains chefs passent à travers les mailles de ce « filet de sécurité éthique et déontologique ».

En effet, qu’en est-il lorsque ces principes n’ont pas été bien intégrés par le chef ou, pire encore, ont été bafoués par lui, afin de préserver des intérêts purement personnels ?

Comme dans tout système hiérarchisé reposant sur le facteur humain, « stratégies d’évitement », « manoeuvres d’intimidations », « méthodes de culpabilisation » se développent dans l’Institution militaire, à l’instar des dérives constatées dans les modes de management propres au secteur privé. Ce mouvement, heureusement marginal au sein de l’Institution militaire eu égard aux valeurs et principes mis en avant, fait néanmoins des « ravages » dans ses rangs chaque année, une victime étant toujours celle de trop.

Les qualités du chef sont régulièrement mises en avant au sein de l’Institution et c’est heureux. Pas la peine donc de s’y attarder aujourd’hui, celles-ci étant regroupées en qualités physiques, intellectuelles et morales, propres au milieu militaire.

En revanche, les défauts possibles du chef sont nettement moins mis en lumière. Une liste non exhaustive des défauts possibles du chef permet d’en appréhender les principaux: Arriviste, Arrogant, Arbitraire, Blessant, Borné, Carriériste, Carractériel, Cynique, Désorganisé, Dragueur, Egoïste, Enigmatique, Hautain, Hésitant, Impulsif, Intransigeant, Manipulateur, Misogyne, Rancunnier, Soupconneux, Sournois, Versatile….Une recherche rapide sur Internet donne accès à une liste plus complète mais là n’est pas le sujet.

Lorsque, chez un chef, les défauts sont plus « visibles » que les qualités, le subordonné est alors confronté à une forme d’autoritarisme. La « bienveillante fermeté » du chef militaire n’est pas toujours une réalité…

« L’autoritarisme consiste en une prééminence, une hypertrophie de l’autorité érigée en valeur suprême. Une personnalité faisant preuve d’autoritarisme se caractérise par une dérive de domination d’autres personnes au sens psychologique du terme. La psychologie s’intéresse généralement à cette question sous l’angle de la soumission à l’autorité mis en perspective par l’expérience de Milgram ».(source wikipedia).

Le subordonné concerné par l’autoritarisme du chef, sous une forme ou sous une autre, est peu à peu pris dans un étau et se heurte parfois au « mur hiérarchique » en voyant une véritable « chape de plomb » s’ériger selon la règle suivante: « le chef a toujours raison« . Le subordonné se trouve alors souvent dans une « impasse » où seule la mise en lumière d’une telle situation par ses soins s’impose d’elle même par le biais du contentieux administratif.

En cas de contentieux administratif, le subordonné se retrouve alors embarqué dans un véritable « parcours du combattant », devant justifier à moults reprises de sa bonne foi en vertue du principe non écrit de « présomption de culpabilité du subordonné« , seul face à sa hiérarchie. Le subordonné découvre alors qu’en matière de contentieux, sa parole n’a pas la même valeur que celle du chef.

« Vous allez vous battre contre des moulins à vent » est une expression parfois utilisée par la hiérarchie pour dissuader le subordonné de toute démarche contentieuse en matière administrative….Autrement dit, dans les cas où le « bon sens » se confronte à la « puissance », le « match » est tellement inégal que le subordonné a tout intérêt à « capituler »…Il arrive parfois que l’incohérence et le sentiment d’injustice soient trop forts pour que le subordonné se dérobe à ce « combat » qu’il sait pourtant disproportionné et asymétrique….

Dans ce nouveau parcours à obstacles, le subordonné doit alors en comprendre rapidement toutes les étapes et tous les codes, en mobilisant son énergie et ses capacités intellectuelles.

Il doit également intégrer le fait que ses démarches « agacent » l’ensemble de sa hiérarchie qui voit d’un mauvais oeil que la décision d’un chef soit ainsi contestée par un subordonné, fusse-t-il de bonne foi.

L’image de l’Institution ne doit en aucun cas être écornée par une remise en question d’une décision d’un chef, fusse t-elle illogique ou incohérente…..

La tentation est grande pour le chef de discréditer « à n’importe quel prix » le subordonné afin d’étouffer toute remarque constructive et objective de sa part.

Au-delà du possible recours hiérarchique (non contentieux), le subordonné peut se tourner vers la médiation afin de trouver une issue au litige qui l’oppose à sa hiérarchie.

La médiation s’entend alors comme un processus structuré par lequel les parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur.

En effet, l’article D4121-2 du code de la défense indique que « tout militaire peut saisir les officiers généraux inspecteurs d’une question relative à sa situation personnelle, aux conditions d’exécution du service ou à la vie en communauté« .

L’objet de la médiation est d’abord de trouver des solutions amiables aux litiges individuels. La médiation doit aussi rétablir la confiance entre les individus partie aux conflits. Enfin, la médiation doit normalement prévenir les risques psychosociaux, beaucoup de situations s’accompagnant d’un mal-être.

Dans les faits, les demandes de médiation aboutissent à des réponses variables, accompagnées ou non d’un réglement du conflit. Bien souvent, les rappels de la règle éclairent le demandeur sur sa difficulté et permettent dans certains cas de « passer à autre chose » sans « s’épuiser dans des procédures contentieuses ». Il faut dire qu’à l’occasion des entretiens propres à la médiation, il est parfois rappelé que « le contentieux est de nature à freiner la médiation« …Là encore, le subordonné prend à nouveau conscience que le « match » reste déséquilibré et que certains enjeux dépassent le simple réglement d’une situation de conflit entre deux parties.

Quand le contentieux s’impose au vu des préjudices subis par le subordonné (professionnels, moral,…), la procédure contentieuse s’engage finalement.

Dans le secteur privé, quand un salarié a un litige avec son employeur, il fait appel au conseil de prud’hommes.

Les agents de l’administration publique, eux, se présentent devant la juridiction administrative.

La particularité du militaire est qu’il ne peut – sauf exceptions notamment en matière de sanctions – saisir directement le juge administratif d’une décision qu’il conteste.

Depuis 2001, il est contraint, en premier lieu, de former un recours administratif préalable obligatoire auprès de la Commission des recours des militaires (CRM). La Commission des recours des militaires instruit les demandes formées par les soldats contestant une décision relatives à leur situation personnelle et rédige ensuite une recommandation destinée au ministre compétent qui prend seul la décision finale.

Dans ce type de démarche, il est essentiel de faire appel à un avocat afin que le recours soit bien circonstancié tant en droit qu’en faits.

Quand le subordonné se trouve dans une impasse vis à vis de décisions prises à son encontre par une hiérarchie rétissante à reconnaître ses erreurs, le Droit demeure le dernier rempart contre l’autoritarisme. L’avocat est alors indispensable au bon suivi de la procédure.

CARON 124″

Source: MDMH

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