JUSTICE MILITAIRE : À QUAND UN JUGE VISIONNAIRE ? (Par Romy LORENT, juriste et, Me Elodie MAUMONT, avocat associé)

MDMH AVOCATS souhaite vous faire partager le portrait du juge Paul MAGNAUD (1848-1926), connu non seulement pour la profonde humanité de ses jugements mais aussi pour ses décisions ambitieuses.

Officiant à l’aube du XXème siècle, le bien nommé « bon juge » ou « juge de justice » a marqué l’histoire judiciaire en osant défier sa hiérarchie et adopter des jugements empreints d’équité et de justice.

Le juge MAGNAUD doit principalement sa notoriété à un jugement rendu le 4 décembre 1898, alors présidait le tribunal correctionnel de Château-Thierry, et à l’occasion duquel il inventa le concept juridique d’état de nécessité.

En l’espèce, une jeune mère de 22 ans, sans ressources, avait volé une miche de pain à son cousin boulanger, pour nourrir son enfant de deux ans.

Face à un tel désespoir, le juge MAGNAUD répondit par son jugement « que le juge doit interpréter humainement les inflexibles prescriptions de la loi (…) que l’irresponsabilité doit être admise en faveur de ceux qui n’ont agi que sous l’irrésistible impulsion de la faim » et prononça la relaxe de la prévenue.

L’état de nécessité ne sera reconnu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation que le 26 juin 1958. Il est aujourd’hui consacré par l’article 122-7 du code pénal.

Le juge MAGNAUD a adopté ce raisonnement précurseur dans de nombreux autres domaines tels que le divorce par consentement mutuel, les accidents de la circulation, la défense des femmes et la lutte contre le délit d’adultère notamment.

L’histoire de ce « bon juge » nous apparaît d’autant plus intéressante qu’il était lui aussi militaire avant de devenir magistrat…

Il a été décoré de la Légion d’Honneur pour ses services rendus lors de la guerre de 1870, puis a exercé comme Capitaine d’état-major dans l’armée de réserve, et a finalement été à nouveau mobilisé en 1914.

Le juge MAGNAUD n’a malheureusement pas eu l’occasion d’adopter le cheval de bataille qui est le nôtre, la cause des militaires.

Il serait pourtant bienvenu que les juges s’inspirent de modèles tels que le juge MAGNAUD pour faire avancer la condition militaire, combat mené par notre cabinet et par des associations telles que l’ADEFDROMIL-Aide aux victimes.

En effet, même si les droits des militaires tendent à être davantage respectés – comme par exemple le droit d’association reconnu à la suite des arrêts de la Cour Européenne des droits de l’homme du 2 octobre 2014 Matelly c. France et ADEFDROMIL c. France – il n’en demeure pas moins que de nombreux progrès restent à faire…

Pour en savoir plus sur le juge Paul MAGNAUD :

© MDMH – Publié le 9 novembre 2016

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