Une aventure du légionnaire DISIGNY : je prends le train pour partir en permission.

Le légionnaire Disigny est un cousin du sapeur Camembert. Il a bien voulu nous narrer une de ses aventures.

Quand on a moins de cinq ans de service à la Légion, il est interdit de revêtir la tenue civile dans la garnison. Je n’ai pas compris quel est l’objectif militaire de ce règlement spécial « Légion ». Peut-être donne t’il l’occasion de punir ceux qui l’enfreignent, non par honte de porter l’uniforme, mais par une évidente commodité pour partir en permission.

Toujours est-il que cette interdiction permet à la police militaire, « la Gestapo Légion », de pouvoir interpeller les légionnaires en tenue civile. Elle s’arroge même parfois le droit de  menotter les récalcitrants.

Mon aventure commence le X octobre 2006. Je suis en quartier libre du vendredi 18 heures au dimanche minuit. Au rompez à 18 heures, je suis obligé comme tous mes camarades de moins de cinq ans de service d’attendre les « ordres » avant de partir. Puis, le temps s’écoule. A 19h, je mets ma tenue civile pour me rendre à M. et emprunte le chemin imposé pour aller à la gare SNCF. Cet itinéraire n’est point le plus court. Mais, il permet notamment d’être dans le collimateur de la fameuse police militaire déjà citée. En dehors de celui-ci, le contrevenant est passible d’une punition et d’une interdiction formelle de porter la tenue civile durant tout son contrat initial. Ce règlement abusif ne m’a jamais été montré malgré plusieurs demandes.

Arrivé à la gare, j’annule mon billet car le train est déjà parti et je prends un billet pour le prochain train prévu à 23 h11. Pour passer le temps, je me rends au bar en face de la gare SNCF (à 20 mètres environ) où je commande un café. Pas de bol : descente de la police militaire. On se croirait sous l’occupation allemande…Je suis interpellé. Je quitte alors mon café en laissant un billet de 10 euros auprès de la tasse et obtempère. Le contrôle de ma carte d’identité militaire permet  de déterminer que je n’avais pas le droit d’être à cet endroit. On me fait alors embarquer pour retourner à la caserne et y être consigné tout d’abord pour le week-end.  Bien sûr, mon billet est perdu. Puis le lundi, je suis convoqué au rapport du commandant d’unité pour punition dont le motif est : « Enfreindre sciemment un règlement militaire. A tenté de tromper la confiance de ses chefs. »

Bilan : 15 jours d’arrêt fermes en plus de l’interdiction formelle de porter la tenue civile durant les trois ans qui me restent à tirer. Sur ma carte d’identité militaire, l’OPSR (officier protection sécurité régimentaire) a cacheté : « Interdit de tenue civile ».

Autre conséquence indirecte de cette sanction et de quelques autres infligées pour des violations tout aussi graves de règlements non écrits et sans doute abusifs comme l’interdiction de détenir un téléphone portable sans autorisation : le refus du certificat de bonne conduite à l’issue de mon contrat.

Originaire d’un pays hors Union européenne, je suis donc en situation irrégulière, depuis que j’ai quitté la Légion. Risquer d’être reconduit à la frontière manu militari, dans la patrie des droits de l’homme, dont j’ai porté l’uniforme pendant cinq ans et qui m’a accordé un titre de reconnaissance de la Nation,  la situation me semble ubuesque. J’évite tout de même de trop traîner dans les rues le soir.  

En y réfléchissant, j’ai dû oublier de dire merci à la Légion, c’est peut-être pour cela qu’on ne veut pas de moi ici, enfin pour l’instant, j’espère.

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