Alliot-Marie s’attaque aux «syndicalistes» de l’armée

Libération – Samedi 14 décembre :

Cet article peut être lu directement sur le site du périodique « Libération » en [cliquant ici].

Le ministère de la Défense menace de sanctions les militaires adhérents de «l’association».

Le ministère de la Défense ne veut pas de syndicat dans les armées. Dans une note confidentielle destinée aux états-majors, Philippe Marland, directeur du cabinet de Michèle Alliot-Marie, vient de rappeler ses troupes à l’ordre : pas question d’adhérer à l’Adefdromil, l’Association de défense des droits des militaires. Officiellement constituée à la rentrée (Libération du 14 septembre), l’Adefdromil revendique aujourd’hui 450 adhérents, «du simple soldat au colonel», selon son principal animateur, Michel Bavoil, capitaine à la retraite.

Dans une lettre du 28 novembre, le directeur du cabinet de MAM affirme que l’Adefdromil possède un «caractère syndical», totalement incompatible avec le statut général des militaires de 1972 qui interdit «les groupements professionnels militaires à caractère syndical». «En conséquence, écrit Philippe Marland, les destinataires de la présente note prendront toutes les mesures qu’ils jugeront utiles afin d’informer les militaires en activité de service relevant de leur autorité qu’ils ne peuvent adhérer à cette association, sous peine de sanctions disciplinaires.» Dans les jours à venir, les états-majors devraient donc adresser un courrier aux rares adhérents identifiés pour leur demander de démissionner de l’Adefdromil.

«Retour en arrière». Premier visé, le médecin-chef Claude Debeir, président de l’association : «Je n’ai encore rien reçu, indique- t-il. Après mon élection, j’avais pourtant normalement rendu compte à ma hiérarchie.» Ancien toubib à bord des sous-marins, Claude Debeir est aujourd’hui affecté dans un centre médical de la gendarmerie en Seine-Saint-Denis. «La décision ministérielle est un retour en arrière extraordinaire, affirme-t-il, mais je serai sans doute obligé de démissionner de mes responsabilités.»

L’Adefdromil, dont le site Internet (1) est largement consulté par les militaires, était jusqu’à présent tolérée. Un chef d’état-major avouait même n’être «pas dérangé» par son existence. Jusqu’à ce 3 novembre et la participation de Claude Debeir à l’émission Ripostes de France 5… sur le même plateau que l’amiral Alain Coldefy, numéro deux de l’état-major.

«Le ministère a cédé à la pression des généraux, alors que le gouvernement précédent s’était abstenu de nous chercher des poux dans la tête, s’emporte le capitaine Bavoil. Et à quel titre un directeur de cabinet peut-il statuer sur le fait que nous serions un syndicat ? Cette décision doit relever de la justice.» L’Adefdromil ne revendique pas le droit syndical pour les militaires, tel qu’il existe par exemple en Allemagne, mais celui de former des «groupements professionnels» une formule qui reste à inventer.

Evolution. Un an après la crise des gendarmes, le ministère de la Défense reste prudent. «Sans chercher la bagarre, nous rappelons les règles en vigueur, indique l’amiral Claude Marcus, porte-parole du ministère. Avec les instances de concertation du personnel, une réflexion va être menée en 2003 sur l’évolution du statut des militaires.» Sans aller jusqu’à la liberté syndicale.

(1) www.defdromil.org

À lire également