DOCUMENT EXCLUSIF. L’amiral Guillaud aurait-il dû démissionner ? (Par Jean Guisnel)

La réorganisation du ministère de la Défense suscite de sérieux mais discrets remous. Certains regrettent que le chef d’état-major des armées n’ait pas démissionné.

La réforme du ministère telle qu’elle est engagée par Jean-Yves Le Drian, à la suite d’un processus de réorganisation ayant pris plus d’un an, suscite en interne de fortes controverses. Pour une meilleure compréhension, nous avons décidé de publier l’intégralité de la lettre du ministre et des annexes, à l’exception de la quatorzième et dernière page, qui contient la liste de ses 21 destinataires (cliquez ici pour lire la lettre). Cette réforme, rappelons-le, a été souhaitée par Jean-Yves Le Drian, convaincu de sa nécessité bien avant de prendre ses fonctions. Elle a été conduite par un membre de son cabinet, qui a réuni à de très nombreuses reprises un groupe de travail – appelé L33 – auquel ont participé des dizaines de membres des cabinets civil et militaire du ministre de la Défense, ainsi que des officiers détachés par tous les états-majors, y compris l’état-major des armées, et tous les services du ministère. On se dit de ce fait totalement persuadé, dans l’entourage du ministre, que si cette réforme a fait l’objet de discussions, elle n’a suscité aucune opposition véritable. Divergence d’appréciation ou vraie opposition ?

Le décret de 2009 aux oubliettes

Cette réorganisation n’est pas anodine. Elle n’est pas non plus destinée à placer le ministère cul par-dessus tête. Sa dimension la plus sensible et la plus symbolique – celle qui retire à l’état-major des armées la gestion du personnel pour la confier à la direction des ressources humaines DRH-MD – ne fait que ramener l’institution à la situation qui avait prévalu entre 1962 et 2009. Cette dernière date étant celle de l’antépénultième réforme du fonctionnement du ministère, essentiellement voulue à cette époque par deux hommes : le général Jean-Louis Georgelin, chef d’état-major des armées de 2006 à 2010, et par son successeur aujourd’hui en fonction, l’amiralÉdouard Guillaud, qui se trouvait être alors le chef d’état-major particulier du président de la République Nicolas Sarkozy. Le décret de 2009 est donc passé par pertes et profits. Et d’aucuns, dans les armées mais pas seulement, prétendent que l’amiral Guillaud aurait dû marquer son refus de cette évolution en démissionnant, ce que les marins appellent « poser la casquette ».

Démission ? Là est la question

Comme le monde est bien fait, il se trouve que deux commentaires « postés » à la suite de la parution de notre article du 17 juilletdéveloppent les arguments entendus ces derniers temps dans les armées. Les tenants du départ du CEMA estiment comme Raboliot qu’Édouard Guillaud « doit démissionner. La marginalisation des militaires réduits à l’état de simples exécutants au sein même du ministère de la Défense condamne le modèle militaire français ». Mais un autre contributeur signant Pavlof est bien renseigné. Il reprend en substance les mêmes arguments contre la démission du CEMA, que celui-ci aurait avancés auprès de proches : « La démission est certes un moyen d’exprimer un mécontentement, mais n’a jamais permis d’avancer. Ce n’est pas en quittant ses fonctions que le CEMA pourra continuer à faire entendre sa voix. Il y aurait toujours eu quelqu’un, derrière lui, pour saisir l’opportunité, et se vendre facilement en affirmant être en mesure d’appliquer toutes les réformes voulues par le ministre. La démission n’a jamais permis de garder la main sur une négociation ! »

« Éviction doctrinale des militaires »

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