Mali: Point de presse du porte parole du Quay d’Orsay du 8 février 2013

MALI

Q – Nous avons reçu aujourd’hui l’information selon laquelle un attentat kamikaze à Gao avait été perpétré contre les forces maliennes. Avez-vous une idée du bilan des victimes ? Cela pourrait-il retarder l’agenda des troupes françaises au Mali ? Je vois notamment la déclaration du ministre des affaires étrangères annonçant qu’ils commenceraient à partir en mars.

R – Je n’ai pas de bilan précis

Nous avons dit que l’opération n’était pas terminée. Vous faites référence aux attentats suicides, il y a aussi – et c’est tout aussi récent – les mines qui ont été laissées par les groupes terroristes au moment où ils ont reflué plus au Nord. C’est une raison supplémentaire d’être prudents. Ce sont des éléments qui sont bien sûr intégrés dans la conduite des opérations et dans le déploiement de nos forces.

Le calendrier a été annoncé à grands traits. En effet, il faudra tenir compte de l’évolution de la situation sur le terrain. C’est d’ailleurs l’annonce qui a été faite : si tout se passe comme prévu, les troupes françaises pourront commencer à être retirées à partir du mois de mars.

Tout cela est cohérent avec le déploiement par ailleurs de la MISMA auxquelles nous passons le relais au fur et à mesure que les zones sont sécurisées par les troupes françaises et maliennes. Les forces de la MISMA
aujourd’hui sont presque à la moitié de leur déploiement sur le terrain, à Bamako et un peu plus au Nord. La montée en charge se fait progressivement.

Q – Quand les 7.000 soldats de la MISMA seront-ils déployés ? À quelle échéance?

R – Pour tout ce qui relève du détail des opérations, interrogez l’état-major des armées, mais je dirais que c’est dans les deux semaines qui viennent à peu près

Q – Devant le sommet de l’OCI (Organisation de la coopération islamique) au Caire, le Maroc a apporté un soutien sans réserve à l’intervention française au Mali. Quelle lecture faites-vous de cette position en ce moment précis alors que certains pays de l’OCI ont émis des réserves ?

R – Tout d’abord, la France remercie chaleureusement Sa Majesté Mohamed VI, qui a salué dans son discours devant l’OCI, l’intervention rapide et efficace des forces françaises et maliennes, face à la menace terroriste qui pesait sur le Mali.

S’agissant des prises de positon de l’Organisation de la coopération islamique elle-même, nous saluons le soutien qu’elle a affiché hier au processus de dialogue et de transition politique en cours au Mali. Je crois qu’avec cette prise de position publique officielle de l’OCI, nous avons véritablement une prise de position quasi unanime de toute la communauté internationale sur la situation telle qu’elle se présente aujourd’hui au Mali, après les déclarations précédentes faites par les Nations unies, par l’Union africaine, par la CEDEAO, par l’Union européenne.

Q – Quelle est la réaction officielle à l’encerclement du camp des bérets rouges de Djicoroni par les forces de l’ordre ? Ou plus exactement, de quelle manière la lutte intestine entre les éléments des forces armées maliennes nous affecte-t-elle ?

R – J’ai vu tomber les premières dépêches il y a deux heures seulement. La situation est donc encore un peu confuse et je voudrais éviter d’en tirer des conclusions ou de faire des commentaires intempestifs. Je m’en tiendrai donc au principe mais il est très important, celui pratiqué dans toutes les démocraties du monde, de la soumission du pouvoir militaire au contrôle du pouvoir civil.

Q – À ce sujet, cela n’a pas l’air d’être vraiment le cas au Mali. Quelle est la réaction française face à ce genre de conflit ? D’autant plus qu’apparemment, selon les informations que nous avons, il y a eu des victimes civiles de ces conflits, on a eu des rapports selon lesquels les troupes maliennes auraient tiré dans la foule. Est-ce que cela ne met pas en difficulté le gouvernement français qui appuie ce gouvernement malien ?

R – Le principe que je viens de rappeler, la soumission de l’armée au pouvoir civil, est un des objectifs affichés dès le départ dans les positions françaises. C’est tellement vrai d’ailleurs que c’est notamment à la demande de la France que se déploiera très bientôt une mission de formateurs de l’Union européenne qui aura pour mission de restructurer et former les forces armées maliennes. Le rôle de l’armée dans un État démocratique et sa relation avec les autorités civiles et politiques en seront un élément essentiel.

Q – Considérez-vous donc que l’armée malienne est soumise au pouvoir civil actuellement ?

R – Elle doit obéir au pouvoir civil. Quand on parle de restauration de l’intégrité du territoire malien, cela suppose en effet le déploiement sur tout le territoire malien des forces armées maliennes sous l’autorité, le contrôle du pouvoir civil, ce qui se fait jusqu’à présent

Q – Inaudible (exactions)

R – Nous avons rappelé à plusieurs reprises notre vigilance sur ce sujet et toutes les précautions que nous avons prises. C’est à notre demande notamment que la résolution 2085 comporte, ce qui est une première dans les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, des dispositions très particulières relatives au déploiement d’observateurs sur le terrain. Nous avons demandé, et c’est en train de se faire, au secrétariat général des Nations unies, non seulement de déployer très vite ces observateurs, mais d’en augmenter le nombre.

Nous avons soutenu, avec d’autres, la saisine de la CPI dont le mandat court à partir de janvier 2012 et qui sera spécifiquement compétente pour les crimes de guerre. Non seulement nous avons soutenu la saisine de la CPI, mais nous soutiendrons également son travail.

C’est aussi la France qui a demandé que parmi les formateurs de l’Union européenne qui seront déployés très bientôt, puisque c’est le 12 février que l’opération sera lancée, il y ait des formations au droit humanitaire, au droit de la guerre, au droit des conflits armés. C’est la France encore qui a demandé qu’un détachement précurseur de cette mission, sous les ordres du général Lecointre, soit déployé très vite sur le terrain.

Nous avons aussi passé des messages aux autorités maliennes pour leur dire qu’il n’y aurait aucune espèce d’impunité si de tels actes venaient à être commis. Instruction a été donnée également à nos forces de transmettre aux autorités armées maliennes et à la CPI tout élément de preuve qu’elles viendraient à recueillir.

C’est donc un sujet de très grande vigilance pour nous et nous avons essayé de prendre toutes les mesures pour y parer, y remédier et si par malheur cela devait arriver, pour que cela ne reste pas impuni bien sûr.

Q – Dans le même sens et sur le même incident, nous avons publié un article selon lequel des troupes auraient tiré dans la foule à Bamako ce matin. Vous parliez de l’obéissance des militaires au pouvoir civil et de démocratie, mais je ne pense pas qu’on puisse dire que le régime malien est une démocratie fonctionnelle. Il y a eu ces incidents. L’intervention militaire française ne renforce-t-elle pas finalement ce régime malien qui a commis, qui commet certains excès dans le pays ? Est-ce correct de dire que la France appuie un régime qui n’est pas une vraie démocratie ?

R – On ne va pas refaire l’histoire du Mali, vous la connaissez comme moi. Il y a un président, un gouvernement en place considérés par la communauté internationale comme légitimes.

Ces mêmes autorités maliennes ont pris des engagements encore tout récemment, je fais référence à la feuille de route qui a été adoptée par le conseil des ministres maliens en fin de semaine dernière et ensuite le 29 janvier adoptée par l’Assemblée nationale malienne. Ces autorités ont pour mission d’organiser des élections et le président Traoré a pris l’engagement public de le faire d’ici le mois de juillet prochain. Naîtra donc de cette transition un pouvoir démocratique au terme de ce processus électoral.

Q – Peut-on dire que le gouvernement malien a encore la confiance du gouvernement français ?

R – Je le répète, je n’ai peut-être pas été assez clair. Le président et le gouvernement maliens sont les autorités considérées par l’ensemble de la communauté internationale comme légitimes. Ce sont des partenaires de la communauté internationale et, à ce titre, ils ont pris l’engagement de faire ce que toute la communauté internationale attendait d’eux, c’est-à-dire l’adoption de cette Feuille de route, dont l’organisation d’élections, au terme desquelles un gouvernement démocratique et des autorités démocratiques seront désignées au Mali.

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