Réflexion sur les mesures dans l’armée de l’air

Après l’effervescence des premières heures et le tapage médiatique, la publication des textes sur le site de la Défense ou le votre a permis d’apprécier plus justement le contenu des déclarations ministérielles. L’analyse, ci après, est le fruit d’une réflexion personnelle quant aux mesures applicables aux personnels de l’Armée de l’air. Je l’exposerai dans l’ordre des mesures annoncées et des différents volets. Enfin, une appréciation d’ensemble clôturera ce laïus.

I – VOLET INDEMNITAIRE

Les objectifs de revalorisation de l’ICM semblent dans l’absolu une juste attente des différents personnels. Nous pourrons la considérer comme juste dans le sens où elle touche l’ensemble des militaires engagés ou de carrière des trois armes. La différence des évolution entre Province et Région Parisienne est légitime. Toutefois, permet-elle aujourd’hui, à elle seule, de réduire les écarts de coût de la vie entre ces « deux mondes ».

Cependant, la programmation d’une telle mesure sur une durée de six ans pourra laisser quelque amertume. Il est évident que le coût lié à cette décision sera lourd pour les gouvernements successifs et une question s’impose, où l’argent nécessaire sera-t-il prélevé ? Cette mesure ne nuira-t-elle pas à d’autres attentes non satisfaites à ce jour ? Je reviendrai sur ce point en fin d’analyse.

Les revalorisations des ISC, indemnités des alertes opérationnelles et les taux qui s’y appliquent ne pouvaient être laissées de côté.
Premièrement, les ISC revalorisées redonneront du baume au coeur des personnes désignés pour les exercices et davantage de volontaires se présenteront. Cependant, au vu du caractère imposable de telles indemnités, il est à se demander si l’intérêt premier de percevoir plus ne provoquera pas à moyen terme une imposition plus importante en cas de changement de tranche pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Dans ce cas, les fonds nécessaires seraient tout trouvés.

Deuxièmement, l’ensemble du personnel sera félicitera de la revalorisation du taux d’ISC pour les célibataires avec le rattrapage immédiat de la moitié de l’écart par rapport au « taux marié ». Il est à espérer que le seconde partie, qui aujourd’hui n’est qu’un objectif, sera réellement appliquée dans les années prochaines et qu’elle ne reste pas une promesse à caractère électorale.
Enfin, la même satisfaction s’appliquera au réajustement de l’ISAO ou AOPER, même si le montant final de 5 Euros ne représente pas la valeur économique de la dite indemnité à son établissement, il y a une trentaine d’années.

La reconnaissance des qualifications constitue le nombre le plus important de mesures retenues. Je ne passerai pas en revue l’intégralité de celles-ci mais quelques remarques me semblent inévitables :

– L’absence totale de mesures directes au profit des Militaires Techniciens de l’Air ;
– La faible quantité de mesures applicables aux sous-officiers subalternes.

II VOLET TAOPM

Ce volet comporte la mesure la plus populaire et certainement une des plus attendues de l’ensemble des militaires. En effet, le caractère uniforme en nombre de jours indemnisés et en valeur de l’indemnisation ne pourra être le fruit de jalousie entre statuts, corps d’appartenance ou grades. Concrètement, elle se chiffre à 680 Euros. Peut-être avons nous ici les prémices d’un 13ème mois.

III VOLET SOCIAL

Mutations

L’augmentation des cubages, les mesures financières liées aux changements d’affectation faciliteront la réinstallation des personnels et leurs familles dans des nouveaux locaux. L’augmentation d es cubages est réaliste dans la mesure où le degré d’équipement des ménages a considérablement augmenté dans les quinze dernières années avec l’arrivée de la domotique, de l’informatique personnelle et le nombre croissant d’appareils d’électroménager.

Evolution de la politique de logement

La difficulté à loger en Région Parisienne légitime à elle seule le souhait du Ministre de vouloir favoriser l’accession à la propriété ou permettre de soulager le locataire potentiel du dépôt de garantie. Toutefois, il faut garder à l’esprit que Paris et sa région se sont pas seules à pratiquer des prix prohibitifs pour l’acquisition ou la location de logements décents sans tomber dans le luxe.

Par ailleurs, l’accession à la propriété aujourd’hui est réservé à des militaires dont la carrière est « assurée ». J’entends par là, militaires de carrière. Un militaire engagé, à savoir sous contrat, est considéré par le monde bancaire comme un salarié employé en contrat à durée déterminée. Aussi pour cette raison, il leur est impossible de souscrire un emprunt important dont le terme serait postérieur à la date de fin du contrat. La banque avance alors comme argument que les salaires valables à la signature ne sont plus garantis au delà de cette date. Une solution s’impose alors : ne pas révéler la réalité de la position statutaire. Face à ce problème, il devient nécessaire de garantir une carrière minimum pour l’ensemble du personnel afin que celui-ci puisse satisfaire à l’achat de biens immobiliers. Cet exemple est également valable pour des acquisitions moindres telles qu’un véhicule, outil indispensable pour travailler de nos jours.

Besoins familiaux et privés

Les mesures et aides décidées relatives à la garde des jeunes enfants amélioreront de façon certaine la vie des familles tant sur le point financier que moral.

Financièrement tout d’abord, puisque l’intégration de la notion de quotient familial et la prise en compte du lieu de résidence géographique apportent une dimension sociale à l’ensemble de ces décisions. Nous pourrons souligner l’attention portée à la préoccupation posée par les horaires atypiques et la mise en place d’une nouvelle prestation financière dans ce sens.

Moralement ensuite, parce que la réservation de places au profit d’enfant du personnel de la Défense tranquillisera les jeunes ou futurs parents sur les possibilités de faire garder leurs enfants à la reprise de l’activité professionnelle.

Sur le chapitre des études supérieures, il est à noter les efforts consentis en faveur des familles et le caractère juste de telles mesures en intégrant une fois encore la notion de quotient familial.

Enfin, la volonté d’élargir l’accès aux produits de loisir de l’IGéSA et la création des aides vacances au profit des jeunes sous-officiers ou militaire du rang de moins de trois ans de service complètent le dispositif.

Prise en compte des conditions inhérentes au service

La gratuité du repas de service est à mon avis quelque chose d’indiscutable. Dans l’optique elle serait remise en cause, il serait alors légitime de demander une indemnité compensatoire équivalente à celle que perçoivent d’autres employés de la fonction publique.
Le deuxième point relatif à l’accession aux emplois de la fonction publique entre de plein fouet dans le cadre de la reconversion du personnel militaire. Beaucoup d’efforts sont à faire dans ce domaine, notamment dans l’égalité des chances d’aboutissement des dossiers.

Il faut retenir du volet social que toutes ces dispositions sont :

– fortes ;
– justes ;
– en adéquation avec la réalité de la vie et les attentes du personnel.

Un sentiment de satisfaction se dégage de l’ensemble des mesures arrêtées. Toutefois, un certain nombre de propositions n’ont pas été évoquées.
La loi de programmation militaire y répondra peut-être (refonte et revalorisation de la grille indiciaire, prise en compte des primes de qualification et d’ancienneté dans le calcul des retraites, etc.). Aucune proposition n’a été faite quant à l’attribution de primes de qualification pour les emplois techniques inhérents aux télécommunications où à l’informatique, professions trop souvent mal connues et peu considérées.

Financièrement, les décisions prises amélioreront sans conteste la qualité de vie de l’ensemble du personnel. Il est regrettable que ces mesures de revalorisation ne s’accompagnent pas d’une indexation sur la croissance. Une telle disposition permettrait une évolution permanente et réaliste du pouvoir d’achat. Il faut espérer que nos successeurs n’auront pas à montrer les dents dans quelques années pour bénéficier de mesures équivalentes.

En ce qui concerne plus particulièrement les dispositions sociales, j’émets des réserves quant à l’égalité des chances des militaires devant les opportunités de quitter le service actif.

L’Armée de terre, la Marine et l’Armée de l’air insistent très tôt sur la reconversion. Il est même autorisé de dire que c’est vecteur de communication fort dans le recrutement des futures recrues. Si dans les brochures et les discours, les propositions sont légions et toutes aussi alléchantes les unes que les autres, la réalité réserve ma foi nombres de surprises.
Pour tout militaire de carrière désireux de prendre sa retraite ou arrivant en limité d’âge, la reconversion n’est qu’une formalité à la condition sine qua non d’avoir fait la démarche personnel de trouver un stage en entreprise. De plus, des organismes prévus à cet effet et présents sur chaque Base aérienne vous guident dans les démarches et la rédaction des différentes demandes et dossiers.

La reconversion d’un militaire sous contrat est déjà chose moins simple. Deux cas peuvent se présenter :

a) Demande de reconversion en fin ou durant la dernière année de contrat

Le militaire n’a pas souhaité souscrire un nouveau contrat, il demande à bénéficier d’un congé de reconversion ou d’accompagnement en entreprise. Celui-ci est accordé dans les six derniers du contrat ou dans les six mois maximum qui suivent l’échéance du contrat. Exceptionnellement, il peuvent être accordé dans le courant des six premiers mois de la dernière année.

b) Demande de reconversion en cours de contrat

Hormis le contrat initial, résiliable uniquement durant la période probatoire ou dans les conditions énumérées ci-dessus, un militaire à le droit de demander la résiliation de son contrat en cours uniquement pour motif grave ou incapacité physique à exercer son emploi. Ces dispositions prévues dans les textes ont été maintes fois bafouées par le passé. La dure réalité du marché de l’emploi et la volonté de réduction des effectifs dans les armées ont légitimés des demandes de résiliation de contrat en dehors des dispositions prévues, notamment afin de quitter le service actif et gagner le monde de l’entreprise privée.

Les demandes ont été traitées et satisfaites à des degrés différents. Le caractère déficitaire de certaines spécialités à empêcher l’accès à des emplois privés à certains candidats. Ce constat serait moins amère si au sein d’une même spécialité, à grade égal et dépôt quasi simultané des demandes, certaines ont été satisfaites et d’autres pas. Il s’agit d’une entrave à la liberté d’entreprendre couronné d’un préjudice professionnel et financier.

La grogne des Gendarmes a précipité la réflexion quant à la revalorisation du statut des militaires. Il faut espérer aujourd’hui que tout ceci ne soit pas qu’un feu de paille et encore moins une stratégie politique à la veille des élections, qu’à l’issue des présidentielles et des législatives le Gouvernement alors en place pérennisera ces mesures et appliquera les objectifs définis.
Si un certain scepticisme se dégage de mon discours, je reste toutefois confiant dans les avancées déjà décidées et celles à venir. Je reste plein d’espoir quant aux autres propositions non suivies d’effet à ce jour. Je sais pertinemment que l’ensemble de celles-ci ne seront pas satisfaites peu importe les raisons. Il faut d’abord garder à l’idée que la réalité économique ne le permettrait pas et que l’Armée n’est pas la seule institution dans notre pays.
Je suis en revanche déçu par l’approche médiatique du sujet. Les journaux télévisés ont publié sans détail les chiffres des mesures. Je ne suis pas certain que les Français aient compris le bien fondé de celles-ci et leur réel impact. Il est à craindre que nos concitoyens ne prennent pas la mesure de nos attentes pour la bonne et simple raison qu’ils ont encore beaucoup d’a priori sur la fonction et le statu des militaires Français.

Je ne peux que leur conseiller de se référer à votre site pour les éclairages qu’il apporte.

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