De l’art de se tirer une balle dans le pied

N’allant pas très régulièrement sur le site, il m’arrive de « découvrir » l’un ou l’autre article avec un léger décalage, ce qui a été le cas pour la prise de position de Josian. Au vu des réactions, je me suis donc empressé de rattraper ce retard et là, consternation.

Je suis moi aussi un vieux routier (une vielle vertèbre diront certains) de notre bonne vielle infanterie, bien que je n’ai que peu d’OPEX à mon actif. J’y ai parfois risqué ma vie, parfois j’y ai juste fait mon travail, mais toujours j’en ai profité pour accorder un peu de curiosité à ceux que je côtoyais dans ces moments là et je n’y ai jamais vu de quoi déclencher une guerre des boutons. Le nombre de types biens et celui des crétins avérés semble équitablement réparti dans les différentes Armes, sans oublier l’incontournable dose de poivrots et autres boulets que chacune traîne inévitablement avec elle. Les popotes sont dans ces moments là particulièrement révélatrices (encore plus qu’au quartier puisque le panel représenté est beaucoup plus diversifié). On y fait pourtant le même constat : le ras le bol est général. Seulement il y a ceux qui le disent à la popote (et encore, seulement en l’absence du chef) et ceux qui osent (en prenant des risques) le dire autrement et ailleurs.

A priori, Josian ne fait pas partie de cette dernière catégorie. Quand il ne tire pas à boulets rouges sur les gendarmes, il passe son temps à se lamenter sur ce qu’ils ont obtenu et qu’il aurait bien aimé obtenir aussi. Je lui conseille donc, dans un premier temps, de feuilleter un dictionnaire, qu’il y recherche les mots « jaloux » et puis, tant qu’à faire, « serviable » et « servile ».

Où était-il lorsque les gendarmes ont revendiqué une meilleure retraite ? En OPEX peut-être pour y grappiller quelques points d’annuités pour assurer la sienne ? Et ensuite, comme nous tous, il s’est certainement posté, le bec ouvert, sous la branche que les gendarmes secouaient, en espérant que les fruits mûres lui tomberaient dedans ? Dommage ! Ne sait-il pas encore, à son âge, qu’on n’a rien sans rien ?

En plus, si les gendarmes ont pu descendre dans la rue avec leur véhicule de service, c’est quand même une bonne nouvelle. Il y a au moins une Arme où les véhicules sont disponibles.

« Si un homme n’est pas prêt à prendre des risques pour défendre ses idées, soit les idées ne valent rien, soit c’est l’homme » E. Kishon

En tant qu’adjudant-chef ancien (et donc « chef », et par conséquent concerné par l’article 6 de notre statut), qu’a-t-il fait pour veiller aux intérêts de ses subordonnés, notamment en matière de retraite ? Et dans tous les autres domaines abordés inlassablement depuis des années, dans les rapports sur le moral ou dans nos instances de « dé concertation », et qui trouvent toujours porte close ? Nous demandions, « gentiment », depuis des années, l’intégration des primes imposables dans le calcul de la retraite. Qu’avons nous obtenu ? Une retraite complémentaire avec… un prélèvement supplémentaire sur la solde. N’a-t-il pas encore compris que nos chefs civils, les vrais, les décideurs, naviguent à vue et que notre « radeau » est ballotté entre le « ferme ta g… et le cause toujours » ?

Pour mettre du beurre dans ses épinards de retraité, il pourra toujours faire de la « réserve » (a priori il en a l’habitude), car d’un citron, même déjà pressé, on arrive toujours à extirper quelques gouttes de plus.

Et puis je me suis mis à espérer. Oui, j’ai espéré que Josian n’était pas vraiment un adjudant-chef qui s’est glissé dans la peau de « l’idiot utile », que c’était un canular, pour prendre un peu la température, suivant la tactique éprouvée du « prêcher le faux pour avoir le vrai ». Car comment croire qu’un homme qui, d’après ses propres dires, s’est fait rouler dans la farine pendant toute sa carrière, puisse défendre de telles positions et tirer sur ceux qui, par ricochet, pourraient éventuellement obtenir des avancées non négligeables pour nous aussi, même si dans notre inertie et notre attentisme béat nous ne le méritons pas?

Mais la réalité m’a vite rattrapé. Je sais aussi, malheureusement, que des « Josian », il en existe plus qu’il n’en faut pour bloquer la situation pendant longtemps encore. Il ne reste qu’à souhaiter que, si jamais ses supérieurs l’invitent à dîner, il sera à la hauteur de notre regretté Jacques Villeret [1].

Major L R Elsaesser

[1] Jacques Villeret Acteur français, né le 6 Février 1951 à Loches, Indre-et-Loire (France), décédé le 28 Janvier 2005 à Evreux (hémorragie interne), actuellement au cinéma dans : Le Dîner de cons, Danton.

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