Après la prise de contact avec le CSFM d’Hervé MORIN, les interrogations d’un officier

Dans son discours du 26 juin au CSFM, le nouveau ministre de la défense a découvert, je cite, qu’« au regard des moyennes nationales, on divorce davantage dans le monde militaire et on y est beaucoup moins propriétaire de son logement […] que les militaires ont davantage d’enfants, mais également que le taux d’emploi des épouses de militaires est inférieur au taux national, et par conséquent les ressources des ménages reposent essentiellement sur votre solde ».

Il est intéressant de constater que je me retrouve en tous points dans ce que je n’ose appeler un « profil type ». Et je crois ne pas être le seul dans ce cas.

Marié en 91, divorcé en 97 après 6 années intenses ponctuées par une scolarité en Ecole de formation, puis en école d’application (soit 2 affectations différentes en 3 ans ! Pratique lorsque le conjoint travaille…) pour enfin être affecté dans un régiment où je devais enchaîner 16 mois d’absence en 3 OPEX.

De 91 à 94, sachant que mon épouse venait juste de trouver du travail sur Paris, nous avions opté pour un célibat géographique, considérant que le TGV permettrait de réduire les notions de distance et d’éloignement… Nous avions prolongé ce célibat par la suite, le temps que le rythme des OPEX se calme un peu. Je ne pensais pas que j’allais partir aussi souvent et aussi longtemps dans les Balkans !

Au bout du compte, mon épouse a craqué, confrontée à toutes mes absences et se retrouvant seule dans une garnison peu attractive, après avoir été une femme active sur Paris.

Plusieurs années après, je me suis remarié et je suis désormais père de 3 enfants. Muté l’année dernière, mon conjoint a du donner sa démission pour me suivre dans ma nouvelle affectation. Depuis, elle « rame » pour retrouver du travail.

Je ne suis toujours pas propriétaire (je me demande d’ailleurs quand je pourrai l’être) et ma solde (au taux métropole car depuis quelques années, j’ai posé les valises et fait le choix de privilégier la famille) sert à faire vivre tout mon petit monde.

L’objet de ce courrier n’est pas tant de me plaindre car, après tout, en regardant autour de moi, je me rends compte que le sort de certains n’est pas nécessairement enviable, mais d’essayer de comprendre et de poser des questions.

Je travaille actuellement dans une direction où la diminution des effectifs est une réalité depuis de nombreuses années, sans que cela fasse la une des médias. La « Grande Muette », fidèle à sa tradition, ne bronche pas (en apparence) et exécute. A côté de nous, nos amis de l’éducation nationale lèvent les boucliers à l’annonce du non-renouvellement de 10000 postes ! 2 poids, 2 mesures…

La France fournit un effort colossal pour être présente partout dans le monde… Mais se donne-t-elle réellement les moyens de sa politique ? De toute évidence, non. Je pense qu’il serait plus raisonnable d’éviter l’éparpillement, de se concentrer sur certains théâtres, et d’arrêter de vouloir jouer les gendarmes du monde alors que nous n’en avons pas les moyens.

La nouvelle grille indiciaire, proposée et voulue par Michèle ALLIOT-MARIE a fait naître des espoirs. Je n’ose pas imaginer que tout cela ne soit qu’un effet d’annonce afin de nous inciter à rester dans le rang et à garder le silence… Cette revalorisation est une attente forte et entre nous, nous en parlons beaucoup, toutes catégories confondues. En effet, il ne faudrait pas que les efforts consentis ne concernent que le bas de la pyramide. Qui plus est, tout cela s’inscrit, je pense, dans les thèmes développés par le Président de la République au cours de la campagne : moins de fonctionnaires, mais mieux payés, qui vont de fait plus consommer…

Je pensais que tout allait de pair, mais force est de constater que la simultanéité des actions n’est pas de mise.

Le nombre de fonctionnaires dans notre ministère a diminué et continue de diminuer. Mais point d’augmentation à l’horizon…

Dans son discours, le ministre a fait de la reconversion un « sujet capital et absolument prioritaire ». Louable, mais pas vraiment rassurant ! Comment interpréter ses propos ? Veut-il déjà nous inciter à davantage quitter l’institution ?

Il a par ailleurs déclaré qu’il n’y aurait « pas de nouvelle grille avant le 1er janvier 2009 » mais qu’il défendra, je cite «dans le cadre du budget 2008 les éléments qui peuvent déjà être mis en oeuvre : la grille indiciaire pour les militaires du rang et les sous-officiers des grades de sergent et de gendarme ». Quid des autres grades ?

Bref, je me montrai confiant dans l’avenir, confiant dans notre ministre Michèle ALLIOT-MARIE (qui depuis a changé de portefeuille… inquiète de ne pouvoir tenir ses promesses ?). Et je constate malheureusement en cette période difficile que l’on fait ressurgir ces thèmes qui me déplaisent fortement : la réduction du budget de la défense afin de pallier les insuffisances par ci, et l’incapacité à vouloir se réformer par là ; la défense considérée comme variable d’ajustement, etc.

Lord Byron

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