Le caporal esquinté

Le caporal esquinté

(Extrait du Canard Enchaîné du mercredi 10 janvier)

Un drôle de procès attend l’état-major des armées. La scène s’est déroulée le 25 avril 2005, à Libreville, au Gabon. Le colonel qui commande le bataillon d’infanterie de marine organise une petite compétition de natation entre ses troupes et un contingent venu de métropole pour une courte mission. Sur le bord du bassin, tout le monde encourage les nageurs. Dans l’eau, c’est le caporal-chef Couillard, du 8ème régiment de parachutistes, qui fait la course en tête. Le champion du jour est sur le point de toucher au but quand le colon, furieux de voir ses petits gars distancés, lui saute dessus à pieds joints. Et atterrit sur la nuque du malheureux Couillard, qu’il assomme a moitié. Pour avoir osé protester, celui-ci est fusillé du regard du gradé, qui lui lance : « Les parachutistes aujourd’hui sont fragiles. »

L’histoire, sur place, a beaucoup fait rire le colonel et sa cour. Le caporal rigole moins. Les toubibs ont diagnostiqué une sévère hernie discale. La mauviette a été rapatriée. Dix-huit mois et deux opérations plus tard, le sous-off, toujours handicapé, est sur le point d’être réformé. Après l’intervention chirurgicale, il a frôlé l’arrêt cardiaque, en lisant le rapport d’accident rédigé et signé par le colonel farceur. Pour se couvrir, l’officier a servi une histoire de collision aquatique. Flanqué de trois témoins qui ont parfaitement vu la scène, Couillard a porté plainte.

Une autre compétition commence.

R.B

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